Question écrite n° 4595 :
Les dysfonctionnements dans le déploiement de la fibre sur le territoire

17e Législature

Question de : M. Julien Limongi
Seine-et-Marne (4e circonscription) - Rassemblement National

M. Julien Limongi interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les nombreux dysfonctionnements liés au mode opératoire STOC (sous-traitance opérateur commercial), utilisé pour le raccordement des abonnés à la fibre optique. Ce modèle, adopté par les principaux fournisseurs d'accès à internet, délègue le raccordement final à des sous-traitants, parfois en cascade, ce qui entraîne une perte de contrôle sur la qualité des interventions. Cette organisation est à l'origine de nombreuses anomalies qui pénalisent à la fois les usagers et les collectivités. De nombreux abonnés se retrouvent déconnectés ou mal raccordés en raison d'interventions effectuées sans suivi rigoureux. Les infrastructures, telles que les armoires techniques et les boîtiers de raccordement, subissent des dégradations répétées. Le non-respect des routes optiques fragilise l'ensemble du réseau et entraîne un vieillissement prématuré des équipements. De plus, l'absence de traçabilité des interventions, due à la multiplication des niveaux de sous-traitance, complique l'identification des responsabilités et alourdit les coûts d'exploitation. Par ailleurs, les syndicats mixtes départementaux, censés fédérer et assurer le déploiement de la fibre sur le territoire, ne semblent être assujettis à aucune obligation de résultats. Ce manque de cadre entraîne des délais d'installation parfois très longs, difficiles à supporter pour les administrés qui restent dans l'attente d'un accès effectif à la fibre. Cette situation est d'autant plus préjudiciable pour les habitants des zones théoriquement éligibles à la fibre mais où le réseau n'a pas encore été déployé. Ne pouvant bénéficier d'offres alternatives comme les box 4G ou 5G proposées par les opérateurs aux zones non couvertes, ces administrés sont contraints de financer eux-mêmes un moyen d'accès à internet, souvent à un coût plus élevé que la moyenne. Face à ces constats et alors que la fibre optique constitue un enjeu majeur d'aménagement du territoire, il devient urgent de mieux encadrer ces pratiques afin de garantir un service fiable et durable pour les usagers. Aussi, il souhaite savoir quelles mesures il entend prendre pour limiter ces dérives, renforcer la régulation et le contrôle de la sous-traitance, mais aussi imposer aux syndicats départementaux des obligations de résultats afin de garantir un accès effectif et rapide à la fibre pour l'ensemble des citoyens.

Réponse publiée le 29 avril 2025

Le mode de « sous-traitance à l'opérateur commercial » (STOC) a permis de répondre à une appétence forte des Français pour la fibre optique et de faire face à un rythme soutenu de demandes de raccordement à la fibre optique. La France est aujourd'hui la championne européenne en matière d'abonnements à la fibre optique, loin devant les autres pays européens. Toutefois, le mode STOC a pu affecter la qualité d'exploitation des réseaux déployés, bien que tous les dysfonctionnements ne puissent lui être imputés, des choix d'architectures de réseaux atypiques par les opérateurs d'infrastructures ayant également pu être à l'origine des problèmes de qualité. La filière s'est engagée en septembre 2022 pour une amélioration de la qualité de service. Ces engagements portent sur trois axes : Le premier axe relève du renforcement de la formation des intervenants et la qualité des interventions terrain par la mise en place d'une certification au niveau des intervenants et des entreprises. La filière s'est accordée sur des grilles de compétences qui ont été intégrées dans les contrats en avril 2023 par les entreprises concernées. Les techniciens sont désormais tenus de réaliser cette certification, et leur employeur de leur proposer des formations complémentaires dans le cas où tous les prérequis ne seraient pas respectés. Le second axe porte sur le renforcement des contrôles à la fois par : - La transmission des opérateurs commerciaux de leurs plannings d'intervention aux opérateurs d'infrastructure en faisant la demande est en cours d'expérimentation sur une vingtaine de réseau où la qualité de réseau est la plus dégradée. Pour en éprouver l'efficacité, un nombre plus significatif d'audits conduits par les opérateurs devra être réalisé ; - La mise en œuvre effective des comptes-rendus d'intervention (CRI), dispositif clé pour valider la qualité des raccordements, s'est maintenant généralisée ; - La mise en œuvre d'e-intervention, un outil partagé entre tous les opérateurs, qui permet d'envoyer des alertes en cas de débranchements involontaires voire volontaires. Le troisième axe porte sur la reprise des infrastructures dégradées, que ce soit au niveau des points de mutualisation ou des réseaux vieillissants ou mal dimensionnés qui nécessitent une reprise globale de l'infrastructure. A ce jour, Xp Fibre, Altitude et Free ont lancé des plans de reprise dont l'Arcep assure le suivi. Le Gouvernement demeure vigilant sur la mise en œuvre effective de ces trois axes par les opérateurs et en a confié le contrôle à l'Arcep. L'Autorité effectue un état des lieux de la mise en œuvre de chacun des axes à l'occasion des comités de concertation « réseaux fixes », qui réunissent tous les trimestres les associations de collectivités, les opérateurs d'infrastructures, les opérateurs commerciaux, les fédérations professionnelles, les services de l'Etat (DGE, ANCT), ainsi que la Commission Supérieure du Numérique et des Postes. En outre, l'Arcep publie chaque semestre un observatoire de la qualité des réseaux en fibre optique, évaluant pour chaque réseaux le taux de panne et le taux d'échec de raccordement. La dernière publication en date de mars 2025 atteste d'une amélioration de la qualité des réseaux en fibre optique. L'objectif gouvernemental est celui d'une généralisation des déploiements d'ici la fin de l'année 2025 ; les déploiements se poursuivent donc pour atteindre cet objectif. Concernant les personnes qui ne sont pas encore éligibles à la fibre optique et qui souhaiteraient disposer d'une connectivité très haut débit, l'Etat a mis en place le dispositif « Cohésion numérique des territoires » qui permet de prendre en charge les frais d'installation et d'équipements hertziens (4G/5G fixe, satellite…) jusqu'à 300 € (600 € sous conditions de ressources). Concernant la responsabilité des syndicats mixtes départementaux, il est à rappeler que la compétence d'établissement et d'exploitation des infrastructures de réseaux et de communications électroniques peut être confiée aux collectivités territoriales ou à leurs groupements en vertu de l'article 1425-1 du Code général des collectivités territoriales. Cet article précise qu'« une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales peut déléguer à un syndicat mixte incluant au moins une région ou un département tout ou partie de la compétence relative à un ou plusieurs réseaux de communications électroniques ». Les projets de déploiements de réseaux d'initiative publique (RIP) sont soumis à plusieurs obligations qui contraignent les déploiements. Le cahier des charges « Réseaux d'initiative publique » indique que le projet pour s'assurer du soutien du financement de l'Etat doit prévoir à l'horizon 2025 « l'achèvement de la couverture du territoire en FttH, en créant les conditions permettant l'éligibilité de l'intégralité des locaux » ; Les projets de RIP sont soumis au cadre de régulation fixé par l'Arcep sur les réseaux FttH dit « cadre symétrique », qui fixe les modalités d'accès des opérateurs commerciaux à ces réseaux. Il impose notamment une obligation de « complétude » du réseau en zone moins dense dans le cadre de sa décision n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010. Cette obligation impose à l'opérateur d'infrastructure de déployer un réseau permettant de raccorder tous les logements et locaux à usage professionnel d'une zone dans un délai raisonnable (le délai de complétude). La décision n° 2020-1432 de l'Arcep en date du 8 décembre 2020 précisant les modalités de l'accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, est également venue renforcer les obligations des opérateurs d'infrastructures relatives au délai de raccordement.

Données clés

Auteur : M. Julien Limongi

Type de question : Question écrite

Rubrique : Télécommunications

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Industrie et énergie

Dates :
Question publiée le 25 février 2025
Réponse publiée le 29 avril 2025

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