Question écrite n° 4645 :
Fonds prélevés sur les consommateurs via le relèvement du SRP+10

17e Législature

Question de : M. Romain Daubié
Ain (2e circonscription) - Les Démocrates

M. Romain Daubié appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conséquences du relèvement du seuil de revente à perte (SRP) dans le secteur de la grande distribution, notamment l'instauration d'une marge minimale garantie de 10 %. En effet, selon une étude récente, cette mesure a entraîné une ponction injustifiée de 1,4 milliard d'euros sur le pouvoir d'achat des consommateurs, sans pour autant améliorer les revenus des agriculteurs, qui continuent de faire face à des difficultés économiques en raison d'un manque d'encadrement des négociations commerciales. Cette situation soulève des préoccupations quant à l'efficacité et à l'équité de cette mesure, qui semble profiter davantage aux acteurs de la grande distribution qu'aux producteurs ou aux consommateurs. L'effet inflationniste de cette mesure sur les produits alimentaires est désormais bien documenté et il est impératif de reconsidérer son impact sur l'économie dans son ensemble. Face à ces constats, M. le député interroge M. le ministre sur les mesures envisagées pour évaluer et, le cas échéant, réviser cette politique afin de garantir un juste équilibre entre les intérêts des consommateurs, des producteurs et des distributeurs. Plus précisément, il souhaite savoir quelles actions concrètes seront mises en œuvre pour réévaluer l'impact du SRP+10 sur le pouvoir d'achat des consommateurs et son efficacité à soutenir les revenus des agriculteurs, mettre en place des sanctions dissuasives contre les pratiques commerciales abusives des industriels et des enseignes qui imposent des tarifs injustes aux agriculteurs, assurer une meilleure régulation des négociations commerciales pour protéger les intérêts des producteurs et des consommateurs. Enfin, il lui demande de préciser les initiatives prévues pour garantir une transition vers un modèle économique plus équitable et durable dans le secteur de la grande distribution.

Réponse publiée le 29 avril 2025

Introduit par l'ordonnance n° 2018-1128 du 12 décembre 2018 relative au relèvement du seuil de revente à perte et à l'encadrement des promotions pour les denrées et certains produits alimentaires, le relèvement du seuil de revente à perte de 10 % sur les produits alimentaires (SRP+10) devait contribuer à améliorer la répartition de la valeur dans la chaîne de production agroalimentaire entre producteurs, industriels et distributeurs. L'objectif, en effet, était de contraindre les distributeurs à réaliser un minimum de marges sur les produits vendus sans marge (généralement les produits d'appel), afin que les négociations sur d'autres produits agricoles et alimentaires aboutissent à des prix convenus entre industriels et distributeurs plus élevés. Prolongé jusqu'en avril 2025 par la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023 tendant à renforcer l'équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, et bien que son impact sur le revenu agricole soit difficilement mesurable compte tenu de la complexité de la chaîne de valeur, ce dispositif a néanmoins démontré son utilité à travers plusieurs aspects : - la stabilisation des prix : en freinant la guerre des prix, le SRP+10 a permis de réduire la pression sur les marges des producteurs et des transformateurs, contribuant ainsi à une plus grande stabilité économique pour les filières agricoles ; - le consensus entre les parties prenantes : le maintien de ce mécanisme est soutenu par une grande majorité des acteurs producteurs, transformateurs et, dans une large mesure, distributeurs, témoignant de son rôle structurant pour la filière. Par ailleurs, cette mesure n'a pas entraîné l'inflation redoutée initialement par les associations de consommateurs. Deux experts indépendants ont produit un rapport au Parlement, accessible sur le site de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui évalue l'impact des mesures de relèvement du seuil de revente à perte et d'encadrement des promotions. Le travail des experts conclut que l'effet causal de ces mesures sur les prix n'est pas statistiquement significatif. Pour ces raisons, le Gouvernement soutient donc la proposition de loi qui a été adoptée définitivement le 10 avril, et promulguée le 15 avril, permettant de prolonger la majoration du seuil de revente à perte jusqu'au 15 avril 2028. Ce texte garantira aux producteurs, transformateurs et distributeurs un cadre juridique stable, indispensable pour leur permettre de planifier leurs investissements et d'adopter des stratégies à long terme. La prolongation pour une période de trois ans constitue, par ailleurs, une opportunité de mesurer, avec plus de recul, les effets du SRP+10 sur les différents maillons de la chaîne alimentaire. Ces enseignements permettront de décider, en toute connaissance de cause, sa pérennisation ou une adaptation future. Pour ce faire, la ministre déléguée chargée du Commerce, de l'Artisanat, des Petites et Moyennes entreprises et de l'Economie sociale et solidaire, Véronique Louwagie, a indiqué lors des débats parlementaires la mise en place d'un cadre méthodologique, concerté avec les acteurs professionnels, afin de disposer de référentiels communs et, ainsi, d'affiner la rémontée d'informations chiffrées permettant d'évaluer les effets du SRP+10. Par ailleurs, la loi du 15 avril 2025 prévoit désormais que la non-transmission par les distributeurs des informations chiffrées permettant d'évaluer les effets du SRP+10 sera passible d'une sanction pouvant atteindre jusqu'à 0,4 % du chiffre d'affaires France du distributeur. Enfin, il est assuré que la DGCCRF est pleinement mobilisée pour veiller à l'équilibre des relations commerciales entre distributeurs, industriels et producteurs de produits alimentaires. Ainsi, plus de 1 400 contrats industriels-distributeurs ont été contrôlés lors des dernières négociations commerciales afin de s'assurer du respect des dispositions encadrant les relations commerciales. Comme chaque année, la DGCCRF n'hésitera pas à sanctionner lourdement les manquements constatés lors de ces contrôles. En 2024, elle a notamment infligé des amendes de plusieurs millions d'euros aux centrales d'achat européennes de Leclerc et Carrefour qui n'avaient pas respecté la date-butoir pour la signature des contrats annuels et mis en œuvre plusieurs procédures d'injonction sous astreinte ou procédé à la liquidation d'astreintes en matière de pénalités logistiques.

Données clés

Auteur : M. Romain Daubié

Type de question : Question écrite

Rubrique : Consommation

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Commerce, artisanat, PME, économie sociale et solidaire

Dates :
Question publiée le 4 mars 2025
Réponse publiée le 29 avril 2025

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