Question écrite n° 4722 :
Exposition "Nouvelles Reines" en la crypte de la basilique de Saint-Denis

17e Législature

Question de : M. Julien Odoul
Yonne (3e circonscription) - Rassemblement National

M. Julien Odoul interroge Mme la ministre de la culture sur l'organisation de l'exposition « Nouvelles Reines » au sein de la crypte de la basilique Saint-Denis, lieu emblématique de l'histoire de France où reposent les sépultures des rois et reines qui ont façonné la nation française. Cette exposition, qui rend hommage à des immigrées clandestines et à des femmes voilées en les qualifiant de « nouvelles reines », suscite une profonde indignation. Il est inconcevable que dans un lieu aussi chargé de symboles et d'histoire, où reposent les souverains de France, on puisse détourner le patrimoine national pour en faire un support idéologique et militant. Cette mise en scène, qui s'inscrit dans une logique de provocation et de réécriture de l'histoire, constitue une atteinte au respect dû à ce haut lieu de la mémoire nationale et à ceux qui y sont inhumés. M. le député rappelle que la basilique Saint-Denis est un monument inscrit au titre des Monuments historiques et qu'à ce titre, il est du devoir du ministère de la culture de veiller à ce que sa vocation patrimoniale et mémorielle soit respectée. La récupération idéologique d'un tel site sous couvert de création artistique ne peut être tolérée, d'autant que les Français attendent de leurs institutions qu'elles préservent et valorisent leur patrimoine plutôt que de le détourner à des fins militantes. Il demande donc à Mme la ministre de la culture de bien vouloir s'expliquer sur l'organisation d'une telle exposition, d'indiquer quels ont été les critères de sélection de ce projet et de préciser quelles mesures elle entend prendre pour garantir que les lieux emblématiques de l'Histoire nationale ne soient plus instrumentalisés au mépris de leur signification historique et culturelle.

Réponse publiée le 6 mai 2025

La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, dite « loi LCAP », a consacré trois principes fondamentaux : son article 1er affirme la liberté de la création artistique ; son article 2 garantit la liberté de la diffusion de la création artistique, qui s'exerce dans le respect des principes encadrant la liberté d'expression ; son article 3 prévoit notamment que l'État et les collectivités territoriales veillent au respect de la liberté de programmation artistique. La basilique de Saint-Denis est aujourd'hui à la fois un lieu de culte et un établissement culturel majeur géré par le Centre des monuments nationaux, établissement public du ministère de la culture. Parce qu'elle est chargée d'une forte importance symbolique, en Seine-Saint-Denis comme en France en général, les gestionnaires de ce monument se sont engagés depuis de nombreuses années dans une programmation culturelle ouverte au plus grand nombre. Par ailleurs, les utilisations culturelles des édifices cultuels, même lorsqu'ils appartiennent à l'État ou à une commune, sont systématiquement subordonnées, conformément à l'article L. 2124-31 du code général de la propriété des personnes publiques, à l'accord de l'affectataire cultuel, c'est-à-dire le curé nommé par l'évêque, pour leur utilisation à des fins d'activités non cultuelles. L'exposition « Nouvelles Reines », organisée en partenariat avec la Ville de Saint-Denis et avec de nombreuses associations locales, s'inscrit dans ce cadre continu d'actions nationales et locales menées en faveur de la démocratie culturelle. Le projet, soutenu par la direction régionale des affaires culturelles d'Île-de-France, mené avec des femmes de Seine-Saint-Denis et de nombreuses structures du champ social, vise à mettre en lumière leurs parcours et leur résilience en dehors de tout caractère religieux ou revendicatif. Il répond aux critères appliqués à l'ensemble des projets soutenus au titre de ces actions et aux objectifs de participation du plus grand nombre à la vie culturelle. Dans ce cadre, la sélection du projet a été effectuée en plein accord avec les autorités chargées de la gestion du lieu. La sélection a été menée avec transparence, au titre du soutien aux actions « Politique de la ville hors appel à projets », fondées sur des objectifs d'action culturelle en direction des habitants des quartiers Politique de la ville, avec des ateliers menés avec des femmes de Saint-Denis et d'Aubervilliers, réunies grâce aux associations du champ social et aux structures partenaires (cellule d'accompagnement des violences faites aux femmes de la Ville de Saint-Denis, maison de quartier Pierre Sémard, Femmes du Franc-Moisin…). Il n'y a donc eu ni récupération ni dénaturation, ni détournement patrimonial. En revanche, le ministère de la culture ne peut que s'opposer aux actions de censure et de recouvrement des œuvres menées à l'encontre de l'exposition « Nouvelles Reines » le 11 mars dernier. Ces actions constituent en effet une atteinte aux libertés fondamentales de la création artistique, de sa diffusion et de sa programmation, telles que protégées par la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, ainsi qu'au droit de chacune et de chacun à prendre part librement à la vie culturelle de la communauté et de jouir des arts, tel qu'énoncé à l'article 27 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. C'est pourquoi, face au constat, ces dernières années, d'une recrudescence des entraves à ces libertés, le ministère de la culture a mis en place, en décembre 2024, un plan d'action en faveur de la liberté de création. À travers cette démarche nationale, il s'agit de mieux protéger les acteurs culturels contre tout acte ou toute tentative de censure, mais également de sensibiliser l'ensemble des partenaires, du champ professionnel comme de la société civile, à la nécessité de préserver et de garantir les libertés de création artistique, de diffusion et de programmation, sans lesquelles il n'existe pas de démocratie.

Données clés

Auteur : M. Julien Odoul

Type de question : Question écrite

Rubrique : Patrimoine culturel

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Dates :
Question publiée le 4 mars 2025
Réponse publiée le 6 mai 2025

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