Question écrite n° 4784 :
Nécessité d'une régulation des cormorans pour préserver la filière piscicole

17e Législature

Question de : M. Daniel Grenon
Yonne (1re circonscription) - Non inscrit

M. Daniel Grenon alerte Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur l'impact préoccupant de la prolifération des cormorans sur la filière piscicole. Autrefois menacée, cette espèce a vu sa population croître de manière exponentielle ces dernières décennies, exerçant une pression de plus en plus forte sur les ressources piscicoles. En raison de leur mode de chasse en groupe et de leurs besoins alimentaires élevés, ces oiseaux provoquent des pertes importantes pour les exploitations piscicoles, mettant en péril leur équilibre économique et menaçant la biodiversité des milieux aquatiques. Malgré cette situation, la régulation de l'espèce demeure limitée par des obstacles administratifs et juridiques. Plusieurs arrêtés ministériels fixant des quotas de prélèvement ont récemment été annulés, créant un vide juridique qui laisse les pisciculteurs sans solution face aux dommages causés. Par ailleurs, les contraintes imposées aux professionnels du secteur, notamment l'obligation de démontrer scientifiquement les impacts des cormorans ou de respecter des délais administratifs contraignants pour la transmission des rapports de destruction, compliquent encore davantage leur activité. Face à ces enjeux, il est impératif que le Gouvernement prenne des mesures concrètes pour permettre une gestion équilibrée de la population de cormorans et protéger la filière piscicole. Pour toutes ces raisons, il lui demande si le Gouvernement entend mettre en place des mesures concrètes pour les modalités de régulation de ces oiseaux, alléger les contraintes administratives pesant sur les pisciculteurs et reconnaître et indemniser les préjudices subis.

Réponse publiée le 8 avril 2025

Le grand cormoran est une espèce autochtone, piscivore, protégée au niveau national. Il bénéficie également au niveau européen du régime général de la protection de toutes les espèces d'oiseaux (directive « oiseaux »). La population de la sous-espèce Phalacrocorax carbo sinensis s'était significativement réduite jusque dans les années 1970. Depuis lors, en raison de sa protection, le nombre moyen de grands cormorans a augmenté jusqu'à atteindre une population de presque 120 000 individus hivernants en 2024, ce chiffre étant relativement stable depuis 2013. Afin de contrôler l'impact que le grand cormoran occasionne sur les piscicultures et, le cas échéant, les poissons sauvages, un système dérogatoire à la protection stricte permet de mener des opérations de régulation depuis les années 1990. Ces moyens d'action font régulièrement l'objet d'ajustements, notamment en lien avec l'évolution de la population sur le territoire et les besoins des acteurs. Ainsi le nouvel arrêté-cadre du 24 février 2025 fixe les nouvelles conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de perturbation intentionnelle et de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans. Ce texte autorise de nouveau la destruction de grands cormorans au titre de la protection des espèces piscicoles menacées dans les cours d'eau et plans d'eau. Au-delà des consultations obligatoires, il a fait l'objet de nombreux échanges avec l'ensemble des partenaires concernés afin de tenir compte de l'ensemble des remarques des parties prenantes. Il apporte un cadre rénové, plus ambitieux et plus sécurisé juridiquement, visant à la cohabitation du grand cormoran avec les pisciculteurs et à la limitation de son impact sur les écosystèmes aquatiques, dans le respect de la réglementation en vigueur pour la protection des espèces. Dans le nouvel arrêté-cadre du 24 février 2025 figurent des simplifications administratives et des assouplissements importants s'agissant des dérogations à l'interdiction de perturbation intentionnelle et de destruction de l'espèce. Ainsi la période de destruction est étendue de droit jusqu'au 30 juin pour les piscicultures. La mise en œuvre d'opérations complémentaires est permise jusqu'au 31 juillet en pisciculture sur justification (auparavant, les opérations complémentaires devaient s'achever au plus tard le 30 juin). Désormais, les plafonds de destruction autorisés au titre de la protection des poissons menacés seront fixés par les préfets en respectant le seuil maximal de 20 % de la population départementale hivernante recensée lors du comptage national, ce seuil pouvant être porté à 30 % en cas d'absence de plafond sur les piscicultures dans le département. En outre, en cas d'atteinte du plafond accordé au titre de la protection des piscicultures avant la fin de la campagne, le plafond peut être augmenté dans la limite de 10 % du nombre d'individus autorisés à la destruction sur les piscicultures dans le département. De même, afin de piloter au plus près les destructions de grand cormoran, il est ajouté un délai de transmission des comptes-rendus des opérations aux préfets de 72 heures suivant les destructions, via une plateforme en ligne simplifiée qui sera créée. Enfin, tout bénéficiaire d'une dérogation à l'interdiction de destruction pourra réaliser, aux mêmes périodes et sur les mêmes lieux que les tirs, en complément, des opérations d'effarouchement sonores et visuels, sans qu'il soit besoin d'effectuer des démarches administratives supplémentaires. L'ensemble de ces assouplissements doit cependant respecter les enjeux liés aux règlementations en vigueur, et notamment l'exigence que des mesures alternatives aient préalablement été mises en place sans succès, et le nécessaire évitement des impacts sur les autres espèces protégées. Ainsi, le texte a pour ambition d'assurer une meilleure cohabitation entre le grand cormoran et les activités de pêche et de pisciculture, tout en permettant de maintenir un bon état de conservation de l'espèce et de limiter l'impact sur le milieu des opérations menées.

Données clés

Auteur : M. Daniel Grenon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Aquaculture et pêche professionnelle

Ministère interrogé : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 11 mars 2025
Réponse publiée le 8 avril 2025

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