Mesures urgentes pour sauver les exploitations agricoles en zones intermédiaires
Question de :
M. Nicolas Forissier
Indre (2e circonscription) - Droite Républicaine
M. Nicolas Forissier alerte Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la situation particulièrement dramatique que traverse le monde agricole et plus spécifiquement les exploitations céréalières, d'élevage et de polyculture-élevage des zones intermédiaires. Ces exploitations subissent de plein fouet les conséquences graves de la crise économique et climatique de l'année 2024. Les pluies incessantes ont provoqué une chute importante des rendements et de la qualité des récoltes, tandis que la hausse des charges de production et la baisse des prix des céréales plongent de nombreux agriculteurs dans une détresse financière sans précédent, notamment dans l'Indre (Boischaut Nord, Boischaut Sud et la Champagne Berrichonne) et le Cher. Malgré les prêts garantis par l'État (PGE), qui ont constitué un soutien nécessaire, ces mesures restent insuffisantes pour compenser les pertes. En outre, les exploitations céréalières des zones intermédiaires sont particulièrement vulnérables en raison de conditions pédoclimatiques défavorables. Cette situation risque de conduire à la cessation d'activité de nombreuses exploitations, avec des conséquences économiques et sociales graves pour ces territoires. Face à ce constat, M. le député estime qu'il est urgent de prendre des mesures de soutien adaptées à la situation. Il propose l'ouverture de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) aux exploitations céréalières des zones intermédiaires, avec un montant de 70 euros par hectare, plafonné à 75 hectares, comme mesure indispensable pour maintenir ces exploitations viables. Il estime également nécessaire de revaloriser l'ICHN pour les éleveurs des mêmes zones et d'adapter les critères d'accès à l'indemnisation de solidarité nationale (ISN) pour préserver la compétitivité de ces exploitations. Il lui demande donc de préciser quelles mesures concrètes et urgentes le Gouvernement envisage de mettre en œuvre pour soutenir les exploitations céréalières des zones intermédiaires et garantir leur pérennité face aux défis économiques et climatiques actuels.
Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2024
SITUATION DES EXPLOITATIONS CÉRÉALIÈRES DANS LES ZONES INTERMÉDIAIRES
Mme la présidente . La parole est à M. Nicolas Forissier, pour exposer sa question, no 4, relative à la situation des exploitations céréalières dans les zones intermédiaires.
M. Nicolas Forissier . Quelle que soit la qualité des représentants du gouvernement ici présents, je regrette que Mme la ministre de l'agriculture ne soit pas là pour nous éclairer sur des sujets majeurs ; je m'associe d'ailleurs aux propos que vient de tenir mon collègue quant à l'abattoir de Blancafort.
Madame la ministre déléguée, je vous prie de faire part à Mme la ministre de l'agriculture des préoccupations des élus, des éleveurs et des agriculteurs des zones intermédiaires. Ces zones représentent une grande partie du territoire, du Sud au Nord-Est ; elles produisent un peu de tout, mais n'ont pas les rendements élevés des grandes régions céréalières ou des zones favorisées, voire des zones de montagne bénéficiant de dispositifs particuliers.
Leur situation devient dramatique et exige une réponse urgente. En effet, les exploitations céréalières, d'élevage et de polyculture-élevage de ces zones, particulièrement dans les territoires emblématiques du Berry, tels que le Boischaut Nord, le Boischaut Sud ou la Champagne berrichonne, dans l'Indre et dans le Cher, des exploitations qui forment le socle de notre souveraineté alimentaire, ont besoin de reconnaissance et de mesures particulières. Les pluies incessantes de cette année ont provoqué une chute vertigineuse des rendements et de la qualité des récoltes, alors que les charges de production explosent et que les prix des céréales s'effondrent. Ces pressions combinées plongent les agriculteurs dans une détresse financière sans précédent. La situation des trésoreries est très mauvaise, certaines sont en déficit, ce qui menace l'activité de nombreuses exploitations.
Les dispositifs actuels, tel que le prêt garanti qui sera bientôt déployé, sont nécessaires, mais ils sont insuffisants, notamment pour les zones intermédiaires. Faisant preuve de responsabilité, Mme la ministre de l'agriculture se décidera-t-elle à élargir, comme je le lui ai demandé par écrit, après avoir travaillé sur cette question avec des professionnels, l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) aux exploitations céréalières des zones intermédiaires, pour un montant de 70 euros par hectare, plafonné à 75 hectares, ne serait-ce que pour une année ou deux, de façon exceptionnelle ?
Envisage-t-elle également de revaloriser l'ICHN pour les éleveurs et d'adapter les critères d'accès à l'indemnisation de solidarité nationale (ISN) afin de garantir la compétitivité et l'avenir de ces exploitations ? Enfin, je m'associe à la demande de François Cormier-Bouligeon : rétablirons-nous l'ICHN là où elle a été injustement supprimée il y a plusieurs années ?
M. François Cormier-Bouligeon . C'est vrai !
M. Nicolas Forissier . Madame la ministre déléguée, je vous l'ai dit, la situation de la trésorerie des exploitations est très mauvaise. Une grande inquiétude et même le désespoir étreignent de nombreux agriculteurs, plus que jamais. Il est donc nécessaire d'adopter rapidement des mesures puissantes et concrètes, en allant au-delà des mesures habituelles.
M. François Cormier-Bouligeon . Très bien !
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap . Je vous répondrai au nom de Mme la ministre de l'agriculture, qui vous prie de l'excuser de son absence.
M. Nicolas Forissier . Non !
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée . Elle est auprès des agriculteurs et m'a chargée de vous transmettre les éléments de réponse suivants. L'indemnité compensatoire de handicaps naturels permet d'apporter un soutien à l'agriculture dans les zones où les conditions d'exploitation sont structurellement difficiles. Cependant, les conditions d'octroi de cette aide sont encadrées par la réglementation européenne. Or les difficultés économiques conjoncturelles que connaissent plusieurs filières agricoles ne peuvent constituer en elles-mêmes un handicap au sens de la réglementation européenne, qui permettrait de justifier l'octroi d'un soutien au titre de l'ICHN.
Afin de répondre aux défis de l'agriculture en zone intermédiaire, la déclinaison française de la politique agricole commune, la PAC, prévoit deux mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) spécifiquement adaptées à ces zones. Les montants d'aide prévus sont de 92 euros par hectare pour les grandes cultures et de 57 euros par hectare pour la polyculture-élevage.
S'agissant de l'indemnisation des conséquences des aléas climatiques, nous avons mobilisé la solidarité nationale pour aider les agriculteurs à faire face aux pertes de récoltes qu'ils ont subies cette année. L'ouverture du dispositif a été validée dans une trentaine de départements et les agriculteurs peuvent déjà transmettre leurs demandes d'indemnisation.
Enfin, pour les agriculteurs qui ont besoin d'un soutien en matière de trésorerie, le gouvernement vient d'annoncer deux types d'aide, sous forme de prêts de court ou moyen terme. Les premiers prêts seront délivrés par les banques d'ici à la fin de l'année 2024. Afin de mesurer le bon déploiement des deux dispositifs, le comité des financeurs publics, sous l'égide du préfet, assurera un suivi régulier en lien avec les établissements bancaires.
Vous le constatez, le gouvernement est pleinement mobilisé pour apporter des réponses concrètes, précises et opérationnelles aux difficultés que rencontrent les exploitations agricoles, notamment les exploitations des zones intermédiaires, dont vous avez exposé les difficultés.
Mme la présidente . La parole est à M. Nicolas Forissier.
M. Nicolas Forissier . Je m'attendais à cette réponse ; c'est la raison pour laquelle j'ai appelé le gouvernement à dépasser les mesures ordinaires et à prendre des mesures audacieuses.
L'ICHN est lié à des zones et non à des filières. Elle est destinée aux territoires dans lesquels les agriculteurs rencontrent des difficultés particulières et serait donc bien adaptée aux zones intermédiaires. Quand on veut, on peut, y compris à l'égard de l'Union européenne. Il eût fallu déployer de telles mesures, ne serait-ce qu'à titre exceptionnel.
Je vous prie de transmettre ce message à Mme Genevard, dont j'aurais aimé qu'elle fût présente aujourd'hui, car il s'agit d'un sujet majeur. Il y a urgence : il faut aller bien plus loin et agir bien plus fort que ce qui est actuellement prévu.
Auteur : M. Nicolas Forissier
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 novembre 2024