Question de : M. Paul-André Colombani
Corse-du-Sud (2e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

M. Paul-André Colombani alerte Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les récentes décisions concernant la carte de formation des lycées agricoles de Corse, qui suscitent une vive inquiétude au sein des communautés éducatives, des élèves et de leurs familles. En effet, l'ensemble des syndicats de l'enseignement agricole en Corse dénonce la décision du ministère de supprimer l'option « transformation alimentaire » du bac sciences et technologies de l'agriculture et du vivant (STAV) à Borgo, de regrouper plusieurs options de bac en une seule classe à Borgo et Sartène et de ne pas allouer les heures nécessaires à la poursuite du bac pro agroéquipement à Sartène. Ces mesures, motivées par des considérations budgétaires, risquent pourtant de fragiliser l'enseignement agricole en Corse en réduisant son attractivité et en compromettant l'adaptation des formations aux besoins des filières locales. Or l'enseignement agricole constitue un enjeu stratégique pour l'avenir de la Corse. Il est essentiel de former la jeunesse aux métiers de l'agriculture et de l'accompagner dans son installation afin de garantir la pérennité et le développement des filières agricoles insulaires. Affaiblir ces formations revient à fragiliser tout un secteur économique essentiel au développement de la région et à décourager les vocations dans un contexte où le renouvellement des générations agricoles est déjà un défi majeur. Ces décisions sont d'autant moins bien accueillies qu'elles semblent entrer en contradiction avec les engagements du Premier ministre, M. François Bayrou, qui avait assuré que le projet de loi de finances 2025 ne poursuivrait pas les suppressions de postes initiées par le précédent gouvernement. Elles vont également à l'encontre des recommandations pédagogiques édictées par l'inspection de la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER), qui préconise un enseignement adapté aux spécificités professionnelles des élèves. Dans ce contexte, il lui demande de répondre aux attentes légitimes des communautés éducatives en garantissant les moyens nécessaires au maintien d'un enseignement agricole de qualité en Corse, en préservant l'intégrité de la carte de formation votée par l'Assemblée de Corse et en assurant une dotation horaire globale suffisante pour le bon fonctionnement de ces établissements.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Les deux établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles de Corse, comme l'ensemble des établissements d'enseignement agricole, constituent un appareil de formation et d'éducation remarquable, dont l'efficacité en termes notamment de réussite et d'insertion professionnelle des jeunes, est reconnue. Ils contribuent à répondre aux enjeux de développement de la production agricole en Corse, de souveraineté alimentaire et de renouvellement des générations en agriculture. L'engagement très fort de la collectivité de Corse en faveur de l'enseignement agricole, en particulier les investissements financés dans les deux établissements, est d'ailleurs à saluer. L'État a toujours été particulièrement engagé dans ce domaine. Il apporte chaque année le financement des personnels d'enseignement, de direction et de support administratif et technique. Cela représente près de 73 équivalents temps plein (ETP), soit plus de 4,1 millions d'euros (M€). Cela se traduit notamment par l'attribution d'un certain nombre d'heures d'enseignement pour assurer les formations. L'État apporte également chaque année 0,5 M€ pour financer différentes mesures, dont l'attribution de bourses aux élèves, le financement des assistants d'éducation ou des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) recrutés par l'établissement, ou encore l'organisation des examens. Les établissements d'enseignement agricole de Corse bénéficient d'un traitement différencié, qui se justifie par l'enjeu de disposer de leur présence dans des territoires spécifiques et d'y assurer les formations utiles, notamment pour les filières agricoles et agroalimentaires, même si le nombre d'élèves est réduit dans certaines classes. Il est à ce titre intéressant d'observer l'indicateur objectif que constitue le nombre d'heures d'enseignants financés rapporté au nombre d'élèves. Pour les élèves inscrits en formation initiale scolaire au sein des établissements de Sartène et de Borgo, ce taux d'encadrement est très nettement supérieur à la moyenne nationale : la dotation en heures par élève en Corse correspond à 170 % de celle du niveau national. Ainsi, à la rentrée 2024, la moyenne d'heures d'enseignants par élève en Corse était de 134 heures, alors qu'elle est de 78 heures au niveau national. On peut également relever que les régions comparables à la Corse en termes d'effectifs et de structures, affichent une moyenne de 103 heures par élève. Dans le contexte budgétaire actuel, comme dans l'ensemble de l'enseignement agricole, une diminution de la dotation globale horaire (DGH) pour la Corse a été appliquée : elle passe de 31 810 heures pour l'année scolaire 2024-2025 à 31 700 heures pour l'année scolaire 2025-2026, soit une diminution effective de 110 heures. Cette réduction a été déterminée au regard d'une part, du taux d'encadrement et d'autre part, de l'évolution des effectifs élèves, qui ont diminué de 13 % entre 2018 et 2024, et ce malgré tous les efforts d'attractivité déployés par les établissements et qui méritent à nouveau d'être salués. Elle demeure donc limitée au regard des indicateurs mentionnés précédemment. L'évolution de la DGH financée par l'État sur les 5 dernières années est en hausse de près de 15 % avec une augmentation d'un peu plus de 4 000 heures. Cette évolution s'est accompagnée d'ouvertures nettes de classe ou de sections. Aucune option et aucune classe, et ce dans les deux établissements, ne sont proposées à la fermeture à la rentrée 2025. L'option transformation du baccalauréat technologique de Borgo est, par exemple, maintenue malgré la présence de seulement trois élèves. La DGH de la Corse à hauteur de 31 700 heures pour 2025-2026, comprend par ailleurs 770 heures au titre de l'ouverture de la deuxième année du brevet de technicien supérieur agricole (BTSA) métiers du végétal au lycée de Borgo. Le scénario de regroupement des classes est proposé pour maintenir un recrutement possible dans toutes les sections même celles à très faibles effectifs. Les regroupements, quand ils seront à opérer, ne portent que sur les matières générales. La direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) et les directions des deux lycées recherchent avec les équipes pédagogiques les meilleures solutions pour dédoubler les matières générales les plus sensibles. L'exercice est en cours et des améliorations sont encore recherchées. Les référentiels pédagogiques seront respectés : chaque élève recevra le nombre d'heures de formation qui lui est dû. Les directeurs des lycées, afin de maintenir la qualité d'encadrement pour l'accueil des élèves en difficulté ou en situation de handicap, auront aussi la possibilité de mobiliser d'autres dispositifs que la DGH avec notamment la mobilisation du « Pacte enseignants ». Concernant l'inclusion, rappelons aussi notamment le recrutement depuis 2024 de 1,5 ETP d'AESH à Borgo et le maintien de 3 AESH à Sartène. Pour toutes ces raisons, il apparaît que les établissements d'enseignement agricole corses disposent de moyens adaptés. L'État soutient la volonté d'un enseignement agricole dynamique et attractif en Corse, alors que les effectifs ont diminué au cours de ces dernières années. Cette volonté sera confortée par les dispositions de la loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture du 24 mars 2025. L'analyse des besoins en formation agricole désormais inscrite au code de l'éducation et au code rural et de la pêche maritime, ainsi que le contrat territorial de consolidation ou de création de formations qui en découle constitueront des atouts majeurs.

Données clés

Auteur : M. Paul-André Colombani

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement agricole

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 18 mars 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025

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