Question écrite n° 5192 :
Impact de la réforme fiscale sur les sociétés d'avocats

17e Législature

Question de : Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho
Essonne (2e circonscription) - Rassemblement National

Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 relative à l'exercice en société des professions libérales réglementées et son décret d'application n° 2024-872 du 14 août 2024 à la profession d'avocat. En effet, si ces textes sont entrés en vigueur le 1er septembre 2024 avec un délai de mise en conformité d'un an, il apparaît non seulement qu'ils concernent les sociétés d'avocats d'exercice libérale (SELARL, SELAS, SPFPL), mais aussi les sociétés commerciales de droit commun d'avocat (SARL, SAS, SA) en les soumettant de facto au régime des SEL. D'ailleurs, l'administration fiscale a publié trois BOFIP (RSA-GER ; BNC-DECLA) les 15 décembre 2022, 5 janvier 2023 et 24 avril 2024, transposant dans sa doctrine les décisions du Conseil d'État (16 octobre 2013 n° 339822 et 8 décembre 2017 n° 409429) estimant que la rémunération technique des associés de SEL par action relevait obligatoirement du régime des BNC, bien que la réponse ministérielle dite « Cousin » du 16 septembre 1996 et reprise au BOFIP énonçât que les rémunérations techniques des associés étaient imposées dans la catégorie des traitements et salaires en cohérence avec le sort des associés de SELARL. Dès lors, le nouveau statut fiscal et social des associés de sociétés d'exercice libéral (SEL) conduit à ce que les rémunérations perçues, au titre de leur activité libérale, doivent être imposées à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au lieu des traitements et salaires et que seulement 5 % de la rémunération d'ensemble reste soumis à la catégorie des traitements et salaires. Toutefois, le Conseil national des barreaux français conteste l'application du régime BNC aux rémunérations techniques des associés de SEL et la limite des 5 % en raison : des lourdeurs administratives que la mise en œuvre d'un tel régime fiscal introduit ; de la mise en place d'un régime BNC « à la carte » largement imprévisible et peu sécurisé ; de l'inadaptation de ce régime fiscal aux associés de SEL (alors même qu'ils ne perçoivent ni recettes - les prestations sont facturées par la SEL à ses clients - ni n'engagent de dépenses professionnelles, contrairement à l'esprit et à la lettre de l'article 92 du CGI) ; du régime applicable aux SELARL avec collège de gérance qui oblige à prouver la dissociation des rémunérations techniques et des rémunérations de gérance sous peine de l'application d'un taux fixe de 5 % (au lieu de 20 % plus raisonnable) tout en mettant en œuvre des critères de dissociabilité irréalistes ; des critères de mise en œuvre du régime BNC ne faisant référence qu'aux recettes des années précédentes ; de la discrimination introduite entre les associés de SEL et les autres associés de société d'exercice de droit commun. Ainsi, à titre d'exemple, pour une même rémunération 100 000 euros, l'assiette taxable à l'impôt sur le revenu passera de 90 000 euros en 2023, à 99 500 euros en 2024. Dès lors, à partir d'un taux d'imposition de 30 %, l'impact pour l'associé gérant majoritaire sera de 2 850 euros d'impôt supplémentaire. Sans parler de la problématique relative à l'affectation des charges/dépenses entre la SEL et la rémunération de l'associé et sans compter la nécessité de disposer d'un numéro de SIREN propre en qualité de contribuable BNC ou que l'associé devient redevable de la CFE au titre de son activité en plus de la CFE déjà payée par la SEL. Enfin, s'agissant des sociétés commerciales de droit commun d'avocat (SARL, SAS, SA), bien que leur exercice normal s'étale en principe sur l'année civile du 1er janvier au 31 décembre, en l'état, il semble qu'elles seront dans l'obligation comptable de scinder en deux leur exercice et leur déclaration de résultat au 1er septembre 2025. Aussi, au regard de cette véritable usine à gaz visant uniquement à percevoir davantage d'argent sur les professions libérales exerçant leur activité sous forme de société tout en compliquant leurs obligations comptables, fiscales et sociales, elle lui demande si le Gouvernement entend intervenir afin de simplifier leur régime en respectant leur forme juridique de société et revenir à la situation antérieure ou au moins proroger jusqu'au 31 décembre 2025 le régime antérieur applicable aux sociétés commerciales de droit commun d'avocat (SARL, SAS, SA).

Données clés

Auteur : Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions judiciaires et juridiques

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Date :
Question publiée le 18 mars 2025

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