Méthodologie de calcul du prix des carburants à la pompe en France
Question de :
Mme Géraldine Grangier
Doubs (4e circonscription) - Rassemblement National
Mme Géraldine Grangier interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la composition et la méthodologie de calcul du prix des carburants à la pompe en France, en comparaison avec d'autres pays européens qui, comme la France, dépendent largement des importations de carburant. Dans un contexte d'inflation persistante et de tensions sur le pouvoir d'achat, la hausse récurrente des prix à la pompe pèse lourdement sur les ménages français et les entreprises, en particulier dans les secteurs dépendants du transport routier. Pourtant, les critères exacts qui président à la fixation du prix final des carburants demeurent flous pour bon nombre de citoyens. La détermination du prix des carburants en France repose sur plusieurs composantes : le coût du brut, le raffinage, le transport, la distribution et la fiscalité. Chacune de ces étapes intègre différentes variables, dont les variations influencent directement le prix affiché à la pompe. Il convient notamment de rappeler que la fiscalité représente une part prépondérante du prix des carburants en France. En effet, les taxes appliquées aux carburants sont multiples : la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), qui constitue une taxe fixe par litre, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), appliquée à la fois sur le prix hors taxe et sur la TICPE, ainsi que la contribution climat-énergie (communément appelée « taxe carbone »), qui vise à répercuter le coût environnemental des émissions de CO2. S'agissant plus particulièrement de la taxe carbone, celle-ci a été instaurée dans le cadre de la loi de finances 2014 et intégrée à la TICPE sous forme d'une composante spécifique. Son montant est censé évoluer progressivement afin d'inciter à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Or, alors que cette taxe impacte directement le prix final du carburant, son montant exact et son mode de calcul sont rarement explicités aux consommateurs. Selon les dernières données disponibles, la taxe carbone était fixée à 44,60 euros par tonne de CO2 en 2024, contre 7 euros à son introduction en 2014. Sa trajectoire était initialement prévue pour atteindre 100 euros par tonne en 2030, avant d'être gelée en raison de la crise des gilets jaunes en 2018. Cependant, une comparaison avec d'autres pays européens dépendants des importations de carburant révèle des différences significatives dans la formation des prix à la pompe. En Allemagne, par exemple, la taxe sur les carburants est moins élevée que celle appliquée en France, ce qui permet aux consommateurs allemands de bénéficier de prix plus compétitifs. En Espagne et en Italie, des mesures temporaires de réduction fiscale ont été mises en place ces dernières années afin d'atténuer l'impact des hausses de prix sur les usagers. Par ailleurs, dans certains pays comme le Luxembourg, le modèle de taxation et de marges commerciales appliqué permet de maintenir des prix plus bas, ce qui incite de nombreux frontaliers français à s'y approvisionner. Cette situation soulève la question de la compétitivité fiscale française en matière de carburants et de son impact sur les dépenses des ménages et des entreprises françaises. Dès lors, Mme la députée souhaite obtenir une explication précise et transparente sur la méthodologie de calcul du prix des carburants. Quelle est la formule exacte permettant de déterminer le prix final à la pompe en fonction des différentes composantes (évolution du prix du baril, coûts logistiques, marges des distributeurs, taxes appliquées) ? Quelle est la part respective de chacune de ces composantes dans le prix du litre d'essence et de gazole et comment ont-elles évolué ces dernières années ? En ce qui concerne la taxe carbone, quel est son mode de calcul exact, sa répartition et son impact précis sur les prix des carburants ? Le Gouvernement prévoit-il une évolution de cette taxe dans les prochaines années et si oui, selon quelles modalités ? Enfin, alors que plusieurs pays européens ont mis en place des dispositifs de réduction temporaire de la fiscalité sur les carburants pour atténuer l'impact des hausses de prix, la France envisage-t-elle une mesure similaire afin de soutenir le pouvoir d'achat des Français ? Plus largement, elle lui demande pourquoi des pays aux caractéristiques économiques et énergétiques comparables parviennent à proposer des prix plus abordables alors que la France demeure parmi les nations où le coût du carburant est le plus élevé.
Réponse publiée le 20 mai 2025
Depuis 1985, le prix des produits pétroliers est librement fixé dans l'hexagone et ses variations procèdent d'évolutions du marché. Ils suivent l'évolution des cours du pétrole brut et des produits raffinés sur le marché international, en cohérence avec l'évolution de l'offre et de la demande de pétrole brut. À titre d'exemple, depuis le début de l'année 2025, les prix toutes taxes comprises (TTC) de vente des carburants en France sont en forte baisse. En moyenne, le prix du gazole au 4 avril dernier a ainsi diminué de 6,5 c€/l par rapport à sa moyenne de l'année 2024, s'élevant à 1,63 €/l. Le prix du sans plomb 95 avec jusqu'à 10 % d'éthanol en volume (sp95-e10), essence la plus vendue en France, suit également cette tendance baissière, diminuant de 5,4 c€/l sur la même période. Le cours du pétrole Brent, référence internationale, a enregistré une forte baisse depuis le début du mois d'avril, atteignant 60 $/baril le 5 mai, soit son niveau le plus bas depuis avril 2021. D'autres facteurs contribuent également à la variation des prix des carburants vendus en France. La part du prix liée au raffinage, qui représente la différence entre les cotations de produits raffinés vendus sur le marché européen et la cotation de pétrole brut, a représenté environ 7 % du prix TTC du gazole et du sp95-e10 au titre de l'année 2024. La part liée au transport et à la distribution s'est élevée à 14 % en moyenne du prix TTC de ces deux carburants routiers au titre de l'année précédente. Cette composante reflète les coûts de logistique et de distribution à partir du point de mise à disposition du produit jusqu'à la station-service. Par ailleurs, elle couvre le coût des obligations réglementaires supportées par les carburants au titre de l'efficacité énergétique (certificats d'économie d'énergie), de l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports (taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans le transport), du recours au pavillon français ou encore de la gestion de stocks stratégiques. Les marges de raffinage et de transport-distribution font l'objet d'un suivi régulier par le Gouvernement qui publie leur évolution toutes les semaines. La fiscalité applicable aux produits pétroliers repose, d'une part, sur une accise (ex-TICPE) et, d'autre part, sur la TVA. L'accise est gelée depuis le 1er janvier 2019 y compris sa « composante carbone » informelle. Les produits pétroliers sont soumis au taux normal de TVA de 20 %, hors Corse qui bénéficie d'un taux réduit de 13 %. Ces deux taxes ont représenté en moyenne 54 % du prix TTC du gazole et du sp95-e10 en France en 2024. La comparaison des coûts des carburants avec d'autres pays européens appelle à une vigilance particulière au regard des spécificités réglementaires et de marché. De plus, le niveau de fiscalité applicable aux carburants routiers en France est plus élevé que dans d'autres pays européens, reflétant le choix du Gouvernement de s'appuyer sur la fiscalité pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles importées et pour répondre aux enjeux de décarbonation des transports. La comparaison des coûts disponible sur le site de la Commission européenne (https://energy.ec.europa.eu/data-and-analysis/weekly-oil-bulletin_en) permet de comparer l'évolution des prix du gazole et du sp95-e5 au sein de l'Union européenne. A titre d'exemple, au 5 mai 2025, le prix du gazole en France est moins cher que celui vendu en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas ou en Italie. Le prix du sp95-e5 est plus élevé en France que dans d'autres pays européens mais ce chiffre n'est pas représentatif. En effet, en 2024, elle ne représente que 14 % des ventes totales d'essence, reflétant l'étroitesse du marché en France, contrairement au sp95-e10, qui représente 60 % des ventes totales d'essence et dont le prix ne figure pas dans la comparaison présentée sur le site de la Commission européenne. Le Gouvernement est attentif à l'évolution des prix des produits pétroliers et à leur impact sur le budget des ménages. Lors d'épisodes de hausse des prix, le Gouvernement privilégie la mise en œuvre de mesures transitoires et ciblées afin de préserver le pouvoir d'achat des Français, comme cela a été fait fin 2021 avec le déploiement d'une indemnité inflation de 100 euros, puis en 2022 avec l'aide exceptionnelle à l'acquisition de carburants, et en 2023 avec la mise en place d'une indemnité carburant. Le barème kilométrique a également été revu à la hausse. Étant donné le niveau actuel des prix des carburants, la mise en place de nouvelles mesures d'accompagnement des ménages n'apparaît pas justifiée.
Auteur : Mme Géraldine Grangier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Industrie et énergie
Dates :
Question publiée le 25 mars 2025
Réponse publiée le 20 mai 2025