L'État ne peut se soustraire à ses obligations envers les mineurs
Question de :
M. Raphaël Arnault
Vaucluse (1re circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Raphaël Arnault appelle l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur le fait que l'État doit prendre en charge les mineurs non accompagnés. Des jeunes mineurs arrivent en France, souvent après avoir quitté leur pays pour fuir des persécutions, en quête de protection et d'un avenir plus sûr. Ils se rendent auprès des services du département, qui ont la responsabilité de les prendre en charge. Pourtant, au lieu de les accueillir comme la loi l'exige, ces derniers les rejettent. Face à ce refus, dans le département où M. le député est élu, ils trouvent refuge auprès de l'association ROSMERTA, qui, avec d'autres acteurs solidaires, les aide à faire reconnaître leur minorité devant la justice de la République. C'est précisément ce qui s'est produit pour Aboubacar, Mohamed et Makoto. Les juges des enfants ont tranché : ces jeunes sont mineurs, isolés et en danger. Leur prise en charge par l'aide sociale à l'enfance (ASE) du Vaucluse est une obligation légale. Or malgré ces décisions de justice, l'ASE refuse de les accueillir, bafouant ouvertement l'État de droit. Comment l'État peut-il tolérer qu'une institution censée protéger les plus vulnérables se soustraie ainsi à ses obligations ? Comment justifier qu'un organe public viole délibérément les lois qu'il est censé appliquer ? Dans un contexte où la défiance envers les institutions ne cesse de croître, cette inertie est un signal extrêmement inquiétant. Si le département du Vaucluse souhaite contester une décision de justice, il en a le droit. La loi prévoit des voies de recours. Mais en attendant, il est tenu d'appliquer les jugements rendus. Ne pas le faire, c'est créer un précédent intolérable qui affaiblit encore davantage la confiance des citoyens dans les institutions. Est-il possible que le Gouvernement accepte de laisser cette situation de défiance contre nos institutions juridiques perdurer ? Le ministre de la justice affirmait récemment : « Je serai celui qui réconciliera la justice et nos citoyens ». Il serait temps qu'il fasse appliquer les décisions qui sont prises, car cette inertie est contraire à l'esprit de réconciliation qu'il évoque. M. le député exige une réponse ferme et immédiate. Les institutions étatiques (Gouvernement, régions, départements) ne peuvent pas se permettre d'être faibles sur des questions aussi essentielles. S'ils ne respectent pas leurs propres lois, comment peuvent-ils attendre des citoyens qu'ils respectent les leurs ? Au regard de ces différents éléments, il lui demande quelles mesures elle compte mettre en œuvre pour que les départements respectent les prérogatives qui sont les leurs en matière d'aide sociale à l'enfance.
Réponse publiée le 24 juin 2025
La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant, renforcée par les dispositions de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, consacre une protection spécifique permettant à toute personne se déclarant Mineur non accompagné (MNA) d'être mise à l'abri dans le cadre d'un accueil provisoire d'urgence jusqu'à ce que sa situation soit évaluée. En application de l'article L. 221-2-4 du code de l'action sociale et des familles, issu de la loi du 7 février 2022 précitée, l'évaluation de la minorité et de l'isolement ainsi que la mise à l'abri relèvent de la responsabilité du conseil départemental au regard de ses compétences en matière de protection de l'enfance. Afin d'identifier les personnes se disant MNA, et sous la responsabilité du conseil départemental, une évaluation pluridisciplinaire est menée par des professionnels formés à l'évaluation sociale et ayant une expérience ou une qualification dans les métiers de la protection de l'enfance, du droit, de la psychologie, de la santé ou de l'éducation. Celle-ci inclut les éléments éventuellement transmis par la préfecture. La personne se déclarant MNA peut, à tout moment, saisir le juge des enfants en application de l‘article 375 du code civil afin que sa minorité et son isolement soient reconnus. Toutefois, la saisine du juge des enfants à la suite d'une décision de refus d'admission à l'aide sociale à l'enfance du président du conseil départemental n'est pas suspensive de la décision mettant fin immédiatement à sa prise en charge. La possibilité pour le juge des enfants d'ordonner des mesures provisoires dans l'attente de sa décision en matière d'assistance éducative, sur le fondement de l'article 375-5 du code civil, reste à sa libre appréciation. Il est également à noter que le Conseil d'Etat dans la décision n° 471867 du 14 mars 2023 estime qu'il est également possible pour la personne de saisir le juge du référé liberté sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. A ce titre, le juge des référés peut enjoindre la poursuite de l'accueil provisoire s'il estime que l'appréciation du président du conseil départemental est manifestement erronée et qu'il existe un risque immédiat de mise en danger de la santé ou de la sécurité de la personne concernée. Dès lors, les personnes se déclarant MNA disposent de plusieurs garanties procédurales leur permettant de faire valoir leur droit si leur minorité est confirmée par les services spécialisés.
Auteur : M. Raphaël Arnault
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enfants
Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles
Ministère répondant : Travail, santé, solidarités et familles
Dates :
Question publiée le 25 mars 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025