Procès-verbal caché de l'attaque de Crépol
Question de :
M. Alexandre Sabatou
Oise (3e circonscription) - Rassemblement National
M. Alexandre Sabatou interroge M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le procès-verbal caché de l'attaque de Crépol. Le 19 novembre 2023, la commune de Crépol voit son bal d'hiver se transformer en bain de sang. Au cours de cette attaque violente, Thomas Perotto, âgé de 16 ans, est tué de plusieurs coups de couteau au cœur et à la gorge. Seize autres jeunes sont blessés, plus ou moins gravement et des vigiles ont perdu des doigts en tentant de s'interposer. Pourtant, on apprend ce 14 mars 2025, grâce aux auteurs de l'ouvrage Une nuit en France, qu'un procès-verbal, rédigé cinq jours après le drame, contient des témoignages affirmant clairement que les agresseurs ont proféré des insultes racistes à l'encontre de leurs victimes. Dans ce PV, une dizaine d'auditions rapportent des propos racistes tenus au cours de l'attaque, visant spécifiquement la couleur de peau et l'appartenance ethnique, réelle ou supposée, des jeunes de Crépol. À ces éléments s'ajoutent les premières déclarations de témoins relatant la volonté des agresseurs de « planter des Blancs », ainsi que l'usage de l'insulte raciale anti-blanche « Gwer », entendue distinctement dans une vidéo relatant les évènements de cette nuit tragique. Que ce document, attestant du caractère raciste anti-blanc et anti-français de cette attaque organisée, ait été mal classé par erreur ou volontairement caché demeure une question cruciale, soulevée légitimement par bon nombre des compatriotes. Pourtant, à ce jour, le parquet refuse toujours de retenir les circonstances aggravantes liées à « la race, l'ethnie, la nation ou la religion ». Ainsi, il l'interroge sur les raisons ayant conduit à cette « polémique du procès-verbal », élément clé d'une affaire qui a ému toute l'opinion publique.
Réponse publiée le 19 août 2025
A titre liminaire, il convient de rappeler qu'en application de l'article 1er de la loi du 25 juillet 2013, il n'appartient pas au ministre de la Justice, de donner quelque instruction que ce soit dans le cadre de dossiers individuels, ni d'interférer dans les procédures judiciaires en raison des principes constitutionnels de séparation des pouvoirs et d'indépendance de l'autorité judiciaire. En outre, la communication sur des affaires judiciaires en cours, quelle que soit les qualifications retenues et la sensibilité des faits, ne peut se faire que dans le cadre de l'article 11 du code de procédure pénale, lequel définit tant l'autorité autorisée à communiquer que les motifs justifiant une telle communication. En application des dispositions de cet article, le procureur de la République est seul à même d'apprécier le caractère opportun d'une telle communication. Toutefois, la place des procès-verbaux au sein d'une procédure pénale n'emporte aucune conséquence quant à leur prise en compte par les magistrats du parquet ou les magistrats instructeurs, dans la mesure où aucune règle juridique ne détermine l'ordre dans lequel ces procès-verbaux doivent être insérés au sein du dossier. L'ensemble de la procédure est porté à la connaissance de l'autorité judiciaire et les magistrats prennent leur décision au regard de l'intégralité des éléments qui leur sont soumis, l'endroit où sont positionnés les procès-verbaux étant peu important. Par ailleurs, la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations constitue un enjeu prioritaire de politique pénale depuis plusieurs années. En effet, l'attention des procureurs généraux et des procureurs de la République est régulièrement appelée, par le biais de dépêches et de circulaires, sur la nécessité d'apporter à ces actes une réponse pénale ferme et systématique, adaptée au contexte de leur commission et à la personnalité de l'auteur. Ainsi, la circulaire du 29 avril 2024 relative au traitement judiciaire des infractions commises à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance à une religion dans un contexte séparatiste invite les parquets à mobiliser les qualifications pénales réprimant les infractions commises à raison de l'appartenance ou non-appartenance à une religion et la circonstance aggravante générale prévue par l'article 132-76 du CP à chaque fois que cela est possible. Les procureurs de la République sont par ailleurs invités, sous le contrôle des procureurs généraux, à poursuivre leur pleine implication au sein des comités opérationnels de lutte contre le racisme et l'antisémitisme et la haine anti-LGBT et à s'investir dans les instances partenariales adossées aux conseils départementaux de prévention de la délinquance, chargées de mettre en œuvre la politique locale de prévention en matière de racisme. Ainsi, le ministère de la Justice est pleinement engagé dans la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations, comme en témoigne la circulaire de politique pénale générale diffusée le 27 janvier 2025 par laquelle le garde des Sceaux invite les procureurs généraux et procureurs de la République à poursuivre leur mobilisation contre ces agissements qui heurtent la cohésion de notre société.
Auteur : M. Alexandre Sabatou
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 25 mars 2025
Réponse publiée le 19 août 2025