Question au Gouvernement n° 554 :
Condamnation de Mme Marine Le Pen

17e Législature

Question de : Mme Sandrine Runel
Rhône (4e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 2 avril 2025


CONDAMNATION DE MME MARINE LE PEN

Mme la présidente . La parole est à Mme Sandrine Runel.

Mme Sandrine Runel . « Le fait de chercher à jeter le discrédit, publiquement par actes, paroles, écrits ou images de toute nature, sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende » (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe EcoS. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

Mme Marine Le Pen . N'en jetez plus !

M. Pierrick Courbon . C'est la loi !

Mme Sandrine Runel . Cet article du code pénal semble avoir échappé à certains – mais après tout, ils ne sont plus à ça près. Car, depuis hier, nombre de réactions se sont fait entendre, en premier lieu celles de l'extrême droite mondiale qui dénonce une décision de justice qualifiée de politique. MM. Poutine, Musk et Orban sont d'ailleurs les premiers à crier au scandale démocratique. S'en est suivi un déferlement de réactions dangereuses et populistes de la part de tout l'état-major du Rassemblement national. (« Oh ! » sur les bancs du groupe RN.)

Au milieu du bruit et de la fureur, le gouvernement est resté bien silencieux, pire : « troublé ». Monsieur le garde des sceaux, alors que le pouvoir judiciaire n'aura jamais été autant attaqué, il est inquiétant de ne pas vous entendre le défendre.

M. Kévin Pfeffer . Marchande de sommeil, c'est un métier ?

Mme Sandrine Runel . Alors redisons-le avec force : en France, il n'y a pas de dictature judiciaire. Il n'y a pas de justice politique ni de tyrannie des juges. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

M. Emeric Salmon . Ils dorment bien, tes locataires ?

Mme Sandrine Runel . Car dans un État de droit, la loi s'applique sans privilège. Aucun sondage, aucune intention ne saurait vous donner un totem d'impunité. (Mêmes mouvements. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

M. Laurent Jacobelli . Rendez les APL !

Mme Sandrine Runel . Allez-vous prendre la mesure de la rupture qui s'opère dans notre pays, la même qui, outre-Atlantique, a conduit à l'assaut du Capitole ? (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe RN.) Entendez-vous protéger les magistrats des attaques incessantes de l'extrême droite (Exclamations sur les bancs du groupe RN), protéger nos institutions et finalement les fondements de notre République, protéger les juges, qualifiés de mollahs du droit, qui incarnent l'indépendance de la justice ?

Vous avez annoncé des « délais raisonnables ». S'agirait-il d'une justice d'exception ?

M. Kévin Pfeffer . C'est bon, ça suffit !

Mme Sandrine Runel . Levez les troubles sur la position du gouvernement – un seul tweet ne suffira pas. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice. – Les députés du groupe SOC se lèvent et applaudissent cette dernière. – Les députés du groupe EcoS et plusieurs députés du groupe LFI-NFP applaudissent également. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

M. Alexandre Dufosset . Allez faire vos travaux !

Mme la présidente . Un peu de silence, s'il vous plaît !

La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice. (Des députés des groupes SOC et RN s'interpellent de banc à banc.)

Un député du groupe RN . Je t'emmerde ! (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

Mme Sandrine Rousseau . Pardon ?

M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice . Je souhaitais rappeler ce que j'ai dit tout à l'heure au groupe Rassemblement national : les décisions de justice doivent être rendues dans un climat apaisé.

Sachez que, dès hier, en fin de journée, j'ai défendu l'autorité judiciaire. Cela vous a peut-être échappé mais j'ai apporté publiquement, sur tous les réseaux sociaux, mon soutien à tous les magistrats, singulièrement à la présidente du tribunal (M. Philippe Vigier applaudit), laquelle a été contactée ce matin par la direction des services judiciaires de mon ministère pour se voir proposer non seulement la protection fonctionnelle mais aussi, si elle le souhaite, et en lien avec le ministère de l'intérieur, une protection policière.

M. Jérôme Guedj . Quelle tristesse !

M. Gérald Darmanin, ministre d'État . La protection des magistrats est bien sûr consubstantielle au travail que doit mener le garde des sceaux avec l'ensemble de ses services. J'ai en effet parlé de « délais raisonnables » – ce qui me semble du bon français – pour expliquer que les personnes devaient attendre raisonnablement avant d'être jugées, en appel comme en première instance, dans notre pays.

Mme Ayda Hadizadeh . Tous les Français !

M. Gérald Darmanin, ministre d'État . C'est le cas de tous les Français. Par ailleurs, en raison du brouhaha qui a entouré ma réponse, vous ne m'avez peut-être pas entendu expliquer qu'il appartenait souverainement à la cour d'appel de Paris de fixer la date car elle détermine ses audiences de façon parfaitement indépendante.

Je me permets d'ajouter que, si l'on veut que la justice soit respectée, que les magistrats ne soient pas attaqués et que la justice ne soit pas politisée par un bord ou par un autre, il serait bon d'éviter les questions polémiques dans lesquelles on mélange à peu près tout. Les Français qui nous écoutent ne comprennent à peu près rien à des échanges de ce type. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

Données clés

Auteur : Mme Sandrine Runel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 avril 2025

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