Question au Gouvernement n° 556 :
Criminalité en Corse

17e Législature

Question de : M. Xavier Lacombe
Corse-du-Sud (1re circonscription) - Horizons & Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 2 avril 2025


CRIMINALITÉ EN CORSE

Mme la présidente . La parole est à M. Xavier Lacombe.

M. Xavier Lacombe . Il y a quelques semaines seulement, à la suite d'un terrible assassinat en Corse, mon collègue Michel Castellani nous alertait ici même sur l’emprise de réseaux criminels sur l’île, dont les méthodes finissent inéluctablement par semer la mort.

Depuis, deux nouveaux assassinats y ont été commis. Je voudrais évoquer celui de Pierre Alessandri, agriculteur et syndicaliste agricole, il y a quinze jours. (Mme Dominique Voynet applaudit.) Un crime de trop sur notre île. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR, LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR. – M. Marc Fesneau applaudit également.)

Pendant plusieurs jours, l’émotion a dominé mais l’heure est venue d’agir. Car, sans préjuger des suites de l’enquête, disons-le : cet assassinat est très lourd de sens.

Pierre Alessandri dénonçait depuis longtemps des dérives, comme le déclassement de terres agricoles au profit de projets immobiliers. Son exploitation avait été incendiée en 2019 et il se savait encore menacé. Ce nouveau drame, précédé de pressions, illustre parfaitement les méthodes du crime organisé : des intimidations, des menaces puis l’irréparable.

Je tiens à saluer, monsieur le ministre de la justice, votre engagement et celui du gouvernement dans la lutte contre le crime organisé. La loi sur le narcotrafic que nous nous apprêtons à voter, ainsi que les dispositions spécifiques à la Corse que vous avez annoncées en février dernier, constituent un message très fort. Je vous en remercie.

Toutefois, ces mesures ne seront pleinement efficaces que si la prévention devient une priorité. Sinon, l’emprise du crime perdurera. Il faut mieux prendre en compte les intimidations – qu’elles soient insidieuses ou spectaculaires – pour briser le pouvoir de la peur, en Corse comme ailleurs.

Face aux pressions répétées, l’assassinat d’un syndicaliste agricole et lanceur d’alerte nous rappelle… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l'orateur. – Les députés du groupe HOR, plusieurs députés du groupe LFI-NFP et Mme Mélanie Thomin applaudissent ce dernier.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice . La magnifique île de Beauté a été une nouvelle fois touchée, ensanglantée par des règlements de comptes et surtout par des assassinats…

M. Ugo Bernalicis . Ce n'est pas pareil !

M. Gérald Darmanin, ministre d'État . …qui, je le sais, atteignent toute la Corse, dans son honneur et dans sa chair.

Avec le ministre Rebsamen, nous engageons des moyens très importants pour que la Corse, indépendamment des aspects économiques et culturels, se développe dans un climat de paix publique.

Les moyens prévus par le ministère de l'intérieur et ceux que j'ai annoncés pour mon ministère, demandés par les élus de Corse, comme M. Marcangeli et vous-même, prouvent que le chemin est encore long si l'on veut lutter contre les menaces et les actes de corruption qui, en effet, visent les citoyens et les fonctionnaires qui essaient de mettre fin à l'omerta.

La loi visant à lutter contre le narcotrafic, qui fera l'objet d'un vote solennel cet après-midi et qui, je l'espère, sera adoptée à une très large majorité, prévoit des moyens supplémentaires, une refonte du statut de repenti mais aussi l'application d'un nouveau modèle carcéral que nous avons choisi pour briser cette loi du silence.

Toutefois, d'autres mesures doivent encore être déployées en Corse : l'anonymisation des procédures, la domiciliation chez l'avocat ou encore la protection des témoins. De même, les fonctionnaires de l'État et des collectivités territoriales doivent être poursuivis lorsque le secret, auquel ils sont tenus, est violé. Par ailleurs, les magistrats, à qui nous accordons des moyens, doivent tous être professionnels en Corse.

Si la juridiction interrégionale spécialisée de Marseille fait un travail formidable face aux actes commis en Corse, le parquet national nous aidera, à coup sûr, lorsqu'il faudra que davantage d'affaires soient dépaysées. J'ai annoncé, devant l'Assemblée de Corse, la création d'un pôle spécialisé – une mission est d'ailleurs actuellement menée à la cour d'appel de Bastia, à la demande du ministère de la justice, pour étudier ce projet. Ce pôle permettra d'appeler en renfort, en nombre plus important que jamais, des magistrats du parquet et du siège afin de mener des poursuites et de prononcer des condamnations.

Vous avez raison et je connais votre courage sur cette question, monsieur Lacombe. Sachez que la justice et la République française se tiendront toujours aux côtés des Corses et engageront les moyens nécessaires pour faire valoir la République, la paix et la sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

Données clés

Auteur : M. Xavier Lacombe

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Crimes, délits et contraventions

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 avril 2025

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