Condamnation de Mme Marine Le Pen
Question de :
M. Sébastien Chenu
Nord (19e circonscription) - Rassemblement National
Question posée en séance, et publiée le 2 avril 2025
CONDAMNATION DE MME MARINE LE PEN
Mme la présidente . La parole est à M. Sébastien Chenu.
M. Sébastien Chenu . Dans le classement de l'indice de démocratie établi par le journal britannique The Economist, la France est coincée entre le Botswana et le Chili, et ce n'est pas demain qu'elle gagnera des places !
M. Erwan Balanant . Pas avec vous au pouvoir, c'est sûr !
M. Sébastien Chenu . Toujours selon la presse britannique, « la justice s'est immiscée de façon dramatique dans la campagne présidentielle française ». Le journal espagnol El País a souligné l'état malsain de la démocratie française, emboîtant le pas à La Tribune de Genève, pour laquelle exclure Marine Le Pen de la présidentielle « ne sert ni la loi ni la démocratie ».
Mme Ayda Hadizadeh . Retournez plutôt emprunter aux Russes !
M. Sébastien Chenu . En laissant s'abîmer notre État de droit, la France, seul pays où il faut avoir perdu les élections pour gouverner, s'abîme sur la scène internationale.
Craignant le jugement du peuple, certains se rassurent en s'appuyant sur celui de magistrats politisés. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
M. François Cormier-Bouligeon . Rendez plutôt l'argent !
M. Sébastien Chenu . La France est observée par le monde entier. Les dirigeants des démocraties authentiques et les peuples du monde nous disent : « On vous voit, on vous regarde. » (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.) Vous qui parlez à Tebboune et à al-Charaa, vous acceptez qu'on piétine ici notre État de droit. Vous qui aimez tant donner des leçons de morale au monde entier, comment défendrez-vous demain Navalny ou Imamoglu, l'opposant d'Erdogan, quand vous acceptez ici que le peuple ne puisse ni choisir, ni voter pour la candidate du peuple, Marine Le Pen ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Benjamin Lucas-Lundy . Quelle honte, ces comparaisons !
Mme Ayda Hadizadeh . Vous avez été pris la main dans le sac !
M. Sébastien Chenu . « On vous voit ! », nous disent-ils. C'est votre capacité à faire preuve de justice demain qui rendra la démocratie possible, c'est votre penchant d'aujourd'hui pour l'injustice qui la rend nécessaire - comptez sur nous pour la défendre ! (Les députés des groupes RN et UDR se lèvent et applaudissent.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice . L'affaire est si importante que je ne cherche en rien à polémiquer. Il est question d'une décision de justice, rendue par trois magistrats indépendants, après un procès…
M. Stéphane Rambaud . C'est le Syndicat de la magistrature, un syndicat politisé ! Ce sont des juges rouges !
M. Emeric Salmon . Vous n'y croyez même pas !
M. Gérald Darmanin, ministre d'État . Je ne vous permets pas de mettre en doute l'indépendance des magistrats ! Dans un État de droit, il est possible de faire appel. L'appel de Mme la présidente Le Pen et des autres condamnés en première instance doit d'abord être audiencé. Après l'audiencement, le procès, qui sera équitable, et le verdict, prononcé par des magistrats indépendants, chacun devra accepter la décision de justice – c'est le principe dans un État de droit.
Vous évoquez le respect de la démocratie. Comme vous l'a rappelé le premier ministre, les dispositions que vous dénoncez figurent dans une loi de 2016, la loi Sapin 2, que je n'ai pas votée.
Plusieurs députés des groupes RN et DR . Nous non plus !
M. Gérald Darmanin, ministre d'État . Aujourd'hui, c'est la loi de la République. Comme l'a indiqué le premier ministre au président Ciotti, il appartient maintenant au Parlement de la modifier, s'il le souhaite.
Vous avez évoqué l'incompréhension sur la scène internationale en citant vos lectures. Désireux de rester dans le cadre de la Ve République, je suis particulièrement attentif au peuple souverain français, qui s'est doté de cette Constitution. Elle prévoit que le garde des sceaux ne peut commenter une décision de justice.
M. Sébastien Chenu . On ne vous demande pas de commenter la décision de justice !
M. Gérald Darmanin, ministre d'État . Vous pouvez le faire dans cet hémicycle en vertu du principe constitutionnel de l'immunité parlementaire, qui vous permet de critiquer des décisions – c'est votre droit le plus strict et je ne le remets pas en cause.
Je veux revenir sur un point également soulevé par M. Tanguy. Il n'existe pas une candidate du peuple et d'autres qui ne le seraient pas. Nous avons tous ici été élus par le peuple. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe EPR.) Depuis le début de la Ve République, aucun candidat d'extrême droite n'a été choisi par le peuple à l'occasion de l'élection présidentielle, contrairement à M. Macron, qui l'a été deux fois, ne vous en déplaise ! (Mme Sandra Marsaud applaudit.) Le peuple ne serait-il plus le peuple quand il vote mal ? Il devrait vous être possible d'avancer de bons arguments juridiques et politiques tout en respectant le vote du peuple, même quand il ne vote pas pour vous ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)
Auteur : M. Sébastien Chenu
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 avril 2025