Plafonds de verre auxquels font face les personnes trans ou non-binaires
Question de :
M. Emmanuel Fernandes
Bas-Rhin (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Emmanuel Fernandes attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, sur les plafonds de verre auxquels font face les personnes trans ou non-binaires dans le monde du travail, dans les domaines culturels et médiatiques et en politique. M. le député interroge Mme la ministre sur les moyens qui sont donnés pour éliminer les plafonds de verre qui amènent les personnes trans, non-binaires et queers à faire face à une inégalité des chances. Aujourd'hui, les personnes trans et surtout non-binaires sont quasi-totalement absentes des postes à responsabilité que ce soit dans le public ou dans le privé, absentes du paysage culturel, médiatique et politique qui discute d'elles sans elles et absentes des fonctions électives. Dans l'accès à l'emploi et encore plus aux fonctions à responsabilité, de nombreuses études ont pointé les plafonds de verre auxquels font face l'ensemble des personnes LGBTQIA+. Ces discriminations affectent tout particulièrement les personnes trans ou non-binaires, encore plus lorsqu'elles sont non-blanches et amènent ces populations à être en moyenne significativement plus isolées et plus pauvres que la moyenne nationale. Les personnes trans font face à beaucoup d'incompréhension voire de discriminations dans l'emploi. Ce phénomène amène un certain nombre d'entre elles à ne pas faire de coming-out, ce qui est néfaste pour leur santé mentale et inacceptable dans une société fondée sur la liberté où chacun et chacune devrait pouvoir affirmer son identité. Ces discriminations peuvent même évoluer vers des actes transphobes ou du harcèlement. M. le député interroge donc le Gouvernement sur ses stratégies pour mettre fin à ces barrières à l'emploi et l'évolution dans l'emploi pour les personnes trans pour faire disparaître les plafonds de verre et vivre le principe d'égalité des chances. Dans le paysage culturel et médiatique, alors que des personnalités trans ou non-binaires ont émergé dans plusieurs autres pays, l'absence de ces personnes en France est criante et empêche l'expression de leurs réalités. Les seules personnes trans connues en France ont largement construit leur audience par elles-mêmes via des plateformes numériques par exemple et les espaces culturelles et médiatiques ne parviennent pas à créer de place pour elles. Pourtant, l'exposition à ces réalités diverses serait d'une vraie utilité pour permettre une meilleure compréhension des enjeux spécifiques à ces personnes par l'ensemble de la population française et permettrait de diminuer les agressions et discriminations transphobes dont l'association SOS Homophobie a pointé dans son rapport 2023 qu'elles atteignent un pic. M. le député estime ainsi que ce n'est pas seulement pour l'égalité des chances que la présence culturelle et médiatique des personnes trans ou non-binaires est nécessaire, mais que l'effacement de ces plafonds de verre serait bénéfique pour diminuer les violences dans la société. Il l'interroge donc sur l'inclusion de ces objectifs dans les plans de lutte contre l'homophobie et la transphobie du Gouvernement. Enfin, au niveau politique, une seule personnalité trans est médiatisée en France : la maire d'une commune d'environ 500 habitants, parmi les 35 000 maires de communes. Sur le plateau d'une émission à grande écoute, cette unique maire trans médiatisée a été, de plus, disqualifiée dans ce qu'elle est, faisant face à cette violence inacceptable. L'acceptation des personnes trans et non-binaires, ainsi que de leurs identités, ne peut constituer des sujets de débat, pour lesquels les journalistes devraient faire œuvre de contradictoire. La Cour européenne des droits de l'homme a affirmé, dans sa jurisprudence, que l'identité sexuelle fait partie des aspects les plus intimes de la vie privée et qu'elle est à ce titre protégée, notamment au regard du droit à la vie privée et du droit à la non-discrimination dans l'accès aux droits garantis par la convention. Dans ce cadre, les personnes trans et non-binaires ne sauraient être exclues de l'office électif, l'article 3 du protocole additionnel à la convention garantissant le droit à des élections libres. Si aucun dispositif légal explicite n'exclut en droit les personnes trans et non-binaires de l'accès à des fonctions électives, force est de constater que la simple absence d'interdiction ne suffit pas à permettre l'égalité des chances. Ainsi, alors que selon les études scientifiques, entre une personne sur mille et deux personnes sur cent sont trans et malgré le début récent d'acceptation par la société de ces parcours de vie, aucune personne trans n'a jamais été élue au niveau départemental, régional, ni national. Une égalité des chances réelle signifierait qu'à l'Assemblée nationale, à chaque mandature il y ait entre un ou une et une dizaine de députés et députées trans : il n'y en a jamais eu aucune ni aucun. De même, elle supposerait qu'il y ait entre une cinquantaine et un millier de maires trans : là aussi, la République est loin du compte. Il y a donc en réalité une succession de plafonds de verre qui s'opposent aux personnes trans ou non-binaires, les empêchant d'avoir accès à ces postes électifs. La Constitution donne aux partis et groupements politiques la responsabilité de concourir à l'expression du suffrage. Elle garantit la liberté de l'exercice de leur activité, mais leur impose également en son article 4 la contribution à la mise en œuvre de la parité en politique et le respect des principes de la démocratie. Parmi ces principes démocratiques doivent figurer l'égalité des chances et l'absence réelle de discrimination. Il est nécessaire qu'un jour l'accès d'une personne trans ou non-binaire à un poste en responsabilité devienne un non-évènement, comme cela devient heureusement progressivement le cas, par des efforts qu'il convient d'approfondir, pour les personnes homosexuelles ou bisexuelles. Dans ce cadre, il lui demande comment elle entend mener un travail avec l'ensemble des partis et groupements politiques, mais également avec les partenaires médiatiques et culturels de l'État, pour que les personnes trans et non-binaires puissent profiter de l'absence de discrimination sur le genre qui est le fondement du principe de parité. Les personnes trans ne peuvent porter elles-mêmes leurs voix devant le Parlement, aucune n'ayant été élue jusqu'à ce jour ni à l'Assemblée nationale ni au Sénat. En tant que représentant de la Nation, il se fait donc le relais des voix trans et non-binaires sur la question et lui demande quels moyens sont mis en œuvre pour l'égalité des chances pour les personnes LGBTQIA+ et en particulier trans et non-binaires.
Réponse publiée le 3 juin 2025
Le 26 mai 2025 s'est tenu le 1er comité de suivi du plan national pour l'égalité, et contre la haine et les discriminations LGBT+ présidé par la Ministre Aurore Bergé, en lien avec la DILCRAH. Ce plan, structuré autour de cinq grands axes d'action (nommer, mesurer, former, protéger, sanctionner), mobilise l'ensemble des ministères, les collectivités, les établissements publics et un large réseau d'associations partenaires co-constructrices de ce Plan qui se développent en 117 mesures dont 85 % sont engagées. Plusieurs mesures du plan ont pour objectif de répondre à la problématique que vous soulevez. Le ministère du travail a engagé plusieurs chantiers et notamment celui de solliciter auprès des organismes de formation les données relatives à l'exercice des formations réalisées en application de l'article L. 1131-2 du code du travail. La DARES a publié une enquête en mars 2024 une étude qualitative intitulée « Quelles sont les caractéristiques de l'offre de formation à la non-discrimination à l'embauche ? »., Cette étude est réalisée en deux parties : d'abord l'identification des éléments de la formation (organismes, formats, contenu) puis une partie axée sur les attentes des participants. Une enquête quantitative devrait être réalisée par la Dares sur les résultats de l'enquête EFE. Un autre chantier consiste en la poursuite des échanges avec les éditeurs d'outils de gestion des ressources humaines concernant la bonne prise en compte de la civilité et du prénom d'usage des personnes trans et la lutte contre la transphobie. Une réunion a eu lieu avec des membres de l'association SDDS, qui regroupe des éditeurs de logiciels, à l'occasion de laquelle les éditeurs ont soulevé des difficultés techniques liées aux impacts sur les normes de déclaration en DSN. Le Ministère du travail s'est également engager à renforcer la professionnalisation des CFA en matière de lutte contre les discriminations en promouvant les actions de sensibilisation et de formation des associations LGBT+ auprès des CFA Depuis fin 2023, la DGEFP, en partenariat avec le Réseau des Carif-Oref, a mis à disposition des CFA un kit ressource et organisé un webinaire sur la lutte contre les discriminations, suivi par 401 CFA. Depuis 2024, un module e-learning sur la prévention des discriminations anti-LGBT+ est accessible à l'ensemble des agents de l'inspection du travail. Il propose contenus, vidéos, quiz et témoignages pour renforcer la sensibilisation et l'action sur le terrain. Accompagner les CCI et CMA dans l'intégration des problématiques LGBT+ à la lutte contre les discriminations dans l'entreprise Mesure en cours : le travail est en cours de recensement. En outre, le soutien financier aux associations est un levier important de cet objectif de briser les plafonds de verre : pour exemple, le financement par la DILCRAH de l'Autre Cercle, spécialisé sur ces thématiques, et la signature de la charte d'engagement auprès de plusieurs entreprises et ministères. La politique menée par le Gouvernement est de se vouloir opérationnelle en matière de lutte contre toutes les discriminations dans tous les domaines ; les élections reflètant la société dans son ensemble. Les 117 mesures du plan national pour l'égalité, contre la haine et les discriminations LGBT+ concernent donc tous les domaines et engagent l'ensemble des ministères : intérieur, armées, justice, éducation nationale, enseignement supérieur et recherche, sport, fonction publique, travail, culture etc. La plupart des partis politiques ont une association ou une groupe LGBT+. En matière de manifestation, le gouvernement valorise le mois des Fiertés autour d'une thématique annuelle, de manifestations culturelles et scientifiques de haut niveau, des productions scolaires (concours, séminaire national, formations académiques, et de diffusion de messages politiques forts relayés dans les médias nationaux, régionaux locaux et réseaux sociaux. En lien avec la Semaine de la lutte contre l'homophobie et la transphobie, faire du 17 mai, une journée majeure de mobilisation des médias (nationaux et locaux) sur la lutte contre les LGBTphobies. Le ministère de la Culture a renouvelé la signature de la Charte de l'Autre Cercle, le 15 mai 2025. Par ailleurs, il soutient de nombres actions de lutte contre la haine anti-LGBT+ : la Queer Palm au Festival de Cannes et le Queer Palm Lab, un nouveau programme de mentorat, la Fédération française des festivals de films LGBTQIA+, l'association Sauve qui peut le court métrage. Ce soutient s'opère également via les services déconcentrés sur l'ensemble du territoire, dont par exemple le Festival international du film LGBTQIA+ "Chéries, chéris", le projet du Théâtre de la Croix Rousse et sa 5e édition du Festiv.iel, ou encore l'édition 2025 de la Marche des Fiertés à Paris sera soutenue pour son volet artistique. Dans les écoles d'art, d'architecture, de journalisme et tous les établissements publics sous tutelle du ministère de la Culture, intégrer des contenus de formation sur la lutte contre les stéréotypes homophobes et transphobes, les discriminations et le rôle de la culture dans l'émancipation et la représentation des citoyens La lutte contre les discriminations liées à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre est inscrite dans la Stratégie ministérielle de l'enseignement supérieur Culture 2024-2027. Chaque établissement dispose d'un référent discrimination, en lien avec la haute fonctionnaire à l'égalité et des formations sur la diversité et le management inclusif sont proposées aux agents. La sensibilisation des étudiants passe par des séminaires, débats ou activités de vie étudiante. Le guide « Accompagner le changement d'identité de genre » recommande l'usage du prénom choisi sur les documents scolaires. En cas de changement d'état civil, un duplicata de diplôme est possible. Le ministère promeut aussi la Charte d'Engagement LGBT+ de l'Enseignement Supérieur de l'Autre Cercle auprès de ses écoles.
Auteur : M. Emmanuel Fernandes
Type de question : Question écrite
Rubrique : Discriminations
Ministère interrogé : Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre les discriminations
Ministère répondant : Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre les discriminations
Dates :
Question publiée le 8 avril 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025