Droits de douane américains
Question de :
M. Éric Coquerel
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Question posée en séance, et publiée le 9 avril 2025
DROITS DE DOUANE AMÉRICAINS
Mme la présidente . La parole est à M. Éric Coquerel.
M. Éric Coquerel . Qu'il paraît loin, ce Livre blanc de la Commission européenne présentant les États-Unis comme notre allié traditionnel ! Nous n'affrontons pas une crise financière de plus, mais une crise systémique, possiblement de la même ampleur que celle qui a entraîné le monde de la première mondialisation capitaliste dans la Grande Guerre. C'est une crise de ce capitalisme absolutiste qui attribue au libre-échange le soin d'abreuver de profits inédits le minotaure de la finance. Voilà que les États-Unis n'y trouvent plus leur compte ; le pays de Trump provoque donc un affrontement commercial et monétaire sur fond d'impérialisme musclé en espérant restaurer sa domination économique.
Pour y répondre, on nous présente une fausse alternative : soit négocier piteusement en achetant toujours plus de produits américains – à commencer par des armes –, soit procéder à l'escalade en utilisant les mêmes outils – les droits de douane réciproques –, au détriment de la consommation populaire. Ce choix entre lequel hésitent des pays européens aux intérêts contradictoires révélera une fois encore l'impuissance européenne.
La France doit ouvrir un autre chemin sans dépendre de personne et en y associant les pays d'Europe qui le souhaiteront. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Sandra Marsaud s'exclame.) À cette fin, nous proposons une rupture de politique économique : en taxant le capital improductif, mettons fin à la politique de l'offre, à la baisse des dépenses publiques qui produit des effets récessifs et au manque de recettes. Pour anticiper les effets inflationnistes, préparons-nous au blocage des prix, à commencer par ceux de l'énergie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – MM. Alexis Corbière, Benjamin Lucas-Lundy et Stéphane Peu applaudissent également.) Au lieu de nous livrer à une riposte nuisible, visons juste, en taxant les entreprises américaines des services et de la tech comme les Gafam. Engageons-nous dans la voie d'un protectionnisme solidaire ciblé (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP), adossé à une politique de soutien et d'investissement dans la souveraineté industrielle et agricole au service de la bifurcation écologique. Au lieu de nous agripper au passé et à la vassalisation, ouvrons des négociations commerciales ayant pour but non le libre-échange débridé, mais bien la coopération bilatérale avec les blocs économiques menacés par les États-Unis, à commencer par la Chine et l'Amérique latine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit également.)
Ni le monde de Trump, ni celui du retour au libre-échange : voilà notre plan. Quel est le vôtre ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent. – M. Benoît Biteau applaudit aussi.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique . Nous vivons un moment de bascule. Je tiens à être clair quant aux objectifs de l'Union européenne : nous cherchons évidemment la désescalade et souhaitons rétablir le libre-échange qui a permis le développement économique depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Toutefois, ce n'est pas en demandant la désescalade que nous l'obtiendrons. Si nous voulons négocier avec l'Amérique de Donald Trump, il faut montrer que nous disposons des mêmes armes. C'est par la force de notre marché et de notre union que nous obtiendrons la désescalade. Je serai avec mes collègues européens à Varsovie en fin de semaine et au G7 à Washington le 22 avril ; dans les jours à venir, nous construirons une riposte dont nous espérons qu'elle nous permettra de faire reculer les États-Unis.
En attendant, ce n'est pas avec les méthodes que vous proposez que nous réussirons à protéger les entreprises françaises.
Une députée du groupe EPR . C'est sûr !
M. Éric Lombard, ministre . La France compte 28 000 entreprises qui exportent leurs produits aux États-Unis, parmi lesquelles 40 % pour qui l'exportation représente plus de la moitié de leur activité. La réponse appropriée consiste à les soutenir. Mes collègues de Bercy et moi-même allons les rencontrer, comme l'ont fait la semaine dernière le président de la République et le premier ministre, les écouter et les accompagner. Il est essentiel qu'elles puissent traverser cette période en protégeant l'emploi et en préservant notre modèle économique. C'est à cela que nous consacrons nos efforts avec énergie et constance. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
Auteur : M. Éric Coquerel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Commerce extérieur
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 avril 2025