Question de : M. Guillaume Bigot
Territoire de Belfort (2e circonscription) - Rassemblement National

M. Guillaume Bigot alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le projet de dissolution de plusieurs groupes de supporters dit « ultras ». En effet, la dissolution de ces groupes va avoir pour effet de rendre la situation plus ingérable qu'elle ne l'est actuellement. Dissoudre ces associations c'est rompre le dialogue avec des interlocuteurs reconnus, identifiés par les autorités étatiques pour l'organisation des déplacements ou des matchs à domicile. C'est priver les clubs de ces interlocuteurs légitimes et responsables qui encadrent les tribunes et les déplacements. Ces dissolutions auront donc plus d'effets négatifs que positifs en matière de sécurité et de lutte contre la violence dans les stades, elles ne feront qu'aggraver les tensions et multiplier les risques de violences. Par ailleurs, un arsenal juridique existe, qui plus est un des plus complet d'Europe, pour sanctionner les individus qui enfreignent la loi dans les stades. Les interdictions individuelles de stade que la justice peut appliquer ou bien des interdictions administratives délivrées par les préfectures. Pourquoi ne pas tout simplement l'utiliser de manière systématique ? Pour rappel la France sanctionne 10 fois moins que l'Angleterre, avec 202 interdits de stades pour 2 000 en Angleterre. Les dissolutions révèleraient définitivement la faiblesse de l'État en sa capacité de sanctionner les individus violents, d'autant que la dissolution n'interdit pas ses membres de stades, elle ne sanctionne pas les individus délinquants qui y sévissent. La nature ayant horreur du vide, cela favorisera l'émergence de nouveaux acteurs incontrôlables. L'expérience des dissolutions précédentes à la fin des années 2000 doit servir de leçon. En 2008 les « Boulogne Boys », groupe ultras du Paris-Saint-Germain ont été dissous. Suite à cela, la tribune est devenue encore plus violente et des affrontements avec le virage Auteuil ont conduit à la mort d'un supporter en 2010. En 2010, la « Brigade Sud Nice » et la « Cosa Nostra » de Lyon ont été dissoutes, ce qui n'a eu aucun effet, car depuis d'autres groupes se sont créés, continuant les mêmes activités au sein des mêmes tribunes. Une politique répressive individuelle est donc à privilégier, accompagnée d'un dialogue et d'une responsabilisation de ces groupes de supporters. C'est pourquoi il souhaiterait savoir quelles mesures le ministère compte mettre en œuvre pour lutter efficacement contre toutes formes de violences dans les stades.

Réponse publiée le 17 juin 2025

Des incidents intolérables sont survenus sur l'ensemble du territoire depuis le début de la saison professionnelle de football 2024-2025. Des violences physiques, verbales et des dégradations de biens ont été commises, à l'opposé des valeurs de convivialité, de cohésion et de solidarité qui sont celles du sport et qui ont été mises à l'honneur à l'occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Au total depuis le début de la saison, sur les 462 rencontres professionnelles disputées, 180 ont été classées à risque et 64 ont été émaillées d'incidents notables. Toujours depuis le début de la saison, 627 interpellations ont été réalisées en marge de rencontres de football professionnel, en hausse de 41 % par rapport à la saison dernière, où il y en avait eu au total 718. En conséquence, 30 % des unités de forces mobiles engagées au cours des week-ends le sont pour assurer la sécurisation de match de football. Dans ce contexte, une réponse ferme de l'État face à ces troubles à l'ordre public est nécessaire et a été apportée à plusieurs niveaux. En premier lieu, une circulaire signée par le ministre d'État, ministre de l'intérieur et par la ministre des sports a été diffusée à tous les préfets le 6 mars dernier en leur enjoignant de s'engager résolument dans la lutte contre ces violences et en rappelant les outils mis à leur disposition. La consigne donnée aux préfets est désormais de prendre systématiquement une mesure d'interdiction administrative de stade à chaque fois que cela est possible, afin d'éloigner durablement des stades les individus violents, et de faire constater les faits dans un rapport circonstancié, qui sera transmis au procureur de la République territorialement compétent pour lui permettre d'apprécier l'opportunité d'engager des poursuites pénales et, le cas échéant, de prononcer la peine complémentaire d'interdiction judiciaire de stade. En second lieu, la montée des faits de violences inacceptables a conduit le ministère de l'intérieur à relancer les procédures de dissolution collective d'associations ou de groupements de fait de supporters « dont des membres ont commis en réunion, en relation ou à l'occasion d'une manifestation sportive, des actes répétés constitutifs de dégradations de biens, de violences sur des personnes ou d'incitation à la haine ou à la discrimination contre des personnes à raison de leur origine, de leur orientation sexuelle, de leur sexe ou de leur appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.  », sur le fondement de l'article L.332-18 du code du sport. Cette mesure reste exceptionnelle, le Conseil constitutionnel ayant érigé la liberté d'association au rang des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971), tandis que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit les libertés d'expression (article 10) et de réunion (article 11). Une telle atteinte aux libertés d'association, de réunion et d'expression doit s'inscrire dans les cas limitativement énumérés par la loi et être strictement proportionnée à la menace pour l'ordre public que représente l'association ou le groupement de fait en cause. Pour autant, au regard des agissements graves commis par les supporters des groupes visés, cette mesure peut être nécessaire ainsi que l'ont montré les dissolutions précédemment prononcées. La commission nationale consultative de préventions des violences lors des manifestations sportives, saisie pour avis des projets de suspension ou de dissolutions des associations ou groupements de fait sur le fondement de l'article L.332-18 du code du sport a été saisie de quatre projets de dissolutions en 2025. La dissolution du groupement de fait « Légion X » a été prononcée par décret du 1er mai 2025. Il a été décidé de suspendre la procédure de dissolution des groupes de supporters de l'Association sportive de Saint Etienne, « Magic Fans » et « Green Angels » afin d'examiner les garanties que ceux-ci sont en mesure d'apporter pour assurer un retour effectif au calme et la fin des violences des membres de ces deux groupes. Par ailleurs, la commission se réunira le 11 juin 2025 pour examiner le projet de dissolution de « Strasbourg Offender », groupe Hooligans à l'origine d'agissements violents et d'incitation à la haine ou à la discrimination contre des personnes.

Données clés

Auteur : M. Guillaume Bigot

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sports

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 8 avril 2025
Réponse publiée le 17 juin 2025

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