Définition juridique des soins esthétiques
Question de :
Mme Laure Miller
Marne (2e circonscription) - Ensemble pour la République
Mme Laure Miller attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire, sur l'absence d'une définition juridique précise des soins esthétiques et les conséquences pour les professionnels du secteur. Actuellement, l'article 16 de la loi du 5 juillet 1996 modifiée relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat dispose que les soins esthétiques « ne peuvent être exercés que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci ». Or les soins esthétiques, en eux-mêmes, ne bénéficient d'aucune définition légale, mise à part une réponse d'une FAQ du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. L'absence de cadre clair sur ce que recouvrent exactement ces soins crée une insécurité juridique pour les professionnels de ce secteur. Certaines pratiques, bien que maîtrisées par ces professionnels qualifiés, sont interdites au motif qu'elles pourraient être assimilées à des actes médicaux. Ce vide réglementaire les empêche d'exercer pleinement leur métier et les contraint à se tourner vers des alternatives technologiques coûteuses, pesant lourdement sur les structures artisanales et indépendantes. L'interdiction du microneedling, un soin du visage utilisant des micro-aiguilles, réservé aux professionnels de santé au titre de l'effraction cutanée que cette pratique sous-entend, a constitué une contrainte dans les habitudes des professionnels de l'esthétique. Une telle interdiction ne s'applique, d'ailleurs, pas aux tatoueurs et perceurs, bénéficiant d'une dérogation leur permettant des actes impliquant une effraction cutanée sans appartenir au corps médical. Cette incohérence réglementaire soulève des questions d'équité de traitement. L'absence de définition légale des soins esthétiques nuit à la profession et freine son développement. Il en résulte une incertitude pour les professionnels ainsi qu'une confusion pour les consommateurs quant aux pratiques autorisées, au regard des vingt-deux questions de la FAQ « Encadrement des soins esthétiques et de la coiffure ». Dans ce contexte, elle lui demande si le Gouvernement envisage d'inclure une définition juridique et réglementaire claire des soins esthétiques afin de mieux encadrer ces pratiques et d'établir une distinction précise entre les actes relevant du bien-être et ceux nécessitant une compétence médicale. Elle souhaiterait également savoir si une harmonisation des règles liées à l'effraction cutanée pourrait être envisagée, afin d'assurer une cohérence réglementaire et une égalité de traitement entre les métiers concernés.
Réponse publiée le 3 juin 2025
Le Gouvernement porte la plus grande attention à la situation des professionnels de l'esthétique et à la nécessité de mieux définir les périmètres d'intervention et qualifications professionnelles dans ce secteur. La qualification professionnelle relative au secteur de l'esthétique est prévue à l'article L. 121-1 du code de l'artisanat qui précise en son point 5° que ne peuvent être exercés que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci « les soins esthétiques à la personne autres que médicaux et paramédicaux et les modelages esthétiques de confort sans finalité médicale ». Les pratiques esthétiques sont caractérisées par une pluralité d'acteurs, de prestations et le recours à des appareils esthétiques innovants. Les pratiques réalisées par les esthéticiens se développent, à côté des simples prestations de bien-être ne nécessitant pas de qualification professionnelle et de la médecine esthétique. Le cadre législatif et réglementaire applicable (code de la santé publique, code de l'artisanat notamment) est ancien et ne permet pas d'établir une définition précise des soins esthétiques. Il ne prend pas non plus en compte l'émergence de nouvelles pratiques sur le marché de l'esthétique et leur impact sur les périmètres d'intervention relevant des soins esthétiques et de la médecine esthétique. En l'état du droit en vigueur, les pratiques impliquant une effraction cutanée nécessitent une intervention médicale, au regard du principe de l'inviolabilité du corps humain posé par le code civil. Ainsi, la pratique du microneedling, dès lors qu'elle implique une effraction cutanée, est interdite aux esthéticiens, comme rappelé sur le site internet de la direction générale de la concurence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) [1]. En effet, l'association de la perforation de la peau avec des cosmétiques ne peut pas être considérée comme anodine et il n'existe actuellement aucune expertise publique permettant de corroborer l'absence de risque du microneedling pour la santé. En revanche, l'épilation au laser et à la lumière pulsée a été récemment ouverte aux esthéticiens ainsi qu'aux infirmiers, au regard notamment d'un rapport de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) [2]. Cette libéralisation s'est traduite par un cadre réglementaire spécifique introduit dans le code de la santé publique par le décret n° 2024-470 du 24 mai 2024 relatif aux actes d'épilation à la lumière pulsée intense et au laser à visée non thérapeutique et l'arrêté du 19 février 2025 relatif aux caractéristiques de la formation obligatoire pour la réalisation des actes d'épilation à la lumière pulsée intense ou au laser à visée non thérapeutique. Une communication sur les sites internet du ministère de la santé et de la DGCCRF a veillé à rendre les règles de qualification professionnelle les plus transparentes possibles tant à l'égard des professionnels du secteur que des consommateurs. La redéfinition des soins esthétiques, intégrant l'apparition de nouvelles pratiques sur le marché et des évolutions technologiques, nécessite une démarche coordonnée des administrations avec une concertation des représentants des professionnels concernés, au regard des enjeux économiques pour les professionnels et de sécurité pour les usagers. Ce travail de fond sur le périmètre des pratiques et la qualification des professionnels de l'esthétique est un préalable indispensable avant d'envisager toute modification des textes en vigueur. Il s'agit d'un travail d'ampleur, qui ne saurait se résumer à une seule mesure mais doit porter une vision systémique des pratiques esthétiques actuelles et futures et des lignes de partage entre esthéticiens et médecins esthétiques. [1] https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/les-fiches-pratiques/faq-encadrement-des-soins-esthetiques-et-de-la-coiffure [2] https://www.anses.fr/fr/system/files/AP2019SA0124Ra.pdf
Auteur : Mme Laure Miller
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Commerce, artisanat, PME, économie sociale et solidaire
Ministère répondant : Commerce, artisanat, PME, économie sociale et solidaire
Dates :
Question publiée le 15 avril 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025