Question de : Mme Christine Loir
Eure (1re circonscription) - Rassemblement National

Mme Christine Loir appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, sur la cession, par Sanofi, de sa filiale Opella, qui abrite le Doliprane, un médicament incontournable et l'un des plus vendus en France. Une opération financière estimée à plus de 15 milliards d'euros, qui aura des conséquences évidentes sur la souveraineté industrielle en matière de médicaments, mais aussi sur les emplois en France. Pour rappel, en 2022, près de 424 millions de boîtes de Doliprane ont été produites et livrées sur le territoire national. Cette production, réalisée notamment dans l'usine Sanofi du Calvados, est cruciale pour répondre aux besoins de millions de Français. Alors que cette cession commerciale soulève des questions légitimes concernant le maintien de la souveraineté industrielle française sur un médicament autant consommé, il est important de rappeler que des tensions d'approvisionnement ont déjà été observées, même lorsque la production était pleinement réalisée en France. Des pénuries se sont fait sentir à l'échelle nationale, dans de nombreuses pharmacies. Une telle vente et demain un transfert éventuel de la production sous contrôle étranger, pourrait non seulement aggraver ces risques de pénurie, mais aussi conduire à une hausse des prix, menaçant ainsi l'accès à ce médicament essentiel pour des millions de Français. La France dépend à hauteur de 60 % à 80 % des importations, en particulier de la Chine, pour la production de médicaments dits « matures ». Le Président de la République avait souligné l'importance stratégique du secteur pharmaceutique, notamment depuis la crise sanitaire liée au covid-19. En juin 2023, il avait exprimé la volonté de sécuriser 450 médicaments, dont le paracétamol, un antalgique essentiel que l'on retrouve dans les milliers de boîtes de Doliprane. Cette future vente soulève des questions majeures concernant la souveraineté industrielle française en matière de médicaments. Au-delà de l'enjeu de la vente, se pose la problématique de l'implantation économique de Sanofi. Dans la région Normandie, c'est un acteur industriel de premier plan. Ses trois sites normands, situés à Val-de-Reuil (Eure), Le Trait (Seine-Maritime) et Lisieux (Calvados), emploient plus de 3 500 personnes. Le site de Lisieux est, par ailleurs, l'unité de production de ce paracétamol si stratégique. Avec une telle vente, quelles garanties seront données pour le maintien des emplois dans la région ? Mme la députée demande donc à M. le ministre quelles actions concrètes le Gouvernement envisage de prendre pour empêcher que ce fleuron de l'industrie pharmaceutique française ne quitte le territoire, afin de garantir les emplois et l'indépendance médicamenteuse française.

Réponse publiée le 10 décembre 2024

En octobre 2023, dans le cadre de sa stratégie « Play to win », Sanofi a annoncé son souhait de se séparer d'Opella, son entité regroupant les activités « santé grand public » du groupe, dont notamment le Doliprane, afin de se recentrer sur l'innovation biopharmaceutique et en particulier la médecine de spécialité et les vaccins. En octobre 2024, Sanofi a fait part de son entrée en négociations exclusives avec le fonds américain Clayton Dubilier & Rice - CD&R pour lui céder 50 % du capital. Si la décision de Sanofi de se séparer d'Opella pour se recentrer sur des médicaments innovants relève de sa stratégie d'entreprise, l'État a négocié des engagements forts avec l'ensemble des parties prenantes afin de garantir le maintien de l'empreinte industrielle d'Opella en France ainsi que l'absence d'impact sur notre souveraineté sanitaire. Ainsi, un accord a été signé par Sanofi et CD&R portant sur : - La pérennité des sites de production de Lisieux et Compiègne, avec des engagements fermes sur le maintien d'un niveau minimum de valeur ajoutée produit sur ces sites pendant 5 ans ; - Le maintien du siège et des activités de R&D en France ; - La protection de l'emploi en France ; - L'investissement en France, avec un objectif précis d'investissement de 70 millions d'euros cumulés sur les cinq prochaines années ; - Le maintien de volumes minimaux de production en France pour les produits sensibles d'Opella, dont le Doliprane ; - Le maintien de l'approvisionnement d'Opella auprès de fournisseurs et sous-traitants français, notamment auprès de Seqens dans le cadre de la relocalisation du paracétamol ; Des sanctions conséquentes sont associées en cas de non-respect. L'État a également souhaité s'assurer du respect des engagements en disposant des informations exhaustives non seulement sur l'activité d'Opella, mais également sur la stratégie à moyen et long terme de l'entreprise. C'est pourquoi l'État a obtenu une participation minoritaire de Bpifrance au capital d'Opella, associée à un siège avec vote au conseil d'administration. Elle donnera à l'État les moyens d'être alerté sur une orientation non conforme aux engagements et plus globalement de pouvoir infléchir la stratégie de l'entreprise dans la durée. Par ailleurs, la procédure de contrôle investissements étrangers en France (IEF) s'appliquera également, sous le pilotage de la direction générale du Trésor, dans le calendrier fixé par le décret. Les engagements pris dans le cadre de la procédure IEF font l'objet de contrôles stricts et rigoureux de l'État et leur non-respect entraine des sanctions pouvant aller jusqu'à 10 % du CA de l'entreprise. Le suivi par l'État de cette cession s'inscrit dans la politique menée depuis plusieurs années de renforcement de notre souveraineté sanitaire et en particulier de notre approvisionnement en médicaments essentiels, qui constituent une priorité pour le Gouvernement. C'est à cet effet que l'État a mis en place un plan de relance en 2020 afin de renforcer nos capacités de productions de traitements contre la Covid 19, initiative qui a été pérennisée ensuite via : - l'annonce par le Président de la République en 2023 du lancement d'un plan de relocalisation de médicaments essentiels sur le plan sanitaire et le financement de 7 projets contribuant au renforcement de la chaine de production de ces médicaments. - la stratégie d'accélération maladies infectieuses émergentes et menaces NRBC ((nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques) lancée en 2021 qui vise à construire une stratégie allant de la recherche fondamentale au soutien à l'industrialisation pour mieux prévenir et préparer les prochaines crises sanitaires.

Données clés

Auteur : Mme Christine Loir

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Industrie

Ministère répondant : Industrie

Dates :
Question publiée le 1er octobre 2024
Réponse publiée le 10 décembre 2024

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