Handicap en milieu rural
Question de :
M. Emmanuel Blairy
Pas-de-Calais (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Emmanuel Blairy interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargée des personnes en situation de handicap, sur les conditions de prise en charge des personnes à mobilité réduite (PMR) et l'inclusion des personnes en situation de handicap, en particulier dans les territoires ruraux. Aujourd'hui, les familles doivent souvent parcourir jusqu'à 45 minutes de route pour accéder à une structure spécialisée, faute d'établissements à proximité. Cela devient un véritable obstacle pour de nombreux parents et proches. De plus, le manque de personnel qualifié aggrave les difficultés d'inclusion, avec un traitement souvent identique quel que soit l'âge des résidents, ce qui n'est pas adapté à leurs besoins spécifiques. Il lui demande quels moyens concrets le Gouvernement compte allouer pour améliorer cette situation.
Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2024
HANDICAP EN MILIEU RURAL
M. le président . La parole est à M. Emmanuel Blairy, pour exposer sa question, no 59, relative au handicap en milieu rural.
M. Emmanuel Blairy . Je souhaite aborder la question de l'égalité dans nos territoires, notamment s'agissant des personnes en situation de handicap ou du moins présentant certains troubles, trop souvent privées de structures et de dispositifs essentiels à leurs besoins, particulièrement en milieu rural. Tout le monde connaît nos brillants athlètes paralympiques que sont Aurélie Aubert, Léa Ferney ou encore Alexandre Léauté, mais trop peu ont la chance de connaître Estelle ou Romain.
Estelle habite Estrée-Wamin, dans ma circonscription. C'est une jeune femme brillante, pétillante, de 25 ans qui aspire à une seule chose : se rendre utile aux autres. Mais elle est contrainte, chaque jour, de faire une heure de route pour rejoindre un centre spécialisé. Là-bas, faute de structures différenciées et adaptées, elle se retrouve à partager des activités avec des personnes bien plus âgées qu'elle. Cela peut certes être intéressant, mais Estelle voudrait partager encore plus et avec tous, peu importe l'âge ou la catégorie sociale. Faute de structures adaptées pour l'accompagner dans ses projets, elle voit sa vie de femme prise dans un étau social qui ne lui donne aucune perspective. Elle confie régulièrement son désir d'entreprendre, une ambition légitime et qui n'est pourtant pas réalisable.
Et que dire de Romain ? Il a 12 ans, habite Ostreville et fait face à des difficultés d'accès pour les personnes à mobilité réduite (PMR). Chaque année, ses parents organisent des événements autour de leur association Un pour tous, tous pour Romain, afin d'acheter des matériels spécifiques très peu remboursés. Cette association tente de financer des équipements adaptés aux familles, ce qui révèle l'insuffisance du soutien institutionnel. Comme toutes les autres, celle-ci mérite, ici, d'être saluée.
À Écourt-Saint-Quentin, le cas de Jules est loin d'être isolé. Jules a 11 ans. Il est actuellement exclu de tout cadre éducatif, cela depuis juin 2024, malgré ses capacités.
Ces exemples illustrent les graves défaillances de notre système quand il s'agit d'intégrer les enfants aux besoins spécifiques. Ils mettent en lumière trois problèmes majeurs : le manque cruel de lieu spécialisé en milieu rural, qui prive les jeunes en situation de handicap d'un accompagnement de proximité ; l'absence de dispositif valorisant et adapté ; la difficile intégration des enfants ayant des troubles du comportement et exclus faute de solution adéquate ou de places disponibles.
Dès lors, quels moyens concrets le gouvernement compte-t-il allouer pour répondre à cette triple injustice et pour garantir un accès équitable aux structures spécialisées et à des dispositifs de remboursement efficaces pour les matériels indispensables à l'autonomie des personnes handicapées ? Nous ne pouvons pas continuer à laisser ces personnes sur le bas-côté, en marge de la société. Elles sont dans le silence et je porte leur voix aujourd'hui.
M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille et de la petite enfance.
Mme Agnès Canayer, ministre déléguée chargée de la famille et de la petite enfance . Vous interrogez Mme la ministre déléguée chargée des personnes en situation de handicap sur leurs conditions de prise en charge et sur la disponibilité de l'offre de soins pour elles quand elles vivent dans un territoire rural.
Lors de la Conférence nationale du handicap de 2023, le président de la République s'est engagé à proposer, d'ici à 2030, 50 000 nouvelles solutions aux personnes en situation de handicap, afin d'offrir à chacune une réponse adaptée à sa situation, à ses besoins et à ses attentes.
La ministre déléguée suit de près la mise en œuvre de ce plan de création et de transformation de l'offre médico-sociale avec une attention toute particulière pour les zones les moins bien dotées. L'équité entre territoires, en métropole comme en outre-mer, en ville comme à la campagne, est pleinement prise en compte dans le déploiement de l'offre.
Ce plan a ainsi déjà permis d'expérimenter un soutien médico-social renforcé au sein de l'école pour les élèves en situation de handicap. Quatre départements ruraux testent ce dispositif que dix autres départements rejoindront à la rentrée 2025.
À très court terme, le gouvernement prévoit une accélération en 2025 du déploiement de 15 000 nouvelles solutions, financées par une enveloppe supplémentaire de 270 millions d'euros inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En outre, un fonds d'appui à la transformation de l'offre, doté de 250 millions d'euros pour la période 2024-2027 et mobilisable dès cette année, permet d'accompagner les territoires dans l'ingénierie de projet et de soutenir les investissements visant à améliorer l'accompagnement des personnes en situation de handicap partout en France.
Enfin, un fonds territorial spécifique, doté de 300 millions d'euros à répartir sur cinq ans, a été mis en place par l'État afin d'accompagner les établissements recevant du public dans la mise aux normes de leur accessibilité. Dans votre circonscription, la pharmacie d'Oisy-le-Verger a bénéficié de ce fonds pour la création, sans emprise sur le domaine public, d'une rampe d'accès destinée aux personnes à mobilité réduite.
Vous pouvez ainsi constater que le gouvernement est pleinement engagé en faveur du renforcement de la prise en charge des personnes en situation de handicap – que cela passe par une amélioration de l'offre de soins ou de l'accessibilité – dans tous les territoires, y compris ruraux.
M. le président . La parole est à M. Emmanuel Blairy.
M. Emmanuel Blairy . Je vous remercie pour ces éléments de réponse. Je reviens sur le cas de Jules. Âgé de 12 ans, il ne bénéficie pas de cette promesse d'égalité entre les territoires puisque, depuis juin, il n'est plus scolarisé, faute de place. En l'absence de réponses apportées à ses parents, je demande à Mme la ministre déléguée de se saisir de son dossier.
Auteur : M. Emmanuel Blairy
Type de question : Question orale
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Personnes en situation de handicap
Ministère répondant : Personnes en situation de handicap
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 novembre 2024