Encadrement des nouvelles pratiques esthétiques
Question de :
Mme Louise Morel
Bas-Rhin (6e circonscription) - Les Démocrates
Mme Louise Morel appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la nécessité de réformer la régulation du marché de l'esthétique. Le secteur de l'esthétique, bien qu'en plein essor demeure largement ignoré par le législateur, avec des règles de régulation qui ne correspondent plus aux évolutions des techniques de soins. L'article L. 121-1 du code de l'artisanat stipule que les soins esthétiques « ne peuvent être exercés que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci » mais aucune définition légale ou réglementaire n'existe quant à ce que recouvrent précisément les « soins esthétiques ». Cette absence de définition a des conséquences importantes pour les professionnels du secteur, notamment ceux titulaires d'un CAP ou d'un BP, qui se retrouvent confrontés à une forte imprévisibilité juridique. Cette situation est d'autant plus problématique que l'apparition de nouvelles technologies dans le domaine de l'esthétique a progressivement brouillé la frontière entre médecine esthétique et soins esthétiques. La confédération nationale artisanale des instituts de beauté propose l'adoption d'une définition légale des soins esthétiques, incluant notamment les actes de destruction du tégument et d'effraction cutanée limitée à l'épiderme, comme cela est prévu dans le cadre du règlement européen (CE) n° 1223/2009 sur les produits cosmétiques. Face à l'essor de ces nouvelles pratiques, 76 % des professionnels utilisent des dispositifs dits « technologiques », pour lesquels l'absence d'encadrement juridique est source d'insécurité. Ces dispositifs, coûteux, représentent des investissements lourds pour une profession majoritairement artisanale, d'autant que l'imprécision sur les compétences autorisées et l'absence de cadre légal clair entraînent des risques financiers pour les praticiens. Elle souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement envisage pour établir un cadre juridique stable et adapté au secteur de l'esthétique, prenant en compte les évolutions technologiques récentes et garantissant à la fois la sécurité des consommateurs et la pérennité de la profession.
Réponse publiée le 3 juin 2025
Le Gouvernement porte la plus grande attention à la situation des professionnels de l'esthétique et à la nécessité de mieux définir les périmètres d'intervention et qualifications professionnelles dans ce secteur. La qualification professionnelle relative au secteur de l'esthétique est prévue à l'article L. 121-1 du code de l'artisanat qui précise en son point 5° que ne peuvent être exercés que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci « les soins esthétiques à la personne autres que médicaux et paramédicaux et les modelages esthétiques de confort sans finalité médicale ». Les pratiques esthétiques sont caractérisées par une pluralité d'acteurs, de prestations et le recours à des appareils esthétiques innovants. Les pratiques réalisées par les esthéticiens se développent, à côté des simples prestations de bien-être ne nécessitant pas de qualification professionnelle et de la médecine esthétique. Le cadre législatif et réglementaire applicable (code de la santé publique, code de l'artisanat notamment) est ancien et ne permet pas d'établir une définition précise des soins esthétiques. Il ne prend pas non plus en compte l'émergence de nouvelles pratiques sur le marché de l'esthétique et leur impact sur les périmètres d'intervention relevant des soins esthétiques et de la médecine esthétique. En l'état du droit en vigueur, les pratiques impliquant une effraction cutanée nécessitent une intervention médicale, au regard du principe de l'inviolabilité du corps humain posé par le code civil. Ainsi, la pratique du microneedling, dès lors qu'elle implique une effraction cutanée, est interdite aux esthéticiens, comme rappelé sur le site internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). En effet, l'association de la perforation de la peau avec des cosmétiques ne peut pas être considérée comme anodine et il n'existe actuellement aucune expertise publique permettant de corroborer l'absence de risque du microneedling pour la santé. En revanche, l'épilation au laser et à la lumière pulsée a été récemment ouverte aux esthéticiens ainsi qu'aux infirmiers, au regard notamment d'un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). Cette libéralisation s'est traduite par un cadre réglementaire spécifique introduit dans le code de la santé publique par le décret n° 2024-470 du 24 mai 2024 relatif aux actes d'épilation à la lumière pulsée intense et au laser à visée non thérapeutique et l'arrêté du 19 février 2025 relatif aux caractéristiques de la formation obligatoire pour la réalisation des actes d'épilation à la lumière pulsée intense ou au laser à visée non thérapeutique. Une communication sur les sites internet du ministère de la santé et de la DGCCRF a veillé à rendre les règles de qualification professionnelle les plus transparentes possibles tant à l'égard des professionnels du secteur que des consommateurs. La redéfinition des soins esthétiques, intégrant l'apparition de nouvelles pratiques sur le marché et des évolutions technologiques, nécessite une démarche coordonnée des administrations avec une concertation des représentants des professionnels concernés, au regard des enjeux économiques pour les professionnels et de sécurité pour les usagers. Ce travail de fond sur le périmètre des pratiques et la qualification des professionnels de l'esthétique est un préalable indispensable avant d'envisager toute modification des textes en vigueur. Il s'agit d'un travail d'ampleur, qui ne saurait se résumer à une seule mesure mais doit porter une vision systémique des pratiques esthétiques actuelles et futures et des lignes de partage entre esthéticiens et médecins esthétiques. https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/les-fiches-pratiques/faq-encadrement-des-soins-esthetiques-et-de-la-coiffure https://www.anses.fr/fr/system/files/AP2019SA0124Ra.pdf
Auteur : Mme Louise Morel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 22 avril 2025
Réponse publiée le 3 juin 2025