Nomination des notaires
Question de :
M. Ian Boucard
Territoire de Belfort (1re circonscription) - Droite Républicaine
M. Ian Boucard appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la particularité de la nomination des notaires et des commissaires de justice des départements du Rhin et de la Moselle. Dans ces départements, les charges ne sont pas vénales et leur nomination a lieu sur proposition d'une commission dite de présentation supposée n'être que consultative dans les textes qui en fixent les règles. À la lecture du rapport de l'Inspection générale de la justice (IGJ) n° 014-19 d'avril 2019, du rapport de la direction des affaires civiles et du sceaux sur la réintroduction du droit de présentation de 2006, de la remise au Parlement du rapport prévu à l'article 52 de la loi croissance et activité dont les conclusions rejoignent celles de l'Autorité de la concurrence, notamment à l'extension de la liberté d'installation des notaires en Alsace et en Moselle, ce système est décrié (cf. rapport de l'IGJ d'avril 2019 précité, notamment page 31 : « 2.2.2 Une commission de présentation qui ne donne pas pleine satisfaction » ou page 38 : « C. Les SCP, une atteinte au principe de la non-patrimonialité des offices »). Ce constat est ancien ; en 2004, M. Bernard Legras, procureur général près la Cour d'appel de Colmar écrivait en parlant des sociétés de notaires en Alsace-Moselle : « Le système n'a pas empêché la constitution de forteresses, de SCP extrêmement puissantes qui pratiquent sans complexe la cooptation et l'hérédité »(cf. rapport de la direction des affaires civiles et du sceaux précité). En outre, la suppression de ce système décrié et la réintroduction du droit de présentation pour les notaires et les commissaires de justice, entraînera un paiement à l'État chaque fois que le cédant n'aura pas payé la finance de l'office, d'une part et d'autre part des droits de mutation sur la cession ultérieure du droit de présentation ainsi qu'en cas de décès des droits de mutation à titre gratuit. Enfin, cette réintroduction supprimerait une inégalité entre les notaires et les commissaires de justice qui sont obligés d'acquérir un droit de présentation pour exercer et ceux qui exercent dans un office mis à disposition gracieusement. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il entend supprimer la non-vénalité des charges en Alsace-Moselle.
Réponse publiée le 10 décembre 2024
La procédure de nomination sur office vacant dans les départements du Bas-Rhin, du Haut Rhin et de la Moselle, prévue par les articles 110 à 120 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire diffère de celle applicable en dehors de ces départements en raison des spécificités du droit local. La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques n'est ainsi pas applicable aux départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. En l'absence de patrimonialité des offices et de droit de présentation corrélatif, les diplômés notaires doivent passer les épreuves d'un concours professionnel pour pouvoir être nommés dans un office vacant ou créé. En cas de vacance d'un office, seuls les notaires en fonction dans les ressorts des cours d'appel de Colmar et de Metz et les lauréats du concours propre à l'Alsace-Moselle peuvent se porter candidat. Les dispositions du décret du 5 juillet 1973 précité et du décret n° 2024-873 du 14 août 2024, relatif à l'exercice en société de la profession de notaire, prévoient une procédure particulière pour les nominations de notaires impliquant une consultation préalable d'une commission de présentation. Cette commission propose les candidats par ordre de préférence à l'agrément du garde des sceaux conformément à l'article 119 du décret du 5 juillet 1973 précité. En effet, en vertu de ce texte, « pour chaque office à pourvoir, la commission propose les candidats par ordre de préférence à l'agrément du garde des sceaux, ministre de la justice. Les propositions doivent porter sur deux noms au moins lorsque le nombre total des candidatures qui se sont manifestées est inférieur ou égal à quatre, et sur trois noms lorsque le nombre total de ces candidatures est supérieur à quatre. En aucun cas les propositions ne peuvent porter sur plus de trois noms. ». En sa qualité d'autorité de nomination, le garde des sceaux peut soit nommer l'un des candidats proposés, soit ne retenir aucune des candidatures. Si le garde des sceaux ne retient aucune des candidatures proposées, la commission de présentation peut de nouveau être saisie de nouvelles candidatures pour formuler de nouvelles propositions. Les réflexions initiées sur la question d'une adaptation du dispositif prévu par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ont vocation à se poursuivre.
Auteur : M. Ian Boucard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions judiciaires et juridiques
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 10 décembre 2024