Scrutin proportionnel
Question de :
Mme Émilie Bonnivard
Savoie (3e circonscription) - Droite Républicaine
Question posée en séance, et publiée le 21 mai 2025
SCRUTIN PROPORTIONNEL
Mme la présidente . La parole est à Mme Émilie Bonnivard.
Mme Émilie Bonnivard . Il n'y a pas de grand pays, de grande économie, de grand progrès, sans stabilité politique. Le général de Gaulle l'a bien compris, lui qui, après les affres de l'instabilité dans laquelle la IVe République a plongé notre pays, a décidé de l'en sortir en supprimant l'élection des députés à la proportionnelle.
M. Erwan Balanant . C'était fait depuis 1946 !
Mme Émilie Bonnivard . Qu'attendent de nous les Français aujourd'hui ? Qu'on règle leurs problèmes : pouvoir d'achat, valorisation du travail, sécurité, santé et immigration. Et vous, que proposez-vous ? Une loi pour rétablir la proportionnelle. Nous n'avons pas le même sens des priorités !
M. Thibault Bazin . C'est clair !
Mme Émilie Bonnivard . Non, sur le terrain, je n'entends pas nos concitoyens réclamer à cor et à cri le retour de la proportionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe EPR.) En revanche, je les entends bien dire leur colère face au spectacle qui se joue à l'Assemblée : bordélisation permanente, tensions croissantes et, surtout, incapacité, faute de majorité claire, à avancer sur ces sujets prioritaires et urgents qui les concernent.
C'est cela que vous voulez consacrer dans la loi avec la proportionnelle ? Vous condamneriez notre pays à l'impuissance et à la paralysie politiques, sous couvert de représentativité démocratique, mais en réalité pour assurer la survie des partis et des intérêts partisans. Car soyons clairs : ce que nous vivons ici depuis trois ans, c'est la proportionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – Mme Danielle Brulebois applaudit aussi.)
Par ailleurs, en quoi des députés qui ne seront pas élus sur leur nom mais choisis par leur parti, qui n'auront aucun ancrage territorial et aucun compte à rendre à leurs concitoyens, seraient-ils plus démocratiques ? Une chose est sûre : ils répondront d'abord bien plus aux intérêts de leur parti qu'à ceux de nos concitoyens.
La Droite républicaine, autour de Laurent Wauquiez, s'opposera fermement à cette réforme. Cette impasse institutionnelle nourrit déjà le désarroi de nos concitoyens, qui attendent autre chose de nous. Nous voterons contre l'impuissance politique et la déresponsabilisation des députés à l'égard de leurs électeurs. Nous ne voterons pas la condamnation de la Ve République. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR, ainsi que sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.
Un député du groupe RN . Il a peur de disparaître !
M. Patrick Mignola, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement . Nous ne partageons pas les mêmes convictions sur ces questions de modes de scrutin. Vous nous interrogez sur les concertations entamées par le premier ministre avec l'ensemble des familles politiques qui composent cet hémicycle. Au fond, vous posez la question de la temporalité : est-il trop tôt, trop tard, pour changer de mode de scrutin ? Y a-t-il d'autres priorités ? Oui, absolument, il y a des priorités pour les Français, mais nous considérons, au sein de ce gouvernement, que sur les centaines d'heures que dure le débat parlementaire, nous pouvons en consacrer quelques-unes à la revitalisation de notre démocratie.
M. Sylvain Maillard . Il a raison !
M. Patrick Mignola, ministre délégué . Nous l'avons bien fait pour la loi Paris-Lyon-Marseille ou celle portant sur le mode de scrutin dans les communes de moins de 1 000 habitants.
Mme Justine Gruet . C'était une erreur, d'ailleurs !
M. Patrick Mignola, ministre délégué . Nous pouvons régulièrement constater que notre démocratie en a besoin, parce qu'elle s'use si on ne la revitalise pas de temps en temps. En l'occurrence, je voudrais rappeler quelques éléments, alors que nous fêtons le sixième anniversaire du grand débat national. Vous évoquiez tout à l'heure ce qu'attendaient les Français : le scrutin proportionnel figurait tout en haut des priorités de ceux qui y ont participé après la crise des gilets jaunes. Un certain nombre de textes ont été présentés au sein de cette assemblée, mais ils n'ont jamais pu être examinés.
Vous parliez aussi de stabilité et de proximité. D'autres chambres parlementaires, à commencer par le Sénat en France, recourent à la proportionnelle : ce sont des lieux où la proximité et la stabilité règnent.
M. Thibault Bazin . Pas sur les ronds-points !
Mme Marie-Charlotte Garin . La proximité des sénateurs ? Il ne faut pas exagérer !
M. Patrick Mignola, ministre délégué . Enfin, pour reprendre le mot de la présidente de l'Assemblée nationale, selon laquelle nous avons déjà les effets de la proportionnelle mais nous pourrions en expérimenter les bienfaits, je crois que si l'Assemblée avait été élue à l'élection proportionnelle, vous auriez su les uns et les autres, à l'avance, qu'il fallait construire des coalitions, des alliances et des compréhensions communes – la République ne s'en porterait que mieux au quotidien. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Auteur : Mme Émilie Bonnivard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Relations avec le Parlement
Ministère répondant : Relations avec le Parlement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 mai 2025