Naturalisation des étrangers
Question de :
Mme Léa Balage El Mariky
Paris (3e circonscription) - Écologiste et Social
Question posée en séance, et publiée le 7 mai 2025
NATURALISATION DES ÉTRANGERS
Mme la présidente . La parole est à Mme Léa Balage El Mariky.
Mme Léa Balage El Mariky . Monsieur le ministre de l'intérieur, au moment même où la nation a besoin d’être rassemblée, vous la divisez. Alors qu’il faut réaffirmer la force de notre République, vous l’affaiblissez. Vous avez adressé aux préfets une circulaire sur le sort des étrangers en France – votre outil préféré, sur votre sujet favori. Ce 2 mai, vous avez choisi de corseter l’accès à la nationalité française alors que le droit actuel est déjà très restrictif. Vous imposez des critères absurdes : une maîtrise rigide de la langue – telle que certains, dans cet hémicycle, échoueraient à vos tests ; un CDI, dans un pays rongé par le chômage ; l’exclusion de celles et ceux qui vivent des prestations sociales, alors que l'on ne mesure jamais l’amour d’un pays à l’épaisseur d’un portefeuille. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe SOC.)
Votre circulaire aura pour seul résultat de séparer des familles et d'humilier des personnes qui vivent ici et qui aspirent à contribuer à la vie de notre pays. Vous créez une hiérarchie d'appartenance, non pour servir la France et la République, mais pour servir votre ambition politique. (Mêmes mouvements.) Vous instrumentalisez la nationalité comme un outil d’exclusion pour parler à votre électorat et pour exister dans votre propre camp. Mais notre vieille nation a besoin d’esprit de concorde pour résister au vent mauvais qui souffle en Europe et dans le monde. Elle a besoin de fraternité, pas de suspicion, d’unité, pas de distinction entre ses enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)
Vous voulez gouverner par la peur, ce carburant politique pratique qui sert à masquer votre impuissance. On ne protège pas la République en suspectant celles et ceux qui souhaitent y entrer par conviction. Nous devrions être fiers que des femmes et des hommes choisissent la France. La naturalisation n’est pas une faiblesse : c’est le rayonnement même de notre République. (Mêmes mouvements.)
M. Julien Odoul . Il serait temps d'écouter les Français !
Mme Léa Balage El Mariky . Allez-vous persister dans l’exclusion ou mettrez-vous enfin votre énergie au service de la promesse républicaine ? Ferez-vous honneur à votre mission : assurer la cohésion de la nation ? Ce choix déterminera votre place dans l’histoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur . Je ne cherche pas une place dans l'histoire (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP), mais à appliquer notre droit et à faire en sorte que celles et ceux qui veulent devenir français le soient pleinement. Je revendique la circulaire que vous évoquez comme une circulaire d'assimilation, conformément à l'article 21-24 du code civil qui dispose que « nul ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française ». Être français, c'est adopter les valeurs de la République. Notre République n'est pas ethnique, mais civique. (Exclamations sur les bancs des groupes SOC et EcoS.) On ne devient pas français par hasard.
M. Alexis Corbière . Mais, monsieur Retailleau, vous êtes français par hasard ! Ce que vous dites est absurde !
M. Bruno Retailleau, ministre d'État . En 1984, le Conseil d'État avait d'ailleurs indiqué que devenir français par la voie de la naturalisation était une chance et non un droit. Lorsque l'on veut devenir français, on doit montrer qu'on est capable de faire des efforts, que l'on n'a pas enfreint le droit, que l'on n'est pas entré irrégulièrement sur le territoire, que l'on connaît la langue. La loi « immigration » adoptée par le Parlement…
M. Thibault Bazin . Elle a été censurée par le Conseil constitutionnel !
M. Bruno Retailleau, ministre d'État . …a rehaussé de B1 à B2 le niveau de français exigé pour obtenir un droit de séjour. Il serait paradoxal qu'il soit plus facile d'obtenir un droit de séjour en France qu'une carte d'identité française. De même, la connaissance de notre histoire et de notre culture sera vérifiée lors d'un examen civique. Enfin, un étranger doit justifier d'un travail : cette régularisation dit ce que nous sommes. Entrer dans la République française n'est pas une question de croyance ou d'origine, c'est une question d'adhésion à nos valeurs. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
Mme Sophie Taillé-Polian . Cela n'a rien à voir avec le fait d'avoir un CDI !
M. Bruno Retailleau, ministre d'État . Voilà précisément ce que rappelle la circulaire.
M. Alexis Corbière . Un royaliste ne peut pas être français ?
Mme la présidente . La parole est à Mme Léa Balage El Mariky.
Mme Léa Balage El Mariky . Avec cette circulaire, ce sont les valeurs de la République que vous piétinez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)
Auteur : Mme Léa Balage El Mariky
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mai 2025