Question écrite n° 6385 :
Stop au bio importé dans les cantines, soutenons l'agriculture française !

17e Législature

Question de : M. Aurélien Dutremble
Saône-et-Loire (3e circonscription) - Rassemblement National

M. Aurélien Dutremble interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les contradictions de la loi EGALIM avec les objectifs de souveraineté alimentaire, en particulier concernant l'importation croissante de produits biologiques dans la restauration collective. Depuis le 1er janvier 2022, la loi EGALIM impose à la restauration collective publique de proposer au moins 50 % de produits durables ou sous signes de qualité, dont 20 % issus de l'agriculture biologique. Derrière une ambition louable, la mise en œuvre sur le terrain révèle en réalité une série de dérives inquiétantes. De nombreuses collectivités, confrontées à des contraintes budgétaires et à l'absence de filières bio françaises suffisantes, sont contraintes de recourir à des produits bio importés, souvent moins chers mais ne répondant pas aux standards environnementaux et sociaux exigés en France. Selon l'Agence Bio, plus de 33 % des produits biologiques consommés en France sont aujourd'hui importés. Dans certaines cantines, cette part dépasserait 50 %, ce qui constitue une distorsion de concurrence évidente pour les producteurs français au seul bénéfice de pays avec qui l'Union européenne a signé des accords d'équivalence, comme l'Argentine, la Corée du Sud, le Kenya ou le Mexique. Dans le même temps, l'agriculture biologique française est en crise : les surfaces cultivées en bio ont reculé de 2 % en 2023 (soit plus de 54 000 hectares), les conversions ont chuté de 30 % et plus de 3 000 producteurs ont abandonné leur certification. Cette dynamique alarmante va à l'encontre des objectifs affichés par le Gouvernement en matière de transition agricole et de souveraineté alimentaire. Dans ce contexte préoccupant, M. le député souhaite connaître : la part estimée des produits bio importés dans l'approvisionnement des cantines publiques depuis l'entrée en vigueur des seuils EGALIM ; les mesures envisagées pour privilégier l'origine France dans la commande publique, notamment en restauration scolaire ou hospitalière ; si le Gouvernement envisage d'adapter les critères d'éligibilité EGALIM pour mieux valoriser les productions locales de qualité, même si elles ne bénéficient pas de certification labélisée. Enfin, il souligne qu'une politique alimentaire ambitieuse doit allier qualité, proximité et soutien à l'agriculture française.

Réponse publiée le 15 juillet 2025

La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi « EGALIM », a introduit l'obligation d'atteindre, depuis le 1er janvier 2022, une part au moins égale, en valeur à 50 % de produits durables et de qualité, tels que définis par la loi et le décret d'application, dans les repas servis dans les restaurants collectifs rendant un service public, les produits biologiques devant représenter une part au moins égale, en valeur, à 20 %. La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat et résilience », a complété ces dispositions en ajoutant, depuis le 1er janvier 2024, l'obligation de 60 % de viandes et poissons de qualité et durables (taux porté à 100 % pour les restaurants collectifs de l'État) et en étendant ces objectifs à tous les restaurants collectifs, publics et privés. Cette loi a également introduit une nouvelle catégorie « EGALIM » de produits durables et de qualité, comptabilisable au titre des 50 %, pour des « produits dont l'acquisition a été fondée, principalement, sur les performances en matière de protection de l'environnement et de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, dans le respect des règles du code de la commande publique ». Par conséquent, la loi n'impose pas de proposer une part de produits locaux, ce qui serait contraire aux principes constitutionnels de la commande publique (liberté d'accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats rappelés à l'article L. 3 du code de la commande publique) et aux principes de non-discrimination et de liberté de circulation des personnes, des capitaux et des services énoncés dans les traités de l'Union européenne. Néanmoins, la volonté du Gouvernement et des organisations gestionnaires de restaurants collectifs, en particulier les collectivités territoriales, est bien d'assurer la souveraineté alimentaire dans des périmètres territoriaux en adéquation avec les filières de production et dans un objectif de qualité des produits, de soutien de l'économie agricole des territoires, de réduction de l'impact environnemental des filières et de sécurisation des approvisionnements en produits vivriers. En outre, la restauration collective accentue ses efforts concernant les approvisionnements en produits biologiques depuis 2022. En effet, dans le rapport au Parlement n° 29 (2024-2025) (https://ma-cantine-1.gitbook.io/ma-cantine-egalim/rapports-du-gouvernement-au-parlement) présentant le bilan statistique EGALIM 2024, il est noté une légère progression du taux en produits biologique, de 13,8 % à 14 % pour les restaurants collectifs qui avaient télédéclaré leurs achats sur la plateforme « ma cantine », lors des campagnes de télédéclaration 2023 et 2024. Par ailleurs, l'agence Bio publie sur son site internet (https://www.agencebio.org/vos-outils/les-chiffres-cles/observatoire-de-la-consommation-bio/) une évolution positive des ventes de produits alimentaire bio en restauration collective entre 2022 et 2023 (+ 8,8 %), deuxième circuit de distribution en termes d'évolution favorable des ventes après la restauration commerciale. La plateforme « ma cantine » étant encore en phase de déploiement auprès des 80 000 restaurants collectifs sur le territoire national, les données recueillies lors des campagnes de télédéclaration ne permettent pas, à ce stade, d'avoir l'information croisée de l'origine des produits par catégorie de produits EGALIM ou par famille de produits. Pour autant, la sélection et la comptabilisation de produits locaux ou nationaux au titre des produits « EGALIM » est possible grâce à la mobilisation de la catégorie introduite par la loi Climat et résilience déjà citée, impliquant l'utilisation conjointe des deux critères : « performances environnementales » et « développement des approvisionnements directs », dans le cadre de marchés publics ou appels d'offre. Pour accompagner les acteurs de la restauration collective dans la mise en place de stratégies d'achats et de mobilisation de toutes les catégories EGALIM, des guides ont été produits dans le cadre des travaux du conseil national de la restauration collective (CNRC) et sont diffusés sur la plateforme « ma cantine ». Enfin, l'article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), modifié par la loi Climat et résilience, indique que les gestionnaires de restaurants collectifs doivent développer « l'acquisition de produits dans le cadre des projets alimentaires territoriaux définis à l'article L. 111-2-2 » du même code. Ces projets alimentaires territoriaux (PAT), très majoritairement pilotés par des collectivités territoriales, sont des vecteurs opérationnels permettant le rapprochement des producteurs, transformateurs et distributeurs de denrées avec les consommateurs et notamment les acheteurs de la restauration collective, sur un territoire. Ainsi, la mise en œuvre des techniques indiquées ci-avant, pour permettre la candidature et sélection de fournisseurs locaux et nationaux aux marchés publics (sourcing et allotissement), est facilitée dans le cadre d'un PAT. Fin 2024, près de 450 PAT (https://agriculture.gouv.fr/projets-alimentaires-territoriaux-reconnus-par-le-ministere) labellisés par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire étaient opérationnels ou en phase d'émergence sur le territoire national.

Données clés

Auteur : M. Aurélien Dutremble

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 6 mai 2025
Réponse publiée le 15 juillet 2025

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