Responsabilité élargie des producteurs dans le secteur du bâtiment
Question de :
Mme Isabelle Rauch
Moselle (9e circonscription) - Horizons & Indépendants
Mme Isabelle Rauch appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur les dysfonctionnements observés dans l'application de la responsabilité élargie du producteur (REP) appliquée au secteur du bâtiment, mise en œuvre depuis mai 2023, conformément aux dispositions de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (loi AGEC). À l'heure actuelle, les entreprises du bâtiment déplorent être mises à contribution pour un service quasi-inexistant. En 2024, la performance de collecte des déchets de catégorie 1 (gravats, tuile, béton) était identique à la situation qui prévalait avant la mise en place de la REP. Quant aux déchets de catégorie 2 (bois, métal, plâtre, menuiserie), seuls 7 % ont pu être repris. Si les points de collecte sont plutôt bien déployés sur le territoire, leur accès en revanche est restrictif et ne concerne que 20 % des volumes de déchets. Pour les 80 % restants, la collecte directe sur chantier ou en entreprise semble demeurer au stade embryonnaire. La REP du bâtiment fait l'objet de multiples dysfonctionnements qui ne répondent pas aux engagements de départ, à savoir, une reprise gratuite et facile des déchets de chantier en contrepartie d'une taxe sur les produits et matériaux. La gestion de cette REP paraît poser un véritable problème de transparence, ce qui inquiète les entreprises, soumises à la contribution, qui n'ont aucune visibilité sur l'usage des fonds, ni sur la ventilation des écocontributions par type de déchets. De plus, les hausses tarifaires successives qui ne semblent parfois pas justifiées, compliquent fortement l'intégration de ces coûts dans les devis qui sont souvent contractualisés des mois à l'avance par les entreprises. Un moratoire a été annoncé à la mi-mars 2025 par le Gouvernement, ainsi qu'une promesse de refondation du dispositif. Dans ce contexte, Mme la députée souhaite savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement entend prendre pour garantir une mise en œuvre efficace, équitable et transparente de la REP du bâtiment ; si une réforme structurelle du dispositif, incluant un pilotage renforcé et une meilleure représentativité des professionnels du secteur, est envisagée dans le cadre de la refondation annoncée. Elle lui demande aussi la forme selon laquelle seront associées les organisations représentatives du bâtiment aux arbitrages à venir, notamment pour garantir que l'éco-contribution s'accompagne d'un véritable service sur l'ensemble du territoire.
Réponse publiée le 24 juin 2025
La filière à responsabilité élargie des producteurs a été créée dans la loi AGEC de février 2020 pour répondre à trois objectifs. Le premier objectif consiste à développer le recyclage des déchets de bâtiment, le secteur du bâtiment et des travaux publics étant la première filière économique productrice de déchets en France. Le deuxième objectif consiste à lutter contre les dépôts sauvages, notamment en créant un réseau de points de collecte afin que les artisans du bâtiment puissent déposer les déchets triés au plus près de leurs chantiers. Le troisième objectif portait sur le développement de l'écoconception des produits et matériaux de construction, afin d'en faciliter leur réemploi ou leur recyclage. Cette filière était très attendue par de nombreuses parties prenantes, notamment les collectivités territoriales qui supportent aujourd'hui une partie des coûts de gestion des déchets du bâtiment, y compris, pour nombre d'entre elles, des déchets amenés par des professionnels. En outre, elles doivent faire face au phénomène des dépôts sauvages qui leur coûte environ 400 millions d'euros par an. Le déploiement de cette filière repose sur un principe de reprise gratuite des déchets lorsqu'ils sont triés, et le développement d'un maillage resserré de points de collecte de proximité accessibles à tout détenteur, qu'il soit un particulier ou un professionnel du bâtiment. Pour assurer cette reprise sans frais, les éco-organismes ont l'obligation de soutenir financièrement les opérateurs qui assurent d'ores et déjà la collecte de ces déchets, afin de couvrir les coûts qu'ils supportent pour ces opérations. Ces soutiens financiers sont apportés à toute personne qui en fait la demande, sans discrimination, dès lors que cette personne accepte les clauses des contrats-types qui ont été élaborés par les éco-organismes. Les objectifs de déploiement de la filière à responsabilité élargie du bâtiment étaient particulièrement ambitieux à sa création. Toutefois, sa mise en œuvre a rencontré un certain nombre de difficultés qui ont ralenti le processus de déploiement des points de collecte, ce qui a pu générer une certaine forme de frustration pour les artisans du bâtiment. Dans le même temps, les fournisseurs de produits de construction ont répercuté sur leurs clients le montant des éco-contributions versées par les metteurs en marché initiaux de ces produits. Face aux préoccupations exprimées sur le sujet, la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche a annoncé un moratoire sur les mesures qui devaient entrer en vigueur en 2025 et lancé une grande consultation de l'ensemble des acteurs de la filière. La question du recyclage et de la valorisation de la reprise des déchets de bois est une question particulièrement prégnante. Des entretiens ont eu lieu au mois de mai pour discuter des propositions exprimées par les différents acteurs. La ministre annoncera le périmètre exact du moratoire et les orientations ayant vocation à structurer la refonte du cahier des charges d'ici à l'été. L'objectif est de mettre en place le nouveau cahier des charges avant la fin de l'année.
Auteur : Mme Isabelle Rauch
Type de question : Question écrite
Rubrique : Bâtiment et travaux publics
Ministère interrogé : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche
Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche
Dates :
Question publiée le 13 mai 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025