Question de : Mme Laure Lavalette
Var (2e circonscription) - Rassemblement National

Mme Laure Lavalette interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la situation préoccupante de la transparence et du traçage des produits et plus particulièrement sur la l'intensification des actes de contrefaçons et la multiplication des secteurs touchés par celle-ci. Les 6 février, 31 mars et 5 avril 2025, des centaines d'articles allant des vêtements de marques, aux cigarettes en passant par les chaussures contrefaites ont été saisis dans trois magasins distincts de la ville de Toulon. Dans le même temps, un réseau organisé était condamné au tribunal de Toulon pour avoir vendu à prix d'or des bouteilles de vins de basse qualité en les garantissant comme des grands crus classés. Ces actes interdits au titre de l'article L. 716-9 du code de la propriété intellectuelle représentent une menace grave tant du point de vue du consommateur que de celui du producteur. Ces actes viennent concurrencer de manière déloyale la production nationale, provoquant une perte de près de 98 500 emplois et une perte financière estimée de 9 milliards d'euros. De plus, la France est le deuxième pays avec le plus de contrefaçons, celles-ci représentent en valeur 17 % de la propriété intellectuelle. Bien que les vêtements, les chaussures et la maroquinerie soient les éléments les plus contrefaits (51 % de la valeur totale), certaines données demeurent préoccupantes, notamment avec les contrefaçons d'équipements médicaux et de médicaments, qui représentent 7 % de la valeur totale contrefaite et qui sont une véritable menace pour les citoyens, sur lesquels pèsent de graves risques de santé publique. Elle lui demande donc quelles mesures le Gouvernement envisage pour lutter pour l'amplification de ce phénomène et comment le Gouvernement compte protéger les producteurs et les consommateurs français.

Réponse publiée le 17 juin 2025

Le Gouvernement partage le constat sur le caractère préoccupant du phénomène de la contrefaçon. L'année 2024 a marqué un nouveau record en matière de contrefaçons saisies par la Douane avec 21,47 millions d'articles (hausse pour la 5ème année consécutive).  Il s'agit donc d'un phénomène massif et d'autant plus préoccupant qu'il concerne toutes les catégories de marchandises. La contrefaçon constitue en effet une menace directe pour la santé et la sécurité des consommateurs (qu'il s'agisse de contrefaçons de jouets, de produits alimentaires et de médicaments, de produits cosmétiques, ou encore de pièces mécaniques automobiles). Elle pèse également sur l'emploi et le budget des Etats et a un impact sur l'environnement. Enfin, il existe une porosité entre les différents types de trafics (contrefaçons associées à la découverte d'armes, de stupéfiants, d'infractions de blanchiment, etc.), auxquels la contrefaçon contribue financièrement.  Les enjeux qui s'attachent à la lutte anti-contrefaçon sont donc multiples et sont pris en compte par le Gouvernement, dans le cadre notamment d'une stratégie nationale déployée par la Douane et d'un plan d'action spécifique. En effet, la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) a élaboré en 2023 un plan d'action national anti-contrefaçons pour la période 2024-2026, résolument orienté vers l'identification et le démantèlement des réseaux organisés de fraude, ainsi que vers la prévention et la répression des trafics de contrefaçons sur Internet et les réseaux sociaux.  La stratégie de la DGDDI repose sur deux piliers : retirer du marché le plus de marchandises possibles, notamment en intensifiant les contrôles dans le fret express et postal ou sur internet, et développer des investigations permettant d'identifier et de démanteler les réseaux. Les chiffres des saisies et les succès de la douane montrent indubitablement que cette stratégie est efficace. Néanmoins, les modes opératoires des organisations criminelles sont variés, complexes et innovants. Elles utilisent, en outre, tous les canaux de distribution possibles. L'essor du e-commerce est, à ce titre, un enjeu majeur qui se traduit par une augmentation considérable de la volumétrie des marchandises traitées par les plateformes. En 2024, ce sont près de 800 millions de petits colis qui sont entrés sur notre territoire, représentant, pour la plateforme de Roissy, une hausse des déclarations en douane de 50 % entre 2023 et 2024. La DGDDI développe des méthodes d'action dans le fret express (retrait rapide des colis) ou sur les sites de vente en linge (partenariats avec les plateformes) afin de retirer un maximum d'articles du marché avant leur distribution. Un réseau local de cybersurveillance douanière a également été déployé. Ce réseau comprend des cyberdouaniers formés à la lutte contre la fraude sur Internet. Au niveau national, le service spécialisé "Cyberdouane" est particulièrement en charge d'enquêter sur tous types de fraudes et sur tout intermédiaire de revente (plateformes du e-commerce, sites indépendants, réseaux sociaux, etc.).  Par ailleurs, la loi n° 2023-610 du 18 juillet 2023 visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces confère aux agents des douanes une nouvelle procédure d'injonction de retrait de contenus illicites en lignes. Il s'agit de la possibilité de contraindre les plateformes en ligne à retirer les contenus qui ont constitué le moyen de commettre des délits douaniers (dont celui de la contrefaçon). Ce nouveau pouvoir figure dans un chapitre V bis du code des douanes dédié à la "Prévention des infractions commises au moyen d'Internet".  Pour lutter efficacement contre les organisations criminelles responsables de ces trafics, le volet financier est également pris en compte. La nouvelle stratégie de la DGDDI en matière de lutte contre les flux financiers illicites instaure l'obligation, pour les agents, de s'interroger systématiquement sur l'origine des fonds. L'objectif visé est le développement d'enquêtes pour blanchiment douanier lors de la découverte d'autres infractions douanières, notamment celles liées aux trafics de contrefaçons.  La Douane développe des investigations par ses services d'enquête spécialisés pour les affaires à forts enjeux et déploie en région des groupes opérationnels "anti-trafics" qui ont vocation à prendre en compte les groupes criminels de basse et moyenne intensité agissant localement. Des enquêtes judiciaires sont également conduites, en suite de constatation douanière, par le service d'enquêtes judiciares de la DGDDI, l'Office national antifraude (ONAF), chargé de poursuivre les investigations dans un cadre judiciare, particulièrement en matière de blanchiment, de trafics de contrefaçons et de contrebande de tabacs.  Enfin, la douane est engagée dans des actions de coopération nationales et internationales. Au niveau local, le cadre du groupe opérationnel national anti-fraude (GONAF) dédié à la lutte anti-contrefaçon, piloté par la DGDDI, permet un partenariat interministériel sous l'égide de la mission interministérielle de coordination anti-fraude (MICAF), visant à la fois un partage des connaissances du phénomène et le développement d'actions communes pour lutter plus efficacement. A titre d'exemple récent, l'opération interministérielle Coubertin, conduite à l'occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024, a mobilisé aux côtés de 3700 douaniers, des agents de la police nationale, de la gendarmerie nationale et de la DGCCRF et a permis la saisie de 135 000 articles. Ce format d'opération sera reconduit en 2025. Au niveau international, des actions sont conduites en lien avec l'OLAF ou EUROPOL. L'été dernier, à l'occasion des grands évènements sportifs, une opération d'envergure conduite sur 6 mois a permis de retirer du marché 630 000 contrefaçons dans l'UE. 

Données clés

Auteur : Mme Laure Lavalette

Type de question : Question écrite

Rubrique : Propriété intellectuelle

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 13 mai 2025
Réponse publiée le 17 juin 2025

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