Inauguration du nouveau siège de l'Église de scientologie à Saint-Denis
Question de :
M. Aurélien Saintoul
Hauts-de-Seine (11e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Aurélien Saintoul alerte M. le ministre de l'intérieur sur l'inauguration du nouveau siège de l'Église de scientologie à Saint-Denis. Il rappelle que ce mouvement est catégorisé comme une secte en France depuis trente ans et est placé sous surveillance de la Miviludes. Bien que son existence ne soit pas illégale, les pratiques de l'Église de scientologie sont vivement critiquées et elle est régulièrement accusée d'escroquerie ou de lavage de cerveau. En 2013, la Cour de cassation avait confirmé à son encontre une condamnation pour « escroquerie en bande organisée ». Cette implantation de l'Église de scientologie, à proximité du Stade de France et du futur village olympique, est une source de profonde consternation pour les riverains et, plus généralement, d'inquiétude à l'heure où le Parlement se prononce sur une loi contre les dérives sectaires. M. le député constate l'incohérence du Gouvernement, qui prétend lutter contre les dérives sectaires tout en ayant délaissé la Miviludes durant de nombreuses années et en accordant aujourd'hui un blanc-seing au prosélytisme de la scientologie. Il souligne également qu'en 2018, Emmanuel Macron recevait à l'Élysée Tom Cruise, l'un des plus fervents promoteurs de ce mouvement. Dans ce contexte, M. le député souhaite obtenir des éclaircissements sur la position du Gouvernement concernant cette installation. Comment l'Église de scientologie a-t-elle obtenu l'autorisation d'implanter un siège aussi imposant à quelques pas du Stade de France ? Quels sont les mécanismes de contrôle mis en place face à une telle situation ? Il lui demande enfin quelles mesures le Gouvernement envisage pour garantir l'absence de prosélytisme de cette organisation et protéger les concitoyens contre toute entreprise sectaire.
Réponse publiée le 19 novembre 2024
Conformément au principe de laïcité - essentiel en France -, la Miviludes s'interdit de porter quelque jugement de valeur que ce soit sur les doctrines, les théories ou les croyances en tant que telles, son objet étant par contre de dénoncer systématiquement des comportements qualifiés de « dérives sectaires » et de lutter contre elles. S'agissant de l'église de scientologie : il s'agit d'une organisation composite, dont la complexité du fonctionnement tient autant à l'implantation sur le territoire national de nombreuses entités dépendant d'elle que de l'interdépendance des structures juridiques exerçant en France, des structures juridiques à l'objet identique situées à l'étranger et des sièges européens et internationaux de chacune des branches de l'ensemble qui constitue la « Church of Scientology – International ». L'un des usages de ce mouvement est de convertir les personnes à l'occasion d'un test de personnalité gratuit, de la diffusion de tracts ou de brochures, de conférences « d'introduction » gratuites, de cours et d'étude de la Dianétique, la méthodologie d'apprentissage et de développement personnel créée par Ron Hubbard ou de toutes autres manifestations « culturelles » ou à « visée humanitaire ». Ces actions peuvent parfois être problématiques, dans la mesure où les liens avec l'église de scientologie n'apparaissent pas toujours sur les tracts, sur les stands ou dans les publicités maintenant très présentes sur Internet. L'approche analytique des risques de dérives sectaires des mouvements dont les agissements sont attentatoires aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ou constituent une menace à l'ordre public ou sont contraires aux lois et règlements conduit la Mission interministérielle à utiliser en particulier plusieurs « critères de dangerosité », qui ont été définis sur la base des travaux de plusieurs commissions d'enquête parlementaire et sur l'expérience de la Miviludes. En ce qui concerne la scientologie, les critères les plus éclairants sont notamment les risques de déstabilisation mentale, d'exigences financières exorbitantes, et de rupture avec l'environnement d'origine, notamment familial. Cette appréciation des risques est notamment fondée sur les principales condamnations judiciaires (liste non exhaustive) dont plusieurs organisations de la Scientologie ont fait l'objet en France. En effet, les procédures judiciaires concernant la scientologie ou de certains de ses dirigeants sont nombreuses depuis la condamnation, en 1978, en son absence, de son fondateur Lafayette Ron Hubbard, à quatre ans de prison pour escroquerie : – en 1997, la cour d'appel de Lyon confirme la condamnation de l'ancien président de la scientologie à Lyon, pour homicide involontaire, à la suite du suicide d'un adepte, et escroquerie ; – en 1999, cinq scientologues avaient été poursuivis et condamnés pour escroquerie par le tribunal de Marseille ; – en octobre 2013 la Cour de Cassation rejette le pourvoi et confirme la décision des juges du fond dans son intégralité, tant sur la procédure que sur les faits, menant ainsi à la condamnation de deux des principales structures françaises de la scientologie (l'« Association spirituelle Église de Scientologie – Celebrity Center » et sa librairie SEL), pour escroquerie en bande organisée, recel aggravé, extorsion, à des amendes d'un montant cumulé de 600 000 euros, de quatre de ses dirigeants à des peines d'emprisonnement avec sursis et des amendes pour les mêmes faits, et enfin de deux autres responsables à des peines d'amendes pour exercice illégal de la pharmacie. S'agissant du nouveau siège de l'église de scientologie, il y a lieu de rappeler que l'établissement du siège des associations n'est pas soumis à autorisation et que les services de l'État, en particulier la préfecture de Seine-Saint-Denis et la Miviludes, restent attentives à tous les faits nouveaux qui pourraient lui être rapportés. Tout fait de nature pénale susceptible d'être constaté sera en effet systématiquement transmis aux parquets à des fins de poursuites.
Auteur : M. Aurélien Saintoul
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sectes et sociétés secrètes
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 19 novembre 2024