Plan social à ArcelorMittal
Question de :
Mme Claire Lejeune
Essonne (7e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Claire Lejeune attire l'attention de M. le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie, sur la situation préoccupante du groupe ArcelorMittal, qui a annoncé récemment le licenciement de 636 salariés, marquant ainsi une nouvelle étape dans la destruction de la sidérurgie française. Cette décision intervient suite à la suspension de ses projets européens de décarbonation, incluant notamment le projet emblématique de fours à hydrogène à Dunkerque, malgré les 850 millions d'euros de subventions et le versement de 622 millions d'euros depuis 2013 par l'État. Par ailleurs, l'entreprise a choisi d'investir près d'un milliard de dollars dans une nouvelle usine aux États-Unis d'Amérique, plutôt qu'en Europe. Les actionnaires d'ArcelorMittal ont quant à eux empoché, au cours des trois dernières années, 6 milliards d'euros, au détriment des salariés et des sites industriels. Il apparaît que le Gouvernement, en ne prenant pas de mesures face à cette situation, semble permettre une dégradation du tissu industriel français, dans un secteur particulièrement stratégique pour la souveraineté économique. Face à cette situation, la nationalisation d'ArcelorMittal apparaît comme la seule solution viable pour garantir la pérennité des sites, des emplois et de la production d'acier en France. Elle lui demande donc les mesures qu'il envisage de prendre au regard de ces éléments, notamment en ce qui concerne la nationalisation du groupe ArcelorMittal, et si une telle décision serait envisagée pour préserver les emplois et la production industrielle d'acier en France, secteur éminemment stratégique.
Réponse publiée le 2 septembre 2025
L'industrie sidérurgique est un secteur stratégique pour l'économie de l'Union européenne, fournissant des intrants essentiels à nombre de secteurs – notamment l'automobile, l'énergie, la construction et la défense. Le Gouvernement est conscient de la situation préoccupante de la sidérurgie française et européenne, confrontée à plusieurs défis majeurs menaçant sa pérennité. Les coûts de production ont augmenté en raison de la hausse des coûts de l'énergie et du carbone, tandis que les prix ont chuté en raison des surcapacités mondiales, de la concurrence déloyale des pays-tiers et de la baisse de la demande. Aussi la production de l'Union européenne a-t-elle diminuée et l'utilisation actuelle des capacités est-elle inférieure aux niveaux de rentabilité. Cette situation nuit à la décarbonation des usines sidérurgiques européennes, plusieurs producteurs ayant interrompu leurs investissements dans des projets d'acier vert, à l'image d'ArcelorMittal à Dunkerque – dont le projet de décarbonation est pourtant une étape indispensable pour pérenniser son activité (i) et atteindre les objectifs nationaux de baisse des émissions de gaz à effet de serre (ii). Cette situation unique appelle la France à s'engager aux niveaux national et européen. Au niveau national, l'État est au rendez-vous pour soutenir les projets stratégiques d'investissements dans l'outil industriel. C'est dans cette perspective qu'a été signée en janvier 2024 une convention d'aide de 850 millions d'euros. Cette aide n'a pas encore été versée et est conditionnée à la commande effective des actifs stratégiques du projet, à savoir les fours à arc électrique et le réacteur de réduction directe du fer (DRP). Par ailleurs, pour permettre à ArcelorMittal et plus généralement aux industriels dits « électro-intensifs » d'accéder à une électricité compétitive, EDF développe, dans le cadre de l'accord conclu avec l'État en novembre 2023, une nouvelle politique commerciale basée sur des contrats de long terme d'environ 10 ans – lesquels sont négociés bilatéralement avec les industriels dans une logique de partage de risque. En janvier 2024, ArcelorMittal a ainsi annoncé avoir signé avec EDF une lettre d'intention relative à la conclusion d'un contrat d'allocation de la production, ce qui lui permettra de sécuriser ses approvisionnements futurs en électricité en France, et ce à un prix compétitif. Au niveau européen, le Gouvernement plaide pour des mesures urgentes visant à assurer des perspectives économiques claires et porteuses et à engager des investissements dès 2025. En octobre dernier, la France était à l'initiative de la réouverture de la mesure de sauvegarde afin d'améliorer la protection de la filière de l'acier européen. La Commission européenne a également été alertée sur la nécessité absolue d'élaborer un plan d'urgence pour l'acier européen. Ce plan a figuré parmi les priorités des 100 premiers jours du nouvel exécutif européen, en faveur d'une amélioration significative des instruments de défense commerciale. Il a été présenté par la Commission le 19 mars dernier. Le Gouvernement sera vigilant à ce que les mesures prises permettent de rétablir des conditions de concurrence équitables sur le marché européen de l'acier. Concernant la défense commerciale, la proposition de la Commission d'une protection « hautement efficace » est soutenue en considérant qu'il faut mettre en place, dès début 2026, un nouveau système de contingents tarifaires plus protecteur – dont l'objectif serait alors, en limitant la part des importations dans la consommation européenne autour de 15 %, de permettre à l'industrie européenne de retrouver des taux d'utilisation de capacités qui soient compatibles avec les besoins en matière d'investissement. En parallèle, et pour maintenir l'enjeu de la sidérurgie européenne sur le haut de la pile des priorités de l'Union européenne, le Gouvernement a été à l'origine d'un « Sommet européen pour une stratégie européenne autour de l'industrie de l'Acier » : l'occasion de rappeler à la Commission les mesures urgentes à prendre, notamment la mobilisation complète et rapide des instruments anti-dumping et antisubventions – et ce y compris sur la base de la menace de préjudice. Il fut aussi question de l''amélioration rapide de la mesure de sauvegarde actuellement en vigueur, y compris avec la mise en place de niveaux de quotas plus adaptés à la demande européenne, ou encore de la présentation d'un nouveau mécanisme de défense commerciale. L'amélioration du mécanisme d'ajustement aux frontières pour le carbone était aussi à l'ordre du jour, afin de garantir que les aciers importés supportent une tarification carbone alignée sur celle que paient déjà les sidérurgistes européens. Enfin, la nationalisation du site de production d'ArcelorMittal à Dunkerque n'est pas une option envisagée. En effet, cette opération ne constitue aucunement une réponse adaptée aux difficultés rencontrées, la solution étant, comme indiqué ci-dessus, de mieux protéger l'industrie sidérurgique et non de changer d'actionnaire. Une éventuelle nationalisation exposerait l'État à des pertes financières importantes et l'amènerait à supporter seul le coût des investissements massifs.
Auteur : Mme Claire Lejeune
Type de question : Question écrite
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Industrie et énergie
Ministère répondant : Industrie et énergie
Dates :
Question publiée le 20 mai 2025
Réponse publiée le 2 septembre 2025