Question de : Mme Delphine Lingemann
Puy-de-Dôme (4e circonscription) - Les Démocrates

Mme Delphine Lingemann alerte M. le ministre de l'intérieur sur la recrudescence de vol des câbles électriques sur l'ensemble du territoire national. Le cuivre est utilisé dans 60 % des équipements électriques car il est facile à travailler et présente une conductivité élevée. Il a vu son prix plus doublé en cinq ans et sa demande doubler au cours des 25 dernières années au niveau mondial. La tonne de cuivre se revend environ 10 000 euros et encore plus au marché noir. Nécessaire dans la conception de câbles, de batteries, de circuits électroniques, mais aussi dans la tuyauterie, les transports ou la fabrication de pièces de monnaie, le cuivre est donc recherché par les voleurs de cuivre qui sévissent partout sur le territoire et dans le monde. Le vol se situe souvent sur le domaine public. Le Puy-de-Dôme est particulièrement impacté avec 14 km de câbles dérobés sur le département depuis le 1er janvier 2024. 40 communes ont été victimes de vols de câbles électriques, privant des rues ou des communes d'éclairage public ou pénalisant les associations qui ne peuvent plus utiliser les terrains de sport (foot et rugby) en nocturne. Il convient de préciser que ces vols se situent principalement dans les communes situées le long de l'A71 et de l'A75 qui constituent des voies de transport rapides pour les câbles volés. À ce jour, la remise en état des réseaux électriques représente un montant avoisinant les 400 000 euros incluant un délai de plusieurs semaines. C'est pourquoi Mme la députée souhaiterait connaître les moyens qui vont être mis en place par le Gouvernement afin d'endiguer cette recrudescence de vols en limitant les dépenses des collectivités locales. Elle souhaite également connaître les actions entreprises, en particulier dans le Puy-de-Dôme le long des autoroutes A71 et A75.

Réponse publiée le 10 juin 2025

Définie par la loi de l'offre et de la demande, l'évolution des prix du marché de certaines matières premières conditionne, pour les malfaiteurs, l'intérêt à agir. Ainsi, le cours des métaux explique la commission de certains vols, dont celui du cuivre et des vols de câbles de télécommunication qui en sont particulièrement riches. L'extension des réseaux offre également aux délinquants des opportunités supplémentaires, en particulier dans des zones isolées en bordure de routes peu fréquentées, où leur action est facilitée par l'absence de témoins. Les auteurs agissent souvent de nuit et parfois depuis la voie publique en pleine journée. Ils peuvent agir malgré la présence de riverains en recourant à des équipements professionnels (tenues et panneaux de chantier, véhicules équipés de gyrophares) qui permettent de donner à leur action les apparences d'une opération de maintenance. Si la majorité des faits a lieu principalement en bordure de routes, l'éclairage public constitue également une des cibles des groupes criminels (notamment dans le cas de lotissements isolés ou en construction). Face à ce phénomène, la gendarmerie - et la police nationale en zone urbaine - mettre en œuvre au niveau départemental des plans d'action conjoints avec les opérateurs de télécommunication pour sécuriser le matériel sur site, créer un réseau d'alerte et mieux comprendre les modes opératoires. La manière d'opérer est souvent similaire : après avoir ouvert les trappes d'accès, les malfaiteurs attachent les câbles à un véhicule qui les tracte sur plusieurs centaines de mètres jusqu'à ce qu'ils rompent. Les câbles sont ensuite brûlés pour les débarrasser de leur gaine afin, d'une part, de faire disparaître les traces permettant de déterminer leur origine, et, d'autre part, de revendre le produit « brut » plus cher. Le cuivre dérobé alimente des filières de recel via des ferrailleurs ou des récupérateurs de métaux malhonnêtes, qui s'abstiennent volontairement d'assurer la traçabilité (livre de police). Les ferrailleurs sont régulièrement contrôlés par les forces de l'ordre et dans le cadre des comités départementaux de lutte anti-fraude (CODAF). Les infractions sont systématiquement relevées. Depuis le 1er août 2011, le paiement en espèces des achats au détail de métaux ferreux et non-ferreux est interdit en France, quel que soit le montant des transactions. Cette mesure, qui permet de tracer et d'identifier les vendeurs, a permis de stabiliser ce type de vols en France, mais il subsiste une internationalisation de ces trafics. Aussi, le phénomène des vols de câbles en cuivre présente une sensibilité toute particulière, au regard du double préjudice subi par les entreprises et par les particuliers. En effet, au coût de la remise en état des réseaux, supporté par les entreprises concessionnaires, s'ajoute celui de l'interruption des réseaux de communication ou de transport d'énergie que supportent les particuliers et les entreprises. Au sein de l'agglomération parisienne, le phénomène de vols de câbles est relativement stable avec 143 vols signalés en 2024, contre 151 en 2023 et 147 en 2022. La préfecture de police est d'abord mobilisée en matière de prévention situationnelle et conseille les sociétés de transport et les opérateurs de réseaux de communication franciliens sur les mesures à mettre en place afin de se prémunir contre les actes malveillants. Elle s'investit ensuite dans les enquêtes relevant de son ressort territorial. À titre d'exemple, son action a permis d'identifier et d'interpeller les auteurs d'une succession de vols de câbles d'alimentation en juillet et octobre 2023 sur les lignes T2, T6 et T7 du tramway à Paris, qui avait conduit à l'arrêt du trafic. Le département du Puy-de-Dôme est particulièrement touché par ces vols. Depuis janvier 2024, plus de 40 vols de câbles ont été enregistrés, entraînant la perte de 13 kilomètres de câbles extraits des candélabres d'éclairage public, avec un préjudice estimé à 264 000 euros. En février 2024, un individu a été interpellé pour vol et recel de câbles dans ce département. Par ailleurs, une étude est en cours pour renforcer la capacité de détection des atteintes aux réseaux. Pour lutter contre ce phénomène, le ministère de l'intérieur met en oeuvre une approche globale fondée, d'une part, sur la prévention des phénomènes et le partenariat avec les entreprises privées et, d'autre part, sur le démantèlement des groupes relevant de la criminalité organisée. La mise en place de dispositifs préventifs permet d'accompagner les victimes potentielles de ce type de vols. La gendarmerie et la police nationales mènent des actions de prévention pour sensibiliser les acteurs locaux, y compris les entreprises, les ferrailleurs et le grand public, aux risques associés aux vols de métaux et aux moyens de protection. Ainsi, les groupements de gendarmerie mettent en œuvre des plans d'action en coopération avec les opérateurs de télécommunication pour sécuriser le matériel sur site, créer un réseau d'alerte et mieux comprendre les modes opératoires. Par exemple, une coordination est mise en œuvre au travers d'une convention entre l'opérateur Orange et la gendarmerie pour mieux détecter et prévenir ces vols, mais également préserver les traces et indices utiles à l'enquête. Les référents sûreté des groupements et des directions départementales et interdépartementales de la police nationale apportent, en complément, leur concours et leur expertise à ces opérateurs, afin d'identifier les vulnérabilités des sites, tout en proposant des solutions de sécurités passives et actives adaptées. La gendarmerie nationale et la police nationale mobilisent leur réseau de référents sûreté afin de pouvoir conseiller les communes ou les entreprises exposées dans la mise en place de dispositifs de sécurité (détection ou vidéoprotection notamment). En zone police par exemple, le développement d'une véritable culture de sûreté au sein des sociétés est encouragé, notamment par l'intermédiaire du réseau des plus de 260 référents sûreté de la police nationale (qui ont une compétence départementale), et des près de 300 correspondants sûreté (positionnés au sein des circonscriptions de police nationale). Ils peuvent être sollicités pour dispenser des conseils en prévention situationnelle de nature à prévenir les vols de métaux ou, à tout le moins, à en réduire les conséquences. Concernant plus particulièrement le cas des réseaux d'éclairage public, qui demeurent vulnérables et constituent pour les groupes criminels une cible d'opportunité idéale qui induit des montants de préjudices très élevés pour les collectivités, la coopération inclut également des dispositifs de surveillance tels que l'installation de caméras dans les zones à risque pour accroître la sécurité. C'est pourquoi la gendarmerie nationale active tous les leviers de coproduction de sécurité tels que l'aide aux diagnostics dans le cadre des projets de vidéo-protection ou l'impulsion forte au profit des dispositifs de participation citoyenne. Plus globalement, de nombreuses conventions ont été signées entre les départements, la gendarmerie nationale et la fédération française des entreprises de recyclage dans le but de conjuguer leurs efforts dans la lutte contre le vol et le recel de métaux. Il en est de même en zone police. Il convient en effet de rappeler qu'en octobre 2008, un protocole d'accord a été signé par le ministre de l'intérieur et le président de la FEDération des Entreprises de RECyclage (FEDEREC) en vue de lutter contre le vol et le recel de métaux. Ce protocole prévoit, entre autres, la mise en place d'une politique rigoureuse de l'achat au détail, la mise en place d'un réseau d'alerte et la mise en place d'un partenariat en matière de prévention situationnelle. Ce protocole a été décliné localement au niveau départemental entre 2009 et 2014. Renforçant la présence de voie publique, la gendarmerie entretient le contact avec les professionnels de la filière. Les sites sensibles portés à la connaissance de la gendarmerie font l'objet d'une présence renforcée, voire de services de surveillance dédiés dès qu'une menace potentielle est identifiée, en coordination avec les professionnels. En collaboration avec les entreprises, la gendarmerie encourage l'utilisation de systèmes de marquage des métaux (ex. : ADN synthétique) pour faciliter leur identification en cas de vol, et permettre de retrouver plus facilement le métal volé et de remonter la filière criminelle. Dans la même optique, la gendarmerie organise régulièrement des opérations coordonnées nationales et locales pour contrôler les points de vente de métaux et les centres de recyclage. Ces contrôles permettent de s'assurer de la traçabilité des métaux et d'identifier des transactions suspectes. Des actions complémentaires incluent des contrôles ciblés sur les registres des ferrailleurs et les plateformes de recel en ligne et une surveillance accrue des zones de brûlage utilisées pour dénuder les câbles volés Un recueil de plaintes spécifique, qui prend en compte des particularités techniques, est élaboré pour faciliter les rapprochements entre les affaires. La vigilance et la mobilisation sont similaires en zone police, où les services territoriaux de la police nationale procèdent, notamment, à des opérations de contrôle de l'activité de la profession réglementée des recycleurs (tenue du registre, relevé de l'identité des vendeurs et description des objets, etc.). Des contrôles des marchandises sont également menés aux abords des sites de recyclage pour vérifier l'origine des métaux transportés. Ces opérations sont mises en œuvre et cordonnées dans le cadre des « cellules anti-cambriolages » départementales. En matière judiciaire, la gendarmerie dispose, au travers de l'office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), d'une structure spécifiquement dédiée à la lutte contre ces actes. L'OCLDI est ainsi chargé en tant qu'unité opérationnelle à compétence nationale d'enquêter et de coordonner l'action des forces de sécurité intérieure dans ce domaine. Maillon essentiel de la lutte contre la délinquance itinérante, pour laquelle il assure également les échanges à l'international, l'OCLDI peut s'appuyer en outre sur d'autres structures et compétences de la gendarmerie en matière de renseignement et d'enquête. Ainsi, le service central de renseignement criminel (SCRC) produit la détection de phénomènes émergents, mais également la compréhension des principaux mécanismes de ce type de délinquance, afin de mieux orienter le service fourni à la victime. Ces prestations sont destinées aux unités territoriales de la gendarmerie et des services de police. Cette lecture centrale est complétée par l'analyse des vulnérabilités identifiées sur chaque zone géographique, par les chefs opérationnels qui en sont responsables. Il en est de même dans les services de police, qui prennent pleinement en compte les faits de vols de métaux signalés aux centres d'information et de commandement (CIC), et des enquêtes sont diligentées par les services locaux avec l'appui, le cas échéant, de services nationaux. Par ailleurs, toute documentation utile à la répression du trafic de métaux (fiche réflexe sur les vols de pots catalytiques, guide des métaux SNCF, guide du matériel utilisé par Orange, notes d'information et d'analyse criminelle de la police judiciaire au sujet des réseaux organisés spécialisés dans les vols et recels de métaux, etc.) est envoyée régulièrement aux enquêteurs de police. Ainsi, chaque infraction fait l'objet d'un traitement judiciaire adapté, et les interpellations récentes témoignent de l'efficacité des dispositifs en place. Enfin, il doit être rappelé que le ministère de l'intérieur continue de déployer un partenariat avec par exemple les opérateurs de télécommunication (Télévision de France, Orange, etc.), de transport et de distribution d'électricité, pour prévenir les actes de malveillance dont ils sont régulièrement victimes. Le ministre de l'intérieur a signé le 9 mars 2021 avec les grands opérateurs de télécommunications et d'infrastructures une convention nationale de lutte contre la malveillance visant les réseaux de télécommunications. Cette convention a été déclinée par les départements aux fins de lutter efficacement contre les actes de malveillance et les vols commis au préjudice des opérateurs nationaux de télécommunications. Pour prévenir ce phénomène, une étude est en cours pour renforcer la capacité à détecter qu'un réseau est touché. Par ailleurs, l'information des élus et des responsables de réseaux par les partenaires a été réalisée. Des contrôles des registres des ferrailleurs et de la filière d'écoulement - notamment sur le web - ainsi que des surveillances des zones de brûlage identifiées sont mis en place. En parallèle, des actions de sensibilisation ont été menées auprès des maires pour rappeler les mesures fondamentales de sûreté.

Données clés

Auteur : Mme Delphine Lingemann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 10 juin 2025

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