Question orale n° 68 :
Lever les freins au développement des entreprises de l'économie circulaire

17e Législature

Question de : M. Philippe Bolo
Maine-et-Loire (7e circonscription) - Les Démocrates

M. Philippe Bolo interroge M. le Premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique, sur les mesures qu'il envisage de mettre en œuvre afin de supprimer les blocages auxquels sont confrontées les entreprises de l'économie circulaire et ce, afin de soutenir leur modèle qui est essentiel à la transition écologique et à l'écosystème économique national. Dans le prolongement de la loi anti-gaspillage pour une économie solidaire (AGEC) de février 2020 et de ses dispositions relatives à la réduction, au réemploi et au recyclage, de nombreuses entreprises ont vu le jour dans le champ de l'économie circulaire. Aujourd'hui plusieurs de ces entreprises voient leur plan de développement freiné par des entraves de diverses natures : absence de décrets d'application, manque de contrôle de l'application de la loi, complexité administrative. Outre les conséquences graves sur la santé financière et opérationnelle des entreprises, ces entraves provoquent des manques à gagner pour l'État, tant en matière de perception des charges salariales que de recettes fiscales. À l'heure où l'enjeu de la transition écologique s'impose comme une priorité, tout comme celui de la maîtrise de la dette publique, il souhaite entendre ses engagements à répondre à ces sujets en mobilisant les ressources administratives qui permettront enfin de lever les freins à la vitalité d'entreprises qui contribuent au développement du modèle de l'économie circulaire, tout en s'insérant dans l'écosystème économique indispensable au financement des politiques publiques nationales.

Réponse en séance, et publiée le 22 janvier 2025

ÉCONOMIE CIRCULAIRE
M. le président . La parole est à M. Philippe Bolo, pour exposer sa question, no 68, relative à l'économie circulaire.

M. Philippe Bolo . Quel est le point commun entre Aquarys, Redeem Medical, Envie Autonomie, Gekomed, Okamac, les établissements Gaubert Lardeux et Daurema ? Ce sont sept entreprises qui ont fait le pari de l’économie circulaire ; sept entreprises qui, à la suite de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi Agec, ont créé ou développé des services ou des produits permettant le réemploi, la réparation ou la réduction des déchets ; sept entreprises qui, cinq ans après la promulgation de cette loi, constatent malheureusement des résultats économiques loin de leurs prévisions. C’est là un autre point commun à ces sept entreprises : leurs ambitions ont été freinées par le manque d’ardeur de l'État à permettre l'application complète et rapide de la loi Agec et à accompagner l'économie circulaire en général.

Il est reproché à l'État le manque de contrôles de l'interdiction des couverts jetables, qui freine le développement d’Aquarys ; l'absence du décret relatif au réemploi de matériels médicaux, qui entrave Redeem Medical, Envie Autonomie et Gekomed ; la complexité du chèque réparation, qui empêche les établissements Gaubert Lardeux de l'utiliser ; la faible dynamique d’achat de matériel informatique de seconde main par la commande publique, qui limite l’essor d’Okamac. Comble de cette situation, l'État se trouve lui-même victime de l’activité réduite de ces entreprises, puisque chaque perte de chiffre d’affaires représente un manque à gagner pour ses recettes fiscales, de même que chaque emploi non créé est synonyme de cotisations sociales en moins pour financer la santé, la sécurité sociale et la retraite – une aberration dans le contexte budgétaire actuel.

Alors que les dirigeants de ces entreprises nous regardent, quelles réponses concrètes pouvez-vous leur apporter ? Quand le décret relatif au réemploi de matériels médicaux, qui permettrait également des économies de remboursement pour la sécurité sociale, sera-t-il enfin signé ? Quand les contrôles des restaurants qui persistent à utiliser des couverts jetables seront-ils effectués ? Quand l’achat par la commande publique d’ordinateurs reconditionnés sera-t-il soutenu ? Des engagements doivent être pris et tenus ; j’y serai attentif, pour ces entreprises et leurs clients, et pour la crédibilité des lois que nous votons.

M. le président . La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins . Vous m'interrogez sur les mesures prises afin d'accompagner les entreprises dans leur transition vers une économie plus circulaire. Vous évoquez tout d'abord les textes d'application de la loi Agec – également connue sous le nom de loi antigaspillage –, législation structurante qui doit faire évoluer en profondeur nos modes de production et de consommation. Cette loi antigaspillage prévoit 103 décrets d'application, dont 85 devaient être adoptés avant le 31 décembre 2024. Sur ces 85 décrets, 81 sont d'ores et déjà publiés, soit 95 % des textes obligatoires.

Le changement de modèle qu'induisent ces textes nécessite une mobilisation de tous les acteurs – collectivités, metteurs sur le marché, distributeurs, gestionnaires de déchets. Pour les accompagner, d'importants soutiens financiers ont été apportés, notamment par le plan France relance, qui dédie 630 millions d'euros à l'économie circulaire, dont 500 millions ont déjà été engagés. Le fonds Économie circulaire de l'Agence de la transition écologique (Ademe) soutiendra également les projets les plus innovants développés par les entreprises sur le territoire. Le déploiement des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) doit également offrir des soutiens financiers complémentaires. Tout cela s'accompagne de contrôles spécifiques réalisés chaque année par les inspecteurs de l'environnement ainsi que par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Enfin, je partage votre souhait de simplifier davantage l'économie circulaire. Des travaux sont en cours pour harmoniser et faciliter le recours aux bonus pour les produits des filières REP qui incorporent du plastique recyclé. De même, nous simplifierons prochainement les démarches administratives liées aux conditions de sortie du statut de déchet, introduites dans la loi du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte. J'espère que ces éléments répondront à votre question. J'ajouterai que la stabilité gouvernementale est nécessaire pour mener à bien ces dispositifs.

M. le président . La parole est à M. Philippe Bolo.

M. Philippe Bolo . Merci, monsieur le ministre, pour ces précisions. Je comprends l'encombrement constitué par le nombre de décrets d'application à prendre, mais le Parlement ne peut se satisfaire de cet argument. Ces décrets doivent impérativement être pris. Les entreprises que j'ai mentionnées souffrent d'une activité bien inférieure à celle qu'elles avaient anticipée. Alors que le nombre de défaillances d'entreprise atteint des niveaux records, ayons à cœur de les préserver, de surcroît lorsqu'elles relèvent de l'économie circulaire, dont l'activité est vertueuse pour l'environnement et donc pour notre santé.

Données clés

Auteur : M. Philippe Bolo

Type de question : Question orale

Rubrique : Développement durable

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 janvier 2025

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