Question au Gouvernement n° 714 :
Proposition de loi Duplomb

17e Législature

Question de : M. Boris Vallaud
Landes (3e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 28 mai 2025


PROPOSITION DE LOI DUPLOMB

Mme la présidente . La parole est à M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud . Monsieur le premier ministre, le spectacle est triste, la situation, grave, et la bascule, vertigineuse…

Un socle commun – manifestement de connivence avec votre gouvernement – fait alliance avec le Rassemblement national pour voter le rejet d'un texte que – pourtant – il défend, non pour lui faire échec mais pour interdire tout débat démocratique aux députés et le faire adopter discrètement par la droite sénatoriale (Protestations sur les bancs du groupe RN) ;…

M. Sébastien Chenu . Il fallait venir ! Où étiez-vous ?

M. Boris Vallaud . …des parlementaires préfèrent l'obscurité du huis clos à la lumière de l'hémicycle ; sans doute pour lancer sa campagne présidentielle aux pieds des tracteurs bloquant l'Assemblée nationale, un ministre de l'intérieur témoigne un soutien déplacé aux manifestants faisant pression sur le Parlement (Mme Ayda Hadizadeh applaudit) ; la presse nous rapporte qu'en visite dans le Tarn-et-Garonne, la ministre de l'agriculture appelle les agriculteurs à cibler les élus de gauche, c'est-à-dire incite à la violence politique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

Mme Ayda Hadizadeh . La honte !

M. Philippe Brun et M. Jérôme Guedj . Scandaleux !

M. Boris Vallaud . Nous pensions la démocratie menacée à ses marges ; la voici menacée en son cœur !

Une loi démagogique, dangereuse et inefficace, mettant en cause l'autorité de la science, la santé humaine…

M. Hervé de Lépinau . Ce n'est pas ce que dit l'Anses !

M. Boris Vallaud . …et, en définitive, l'avenir même de l'agriculture, fracture la société qui ne demande qu'à faire bloc derrière ses paysans. Voilà où nous en sommes, monsieur le premier ministre !

Nous refusons cet agenda du désastre annoncé, désastre économique, écologique, agricole, désastre sanitaire, démocratique et, en définitive, désastre moral.

Nous sommes, et resterons, une force de proposition (Rires sur les bancs des groupes RN et UDR) pour réconcilier écologie et agriculture, agriculteurs et société. Nous sommes, et nous resterons, une force de proposition pour réconcilier notre pays et faire face aux défis du monde. (Mêmes mouvements.) Nous sommes, et nous resterons, les vigies de notre bien commun – qui n'est pas la propriété des bancs de cet hémicycle : l'État de droit et notre démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe EcoS. – M. Stéphane Peu applaudit également.)

Monsieur le premier ministre, pensez-vous qu'en cédant à la démagogie et aux menaces de violences, vous soyez véritablement dans votre rôle de garant de nos institutions et de l'intérêt général ? (Les députés du groupe SOC, plusieurs députés du groupe EcoS et Mme Elsa Faucillon se lèvent et applaudissent.)

M. Michel Herbillon . Donneur de leçons !

Mme la présidente . La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique . Puis-je vous rappeler que la motion de rejet a été votée, non par le gouvernement, mais par l'Assemblée nationale ?

M. Jérôme Guedj . Ce sont vos soutiens !

M. François Bayrou, premier ministre . Vous savez très bien que l'Assemblée nationale l'a votée pour parer la tentative de blocage…

M. Benjamin Lucas-Lundy. Menteur !

M. Antoine Léaument . Vous êtes de droite !

M. François Bayrou, premier ministre . …destinée, grâce à la multiplication d'amendements - des milliers - à faire en sorte que ce texte ne puisse être examiné. (« Honteux ! » sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

M. Jean-Claude Raux . C'est faux !

M. François Bayrou, premier ministre . Vous connaissez bien les motions de rejet puisqu'en décembre 2023, vous avez vous-même fait adopter une motion de rejet (M. Philippe Vigier applaudit.)…

Un député du groupe SOC . Pas sur nos textes !

M. François Bayrou, premier ministre . …afin que la loi « immigration » ne puisse être débattue.

Ma conviction personnelle – puisque c'est moi que vous interrogez – c'est que la manière dont nous organisons les choses n'est ni durable…

Une députée du groupe EcoS . « Durable », il faut oser !

M. François Bayrou, premier ministre . …ni responsable. Nous devons trouver une façon d'organiser les dialogues et les débats pour que le Parlement puisse pleinement jouer son rôle et ne soit pas entièrement bloqué par tel ou tel groupe qui dépose des milliers d'amendements.

Je rappelle – mais vous le savez très bien – qu'à raison de trois minutes par amendement, les 3 500 qui ont été déposés représentaient quinze jours pleins de débats. (Protestations sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)

Mme Delphine Batho, M. Jérémie Iordanoff et M. Benjamin Lucas-Lundy . C'est faux !

M. Pierre Cordier . M. Vallaud aura du temps, avec la veste qu'il va se prendre !

M. François Bayrou, premier ministre . Ces quinze jours de débats auraient empêché l'examen du texte sur la simplification de la vie économique, du texte sur Mayotte et, peut-être, du texte sur le statut des élus.

Avec une telle méthode, nos concitoyens voient blocage sur blocage et se détournent de la manière dont vous débattez.

M. Pierrick Courbon . Travaillez le week-end !

M. François Bayrou, premier ministre . Je vous donne l'assurance que le gouvernement n'exerce aucune pression sur les élus.

M. Jean-Paul Lecoq . Si !

M. François Bayrou, premier ministre . Je ne l'ai jamais accepté et je ne l'accepterai jamais. La ministre de l'agriculture, n'a pas demandé de cibler tel ou tel ; elle a demandé aux agriculteurs d'expliquer…

M. Dominique Potier. Comme ça ! (M. Dominique Potier fait un geste évoquant un revolver sur la tempe.)

M. François Bayrou, premier ministre . …à leurs élus quel était le texte. (Protestations et « Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs des groupes SOC et EcoS.) C'est la moindre des choses ! Vous le faites aussi, que je sache. C'est ce que nous faisons tous ! Les élus sont les représentants du peuple et il est normal que le peuple parle avec eux, sans pression. Voilà la raison pour laquelle – cela n'est pas la première fois que je le dis – je pense que nous devons trouver…

La présidente de l'Assemblée nationale a essayé de faire retirer des amendements…

M. Damien Girard, M. Jean-Claude Raux et Mme Dominique Voynet . Nous avons dit : « oui » !

M. François Bayrou, premier ministre . …– déposés par un autre groupe que le vôtre – mais ces groupes ont refusé. (Protestations sur les bancs du groupe EcoS.)

Mme Dominique Voynet. Vous avez le nez qui pousse ! (Mme Dominique Voynet mime le nez de Pinocchio.)

M. François Bayrou, premier ministre . La situation (Brouhaha sur les bancs des groupes SOC et EcoS)

Mme la présidente . S'il vous plaît, un peu de silence !

M. François Bayrou, premier ministre . …doit nous permettre de trouver un jour des manières nouvelles d'examiner les textes. (M. Philippe Vigier applaudit.)

Mme la présidente . La parole est à M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud . Nous avons le devoir de débattre démocratiquement dans la lumière et sous le regard des citoyens et non dans le huis clos d'une commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe EcoS. – Protestations sur les bancs des groupes RN et DR.)

Données clés

Auteur : M. Boris Vallaud

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Parlement

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 mai 2025

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