Procès Le Scouarnec
Question de :
M. Erwan Balanant
Finistère (8e circonscription) - Les Démocrates
Question posée en séance, et publiée le 28 mai 2025
PROCÈS LE SCOUARNEC
Mme la présidente . La parole est à M. Erwan Balanant.
M. Erwan Balanant . J'associe à cette question ma collègue Perrine Goulet. La semaine dernière, devant le tribunal de Vannes, les victimes du médecin Joël Le Scouarnec ont dénoncé le silence de la société mais aussi, plus grave encore, celui du monde politique face à ce qu'elles avaient vécu et face à sa propre responsabilité – notre responsabilité.
Ayons une pensée pour les victimes et pour leurs souffrances indélébiles, dans leur corps et dans leur âme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.) Nous ne pouvons tolérer que des abus sexuels aient pu être perpétrés de manière sérielle sans qu'aucune véritable mesure ait été prise et – ce qui est encore pire – par un individu qui avait déjà été condamné en 2005 pour recel d'images pédopornographiques.
Le parquet a requis il y a quelques jours la peine maximale. Le verdict doit être rendu demain.
Pourquoi notre société n'a-t-elle pas su entendre ? Pourquoi n'a-t-elle pas su voir ? Pourquoi n'a-t-elle pas su prendre la mesure des événements ?
Il est urgent de mieux prendre en considération les enfants victimes de violences dans les familles, dans les clubs de sport, dans les écoles, dans les lieux de protection de l'enfance, dans les établissements de soin, dans les milieux artistiques,…
M. Philippe Vigier . Très bien !
M. Erwan Balanant . …bref, partout où nos enfants devraient se sentir protégés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
Toutes ces victimes sont légitimes à dénoncer l'invisibilisation. Nous en portons notre part de responsabilité.
En notre nom à tous, je tiens à leur présenter nos excuses (Mme Maud Petit se lève et applaudit. – Les autres députés du groupe Dem applaudissent également), à leur demander pardon et à les assurer que nous les entendons et qu'elles ne sont plus seules. Ces affaires ne doivent pas être passées sous silence.
Pour que cette promesse ne soit pas vaine, comment garantir que notre société ait les moyens d'écouter, de croire et d'accompagner les victimes ? Comment le gouvernement compte-t-il se mobiliser en matière de lutte contre toutes les violences faites aux enfants et nous assurer d'un « plus jamais ça » ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice . Demain sera rendu le verdict dans l'affaire Le Scouarnec, un procès hors normes qui se tient dans les locaux d'une université. Vous le savez, tous les moyens ont été déployés afin d'accompagner les victimes avant, pendant et, demain, après le procès. Avec quelque 220 parties civiles, ce procès, qui a duré plusieurs semaines, a touché toute la société et l'ensemble de l'opinion.
Il représente, pour le ministère de la justice, un coût – 1 million d'euros – mais aussi un défi pour l'avenir : comment écouter davantage la parole des enfants ? Cette question se pose pour les policiers et les gendarmes, qui travaillent sous l'autorité des procureurs de la République, et pour les magistrats, mais aussi, vous l'avez dit, pour toute la société. Je pense au monde médical, qui pourrait signaler davantage de cas, aux problèmes liés au secret de la confession ou encore aux difficultés observées dans les lieux d'accueil, les écoles, les centres de loisirs mais aussi au sein des familles. Car, vous le savez, c'est au sein des familles que la majorité des violences sont commises – l'affaire Le Scouarnec en est aussi un exemple.
Mme Clémentine Autain . Dans d'autres contextes aussi ! Vous en savez quelque chose, monsieur Darmanin ! (Vives protestations sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR et Dem.)
Mme Perrine Goulet . Ne pourriez-vous pas vous taire pour une fois et écouter M. le ministre ? Pour les victimes, vous devriez avoir honte !
M. Gérald Darmanin, ministre d'État . En cette période particulière, un peu de dignité pourrait nous aider ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR et Dem. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Il faut procéder à des changements législatifs – et ce sera fait. Je pourrais citer la mesure visant à rendre la prescriptibilité glissante pour les victimes de violences – un travail mené par la ministre Aurore Bergé dans le cadre de sa proposition de loi. Ce même texte, que soutient la Chancellerie, prévoit aussi une peine de trente ans de prison en cas de viols sériels, peu importe que cinq ou cent viols aient été commis – le procureur de la République a requis vingt ans dans l'affaire Le Scouarnec.
Des changements profonds doivent être opérés en matière d'accueil des victimes mais aussi, plus largement, dans la société. Nous attendons beaucoup du verdict de l'affaire Le Scouarnec. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR et sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)
Auteur : M. Erwan Balanant
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 28 mai 2025