Question orale n° 72 :
Situation de l'hôpital Robert Ballanger

17e Législature

Question de : Mme Clémentine Autain
Seine-Saint-Denis (11e circonscription) - Écologiste et Social

Mme Clémentine Autain attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur la situation très préoccupante de l'hôpital Robert Ballanger, situé dans sa circonscription en Seine-Saint-Denis. Les agents de l'hôpital, dont le mal-être est croissant, ont alerté Mme la députée sur les nombreux dysfonctionnements que connaît l'hôpital, qui subit de plein fouet la réduction obsessionnelle de la dépense publique des précédents gouvernements et la logique de rentabilité, importée du privé et pourtant appliquée au secteur public. Ces mécanismes ont des répercussions très concrètes pour l'hôpital : l'externalisation du laboratoire d'anatomopathologie, pour obtenir le même service au moindre coût, a résulté en une explosion du temps d'attente des patients pour obtenir leurs résultats. De même, plusieurs services ont fermé, car jugés trop peu « rentables », à l'image du service de diabétologie, alors même que les Séquano-Dionysiens sont parmi les plus touchés par le diabète. Ils sont maintenant contraints de renoncer à certains soins, ou de se rendre dans des hôpitaux plus éloignés, parfois privés, faute d'un service public de proximité efficace. Ce défaut du service public, impliqué par les choix politiques du Gouvernement, finit par mettre en danger les concitoyens. Elle lui demande quelles solutions elle envisage pour remédier à cette situation intenable au plus vite.

Réponse en séance, et publiée le 22 janvier 2025

CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT-BALLANGER
M. le président . La parole est à Mme Clémentine Autain, pour exposer sa question, no 72, relative au centre hospitalier intercommunal Robert-Ballanger.

Mme Clémentine Autain . Je vous alerte une nouvelle fois sur la situation de l'hôpital public, et en particulier celle de Robert-Ballanger, grand hôpital de secteur dans le désert médical qui est le nôtre en Seine-Saint-Denis, où l'on continue à foncer droit dans le mur.

La tarification à l'acte et les regroupements d'hôpitaux imposés par la loi ont été l'occasion de sabrer dans les dépenses, alors que les besoins augmentent.

Mais nous ne sommes pas au bout de nos peines. Que dire de la chaîne des décisions inspirées du privé ? Le niveau de sous-traitance est à l'image de votre entêtement, et les résultats, sidérants.

Prenons le laboratoire d'anatomopathologie, qui examine les organes, les tissus, les cellules : le service a été externalisé. Avant, il fallait trois semaines pour obtenir les résultats ; désormais, c'est plutôt trois mois. Pourtant, on parle de cancer, monsieur le ministre !

Le service rendu est si mauvais – et même contraire aux termes du marché – que l'hôpital est contraint de sous-traiter ce service à d'autres hôpitaux.

Prenons la radiologie : l'imagerie médicale a été privatisée en 2021. Une grosse entreprise, rachetée depuis par un groupe américain, a obtenu le marché. Mais elle ne prend en charge que ce qui rapporte – scanner, imagerie par résonance magnétique (IRM), mammographie. La radiologie conventionnelle ne l'intéresse pas. Comme à la SNCF ou ailleurs, le privé récupère les parts juteuses et ce qui n'est pas rentable va au public !

Prenons encore la diabétologie. Alors que la population de Seine-Saint-Denis est particulièrement victime de cette maladie, qui touche plus certains milieux sociaux que d'autres, le choix de gestion a conduit à la fermeture de ce service – il ne rapporte pas assez.

Prenons enfin le ménage, que la direction de l'hôpital a décidé d'externaliser, comme si recourir au privé était décidément préférable au maintien du personnel. La méthode se banalise, même si les personnes employées – en majorité des femmes – sont davantage exploitées et que le travail est moins bien fait.

Jusqu'où irez-vous dans la marchandisation du soin ? Quels moyens concrets prévoyez-vous pour résorber le mal-être profond et le chaos au sein l'hôpital public, mais aussi les inégalités entre les territoires, dont mon département, la Seine-Saint-Denis, fait tout particulièrement les frais ?

M. le président . La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins . Je n'irai nulle part, madame Autain. J'étais encore praticien hospitalier il y a quelques semaines et la préservation de l'hôpital public est au cœur de mes préoccupations. Pour autant, je ne lui oppose pas l'hôpital privé, qui peut être complémentaire dans certains territoires.

Sans outrance, je vais essayer de vous apporter des réponses point par point. Sur certains, nos informations sont discordantes. Je reviendrai donc vers vous ultérieurement.

Vous avez raison, au sein de votre circonscription, le centre hospitalier Robert-Ballanger joue un rôle central dans la prise en charge des patients. Dans le cadre du plan État plus fort en Seine-Saint-Denis, une enveloppe de 8,8 millions d'euros a été allouée pour rénover, restructurer et agrandir son service d'urgence en 2024.

Combiné à la prise de fonction d'un nouveau chef de service des urgences, cet investissement participe à la transformation du service. En effet, de tels investissements n'ont de sens que si les professionnels sont aussi au rendez-vous.

Dans le cadre du Ségur, 73 millions d'euros ont également été investis pour rénover le bloc opératoire et reconstruire le service de psychiatrie. C'est une bonne nouvelle, puisque la santé mentale a été déclarée grande cause nationale.

En novembre 2024, l'hôpital a également obtenu une autorisation pour les actes de thrombectomie – j'étais intervenu dans cet hémicycle pour éviter le déremboursement du matériel nécessaire à la thrombectomie. Cette nouvelle activité sera déployée en 2025 pour renforcer l'offre de soins.

S'agissant des points que vous avez soulevés, s'il s'avère que les résultats d'anatomopathologie sont rendus en trois mois, ce n'est pas acceptable. Il s'agirait clairement d'une perte de chances pour les patients. Le délai précédent, de trois semaines, est malheureusement souvent incompressible du fait de la technicité des analyses et de leur lecture.

Je veillerai donc au bon respect de la convention établie avec ce laboratoire externe. Selon les informations qui m'ont été transmises, cette convention donnait satisfaction en matière de prestation et de diagnostic. Je vous recontacterai à ce sujet après avoir vérifié la longueur des délais.

Comme vous, je déplore la fermeture du service de diabétologie, mais…

Mme Clémentine Autain . Je sais ce que vous allez me dire !

M. Yannick Neuder, ministre . …je ne l'attribue pas à des considérations financières : il a surtout fermé en raison du départ d'un médecin.

Mme Clémentine Autain . Pourquoi les médecins s'en vont, telle est la question !

M. Yannick Neuder, ministre . La continuité de service est néanmoins assurée, en collaboration avec le groupe hospitalier du Raincy Montfermeil.

La qualité de vie au travail est une priorité quel que soit le poste, du technicien de surface au chef de service. Des efforts ont été faits pour réduire le taux de contractuels, qui est passé de 34 % à 17 %, et pour mener une politique active de soutien en faveur des professionnels de santé, notamment en matière de logement.

Je referai le point sur les délais de communication des comptes rendus d'anatomopathologie. S'ils s'avèrent trop longs, je vous en tiendrai informée et nous œuvrerons ensemble afin de les réduire. Des délais qui dépassent trois semaines sont effectivement inacceptables car les patients atteints d'un cancer pourraient être victimes d'une perte de chances en raison d'un retard de diagnostic, retard que nous n'accepterions pas pour nous-mêmes ou nos proches. Je vous remercie de m'avoir alerté sur cette situation.

Données clés

Auteur : Mme Clémentine Autain

Type de question : Question orale

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Santé et accès aux soins

Ministère répondant : Santé et accès aux soins

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 janvier 2025

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