Difficultés dans la mise en oeuvre de la filière REP bâtiment selon la loi AGEC
Question de :
Mme Sophie Ricourt Vaginay
Alpes-de-Haute-Provence (2e circonscription) - UDR
Mme Sophie Ricourt Vaginay interroge Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur les difficultés persistantes dans la mise en œuvre opérationnelle de la filière à responsabilité élargie du producteur (REP) pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB), prévue par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) du 10 février 2020. Cette filière, destinée à lutter contre les dépôts sauvages, désengorger les déchèteries publiques, garantir la gratuité du service de reprise des déchets du bâtiment pour les professionnels et favoriser le recyclage, demeure insuffisamment déployée, suscitant une vive préoccupation des élus locaux et des acteurs de terrain. Dans les Alpes-de-Haute-Provence, comme dans de nombreux territoires ruraux ou de montagne, les points de collecte restent limités, certaines plateformes de distribution ne respectent pas leur obligation de reprise gratuite et les éco-organismes agréés n'assurent plus un financement suffisant du service, entraînant une facturation persistante dans plusieurs points de reprise. En conséquence, les communes subissent une recrudescence des dépôts sauvages ainsi qu'une pression accrue sur les déchèteries publiques, en contradiction avec la substance même de la loi. Les élus, notamment les maires et présidents d'intercommunalité, déplorent que la filière repose encore largement sur les structures publiques, alors même qu'elle est censée relever de la responsabilité des producteurs. L'Association des maires de France (AMF) et l'Association des petites villes de France (APVF) ont appelé à un rééquilibrage des responsabilités et à une juste compensation financière pour les collectivités. Elles rejettent par ailleurs le moratoire proposé par le Gouvernement, qui risquerait de compromettre la mise en œuvre effective de la filière. Elle lui demande donc les mesures concrètes que le Gouvernement entend adopter pour garantir un maillage territorial effectif, assurer la gratuité effective du service de reprise, notamment par un renforcement des financements des éco-organismes et réaffirmer le principe du pollueur-payeur, afin que les collectivités ne soient plus les variables d'ajustement de la filière REP bâtiment, conformément à la loi AGEC.
Réponse publiée le 24 juin 2025
La filière à responsabilité élargie des producteurs a été créée dans la loi AGEC de février 2020 pour répondre à trois objectifs. Le premier objectif consiste à développer le recyclage des déchets de bâtiment, le secteur du bâtiment et des travaux publics étant la première filière économique productrice de déchets en France. Le deuxième objectif consiste à lutter contre les dépôts sauvages, notamment en créant un réseau de points de collecte afin que les artisans du bâtiment puissent déposer les déchets triés au plus près de leurs chantiers. Le troisième objectif portait sur le développement de l'écoconception des produits et matériaux de construction, afin d'en faciliter leur réemploi ou leur recyclage. Cette filière était très attendue par de nombreuses parties prenantes, notamment les collectivités territoriales qui supportent aujourd'hui une partie des coûts de gestion des déchets du bâtiment, y compris, pour nombre d'entre elles, des déchets amenés par des professionnels. En outre, elles doivent faire face au phénomène des dépôts sauvages qui leur coûte environ 400 millions d'euros par an. Le déploiement de cette filière repose sur un principe de reprise gratuite des déchets lorsqu'ils sont triés, et le développement d'un maillage resserré de points de collecte de proximité accessibles à tout détenteur, qu'il soit un particulier ou un professionnel du bâtiment. Pour assurer cette reprise sans frais, les éco-organismes ont l'obligation de soutenir financièrement les opérateurs qui assurent d'ores et déjà la collecte de ces déchets, afin de couvrir les coûts qu'ils supportent pour ces opérations. Ces soutiens financiers sont apportés à toute personne qui en fait la demande, sans discrimination, dès lors que cette personne accepte les clauses des contrats-types qui ont été élaborés par les éco-organismes. Les objectifs de déploiement de la filière à responsabilité élargie du bâtiment étaient particulièrement ambitieux à sa création. Toutefois, sa mise en œuvre a rencontré un certain nombre de difficultés qui ont ralenti le processus de déploiement des points de collecte, ce qui a pu générer une certaine forme de frustration pour les artisans du bâtiment. Dans le même temps, les fournisseurs de produits de construction ont répercuté sur leurs clients le montant des éco-contributions versées par les metteurs en marché initiaux de ces produits. Face aux préoccupations exprimées sur le sujet, la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche a annoncé un moratoire sur les mesures qui devaient entrer en vigueur en 2025 et lancé une grande consultation de l'ensemble des acteurs de la filière. La question du recyclage et de la valorisation de la reprise des déchets de bois est une question particulièrement prégnante. Des entretiens ont eu lieu au mois de mai pour discuter des propositions exprimées par les différents acteurs. La ministre annoncera le périmètre exact du moratoire et les orientations ayant vocation à structurer la refonte du cahier des charges d'ici à l'été. L'objectif est de mettre en place le nouveau cahier des charges avant la fin de l'année.
Auteur : Mme Sophie Ricourt Vaginay
Type de question : Question écrite
Rubrique : Bâtiment et travaux publics
Ministère interrogé : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche
Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche
Dates :
Question publiée le 10 juin 2025
Réponse publiée le 24 juin 2025