Mesures complémentaires au plan « Ambition stratégique SSA 2030 »
Question de :
M. Frédéric Boccaletti
Var (7e circonscription) - Rassemblement National
M. Frédéric Boccaletti appelle l'attention de M. le ministre des armées sur les mesures complémentaires nécessaires à la mise en œuvre du plan « Ambition stratégique SSA 2030 ». Composante indispensable de l'outil militaire, le service de santé des armées (SSA) est pourtant devenu, au fil des dernières lois de programmation militaire, le parent pauvre des tardifs efforts budgétaires, humains et structurels. Cette situation compromet aujourd'hui sa capacité à remplir ses missions, en dépit de l'engagement sans faille des personnels qui le composent. Le SSA, à bout de souffle, fait face à une tension extrême sur ses effectifs projetables. Il apparaît désormais urgent de réduire la charge opérationnelle pesant sur les équipes médicales et chirurgicales, sans quoi l'objectif de fidélisation, particulièrement critique dans ce domaine en proie à la concurrence civile, restera inaccessible. Dans ce contexte, plusieurs points appellent des réponses précises : quelles discussions ont été engagées avec le ministère de la santé et des solidarités pour fluidifier les passerelles et mieux valoriser la spécificité du parcours SSA dans les filières médicales et paramédicales ? Quelles mesures sont envisagées pour atténuer le taux d'attrition préoccupant des élèves en formation, structurellement situé entre 30 % et 40 %. Le SSA parvient encore à répondre au contrat opérationnel grâce à l'engagement de près de 4 000 réservistes, une proportion significative est proche du départ en retraite. Le ministère envisage-t-il un plan de renouvellement et d'extension adapté à cette réserve ? Peut-on envisager de mobiliser ce vivier pour renforcer les capacités de contrôle de l'aptitude médicale à l'engagement des militaires d'active, dans un objectif de réduction des délais de recrutement ? Enfin, le ministère compte-t-il mettre en œuvre la déconcentration du recrutement de certaines catégories de soignants contractuels au niveau des établissements, afin d'améliorer la réactivité et la compétitivité du SSA dans un marché tendu, à court et moyen terme au moins, des ressources médicales ? Face aux fragilisations structurelles induites par les décisions politiques des gouvernements successifs et dans la perspective d'un engagement majeur, M. le député appelle de ses vœux une réponse cohérente et ambitieuse, au-delà des annonces sans lendemain, pour ce service vital à la résilience de l'outil de défense. Il souhaite connaître sa position sur ce sujet.
Réponse publiée le 25 novembre 2025
Le besoin en recrutement du service de santé des armées (SSA) s'établit à environ 1 100 par an (hors réserves). Ce chiffre recouvre une grande variété de métiers et de spécialités, dans les domaines médicaux, para et péri médicaux, avec une répartition assez équilibrée en volume entre personnel militaire (51 %) et personnel civil (49 %). Cette dernière est notamment marquée par un fort turnover des contractuels. Avec sa nouvelle feuille de route, le SSA se donne pour objectif de « disposer d'un personnel engagé, hautement qualifié et en nombre suffisant ». Cette nouvelle feuille de route est complétée par un nouveau modèle « ressources humaines » dont les points clés sont les suivants : des flux de formation renforcés : un important recrutement ab initio, au niveau baccalauréat, dans ses deux écoles de formation initiale qui sont co-localisées sur le site des Écoles militaires de santé de Lyon-Bron (EMSLB). Cela représente désormais près de 250 recrutements par an, pour des promotions de praticiens des armées et de personnel paramédical militaire. Ce recrutement a été renforcé, avec des promotions passant à 125 pour l'école de santé des armées et à 120 pour l'école du personnel paramédical des armées. C'est un investissement de long terme qui offre au ministère des armées et des anciens combattants une indépendance sur l'accès à la compétence en santé. Le système a fait ses preuves et bénéficie d'une attractivité forte pour les étudiants en santé (qualité de l'accompagnement et taux de réussite) ; des parcours professionnels clairs et lisibles centrés sur l'acquisition de la compétence appliquée aux armées et à la connaissance du milieu ; une logique de flux garante de l'impératif de jeunesse et une fidélisation ciblée garantissant la qualité du haut encadrement technique et militaire ; de l'attractivité et de la lisibilité avec une politique de rémunération qui permet d'aiguiller les parcours professionnels. Le SSA entretient une relation de qualité avec les ministères en charge du travail et de la santé, favorisant la mobilité inter fonction publique pour améliorer les compétences et la prise en charge des patients. Des discussions sont en cours avec ce dernier pour développer des passerelles et échanges de praticiens hospitaliers. Les échanges avec la direction générale de l'offre de soin (DGOS) visent, entre autres, à reconnaître les spécificités du SSA dans les textes réglementaires. Le suivi et l'analyse des données annuelles démontrent que les taux d'attrition estimés à 21 % pour les praticiens et à 2 % pour les paramédicaux sont plutôt en baisse. Les départs cumulés sur 10 ans (2015-2024) concernent 195 élèves médecins, soit 12,76 % cumulés sur 10 ans et 41 internes. Sur cette période, le taux de départ chaque année par demande de démission ou par réforme médicale varie entre 1,28 % et 5,13 % sur les 10 dernières années. Pour les praticiens, le taux d'attrition observé est corrélé au niveau de sélectivité dans les facultés de médecine. Les EMSLB ont de très bons résultats, mais la radiation pour « résultats insuffisants » est un élément structurel. Afin de limiter les départs, des efforts de communication institutionnelle externe, avec en particulier « les ambassadeurs du SSA », ont été menés dans le but de mieux informer les candidats. De même, en interne, les efforts sont poursuivis afin d'éclairer les élèves sur leur statut, les liens au service, les études, les cursus de spécialité etc. En parallèle du recrutement initial, de nombreux recrutements sous statut contractuel, militaires comme civils, sont également réalisés chaque année. Cela représente plus de 400 militaires soignants et près de 450 civils. S'agissant de la réserve opérationnelle du SSA, elle se compose actuellement de 4 487 réservistes opérationnels de premier niveau (RO1) et de 1 356 réservistes de deuxième niveau (RO2). L'âge médian des réservistes, stable ces dernières années, s'établit autour de 46 ans. Elle se caractérise également par un haut niveau d'engagement, avec 83 % des réservistes ayant été actifs au cours de l'année écoulée. Conformément aux orientations fixées par la loi de programmation militaire 2024-2030, la réserve opérationnelle du SSA est appelée à monter en puissance, avec un objectif de 5 148 réservistes (RO1) en 2030. À cet horizon, le SSA devra répondre à une augmentation significative de ses besoins, liée à plusieurs dynamiques concomitantes : soutien opérationnel des forces : le renforcement des capacités projetables implique un accroissement du besoin en équipes médicales complètes ; expertises médicales d'aptitude : la montée en puissance des armées et l'évolution des formats nécessitent un renfort en capacités de soins et d'expertises médicales, notamment en matière de sélection et de suivi des militaires ; command and control médical : le développement de fonctions santé au sein des états-majors accroît les besoins en personnel médical formé à ces fonctions spécifiques ; expertises spécialisées : le SSA doit consolider des compétences dans des domaines critiques tels que la médecine des domaines nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique (NRBC), la médecine épidémiologique ou encore la médecine d'urgence en contexte de haute intensité ; engagement sur le territoire national : les missions dans le cadre de la résilience de la Nation (gestion de crises sanitaires ou climatiques, catastrophes naturelles, etc.) ainsi que les actions de cohésion nationale (journée défense et citoyenneté nouvelle génération, service militaire volontaire, classes de défense et de sécurité globale) sollicitent également les capacités de la réserve. Dans ce contexte et pour répondre plus spécifiquement à l'enjeu du recrutement et de la réalisation des visites d'expertise médicale initiales (VEMI), le SSA a lancé une expérimentation innovante. Deux antennes médicales de réserve ont ainsi été mises en place et ont réalisé, sur des créneaux élargis (notamment le samedi), des VEMI au sein d'installations existantes. Ce modèle, concluant, a vocation à être étendu sur l'ensemble du territoire, constituant l'une des réponses concrètes du SSA à l'augmentation du volume de recrutement et à la nécessaire réduction des délais associés. Enfin, le recrutement du personnel militaire contractuel est un processus centralisé au sein du SSA pour des raisons réglementaires au regard du statut même du service. Selon l'article R. 3232-12 du code de la défense, pour remplir ses missions, le SSA dispose de moyens relevant directement de son autorité. Il assure le recrutement, la formation, la gestion et l'administration des militaires d'active et de réserve des corps et spécialités qui lui sont propres. Le processus de recrutement impose une maitrise budgétaire ainsi qu'une coordination inter établissements afin d'assurer une cohérence d'ensemble dans la répartition et l'usage des ressources entre les différentes composantes et employeurs du personnel géré par le service. Le processus de recrutement des militaires est relativement rapide, avec une durée moyenne de deux mois. Ce délai qui a été réduit de manière très significative depuis 3 ans, n'engendre plus de perte d'opportunités de recrutement. Enfin des chargés de recrutement sont insérés au sein des hôpitaux nationaux d'instruction des armées (HNIA) de Percy, Bégin et Sainte Anne, et des concours nationaux à recrutement local ont été mis en place pour les infirmiers.
Auteur : M. Frédéric Boccaletti
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées et anciens combattants
Dates :
Question publiée le 17 juin 2025
Réponse publiée le 25 novembre 2025