Question au Gouvernement n° 752 :
Situation en Nouvelle-Calédonie

17e Législature

Question de : M. Emmanuel Tjibaou
Nouvelle-Calédonie (2e circonscription) - Gauche Démocrate et Républicaine

Question posée en séance, et publiée le 4 juin 2025


SITUATION EN NOUVELLE-CALÉDONIE

Mme la présidente . La parole est à M. Emmanuel Tjibaou.

M. Emmanuel Tjibaou . Durant son déplacement en Asie du Sud-Est, nous avons appris par voie de presse que le président de la République reprenait la main sur le dossier calédonien – à vos côtés, me semble-t-il, monsieur le ministre des outre-mer. Au-delà de la déclaration d'intention depuis l'autre bout de la planète, nous nous interrogeons à nouveau sur la méthode, dans un moment crucial du processus engagé avec l'ensemble des parties prenantes. Depuis que je siège dans cet hémicycle, le groupe GDR et moi-même n'avons eu de cesse de vous alerter sur la prudence requise par la gestion des territoires en crise partout en outre-mer.

Au terme d'un débat amorcé en janvier, le gouvernement a présenté à Deva un projet d'État confédéré, reflétant deux aspirations fondamentales : d'un côté, l'aspiration à l'émancipation aux confins d'une souveraineté partagée, de l'autre, l'aspiration à la protection et à la sécurité de nos compatriotes désireux de conserver un lien fort avec la France. Si elle n'a pas abouti, la rencontre de Deva n'en reste pas moins un point d'étape majeur dans l'élaboration d'un accord politique – lequel est toujours en cours de discussion, puisqu'il a recueilli les faveurs de la majorité des groupes politiques présents, ainsi que celles du Front de libération nationale kanak et socialiste ; il faut à présent l'enrichir, capitaliser sur ces avancées afin de répondre aux attentes des populations. Car nous le savons tous : si aucun accord politique n'est trouvé d'ici à fin juin, nous entrerons dans un tunnel électoral, avec les scrutins provinciaux, municipaux, puis l'élection présidentielle, dont nous ne sortirons qu'à la fin du premier semestre 2027. Nous pourrions perdre trois années, alors que le territoire est exsangue, dépourvu de perspectives de relance économique ou sanitaire et incapable de mener les réformes nécessaires à son avenir.

Comment capitaliser sur cette méthode qui nous a ramenés sur le chemin de la concorde, si celle-ci change à nouveau en même temps que le format des discussions ? Comment aboutir à un accord politique dans ces conditions ? Il est temps de refermer la parenthèse coloniale dans nos pays et que la France prenne sa part dans l'achèvement du processus d'émancipation en Kanaky Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre d'État, ministre des outre-mer.

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer . La méthode n'a pas changé. Le premier ministre m'a confié la mission de rétablir la voie du dialogue en Nouvelle-Calédonie ; c'est fait. Il m'a aussi demandé de conclure un accord de paix ; cette mission se poursuit, sous l'autorité du président de la République, évidemment, et avec la confiance du premier ministre. Tant que j'aurai cette énergie, tant que je serai persuadé qu'un accord est possible, je la poursuivrai. Vous le savez : je suis convaincu qu'un accord est possible, en alliant ces aspirations effectivement contradictoires que vous avez évoquées. Pourquoi un accord est-il possible là-bas ? Parce que l'économie du territoire est à terre, parce qu'il est menacé d'une explosion sociale, parce que son système de santé s'est effondré, parce que Nouméa compte des centaines de personnes sans domicile fixe, parce que des gens ne mangent pas à leur faim ! Notre devoir et notre responsabilité, celle de l'État mais aussi, et d'abord, celle des élus calédoniens comme des forces économiques et sociales, commandent de trouver un accord ! (Approbation sur les bancs du groupe GDR.)

Sans accord, aucun rétablissement de l'économie et de la situation sociale ne sera possible ! Nous devons donc travailler jusqu'au bout. Avec le président de la République et le chef du gouvernement, nous formulerons des propositions pour mettre autour de la table, ici, à Paris, pourquoi pas les forces économiques et sociales du territoire, sans doute les maires, mais d'abord les forces politiques, afin d'achever le processus de décolonisation et d'épuiser le droit à l'autodétermination, en respectant évidemment la parole des Calédoniens, sans oublier pour autant l'histoire et le passé qui a conduit aux désastres des années 1980 et aux drames de 2024. De toutes mes forces, je veux exprimer ma conviction qu'avec votre soutien et celui de Nicolas Metzdorf, nous trouverons une solution. C'est non seulement essentiel pour l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, mais aussi pour notre patrie, pour la France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, SOC, EcoS, Dem et GDR ainsi que sur quelques bancs du groupe DR. – M. Jean-Philippe Nilor applaudit également.)

Données clés

Auteur : M. Emmanuel Tjibaou

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Outre-mer

Ministère répondant : Outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 juin 2025

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