Accès des mineurs aux sites pornographiques
Question de :
Mme Louise Morel
Bas-Rhin (6e circonscription) - Les Démocrates
Question posée en séance, et publiée le 12 juin 2025
ACCÈS DES MINEURS AUX SITES PORNOGRAPHIQUES
Mme la présidente . La parole est à Mme Louise Morel.
Mme Louise Morel . Il y a quelques jours, plusieurs sites pornographiques ont annoncé se retirer du territoire numérique français. (M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit.)
M. Fabien Di Filippo . La France, tu l'aimes ou tu la quittes !
Mme Louise Morel . Cette décision est entièrement de leur fait : si ces sites quittent notre territoire, ce n'est pas en raison d'une censure arbitraire mais parce qu'ils refusent de se conformer à une loi adoptée dans cet hémicycle. Cette loi, dont j’ai eu l'honneur d'être rapporteure, avec mes collègues Paul Midy, Denis Masséglia, Anne Le Hénanff et Mireille Clapot, impose aux plateformes pornographiques de vérifier l'âge de leurs utilisateurs – une mesure de bon sens.
Rappelons les chiffres : en France, un mineur sur trois consulte un site pornographique au moins une fois par mois et un tiers des enfants de moins de 12 ans ont déjà eu accès à des contenus pornographiques.
Faut-il encore souligner une évidence ? Ce qui est interdit aux mineurs dans la rue, dans les écoles et dans nos foyers devrait l’être tout autant dans l’espace numérique. L'exposition précoce à des contenus pornographiques violents entraîne des souffrances chez les enfants : troubles du développement, addiction, banalisation de la violence sexuelle, notamment envers les femmes, reproduction de schémas toxiques, voire criminels.
Mme Anne-Laure Blin . Exactement !
Mme Louise Morel . Ces plateformes diffusent en toute impunité des contenus où se mêlent viols, inceste, actes de torture, humiliations extrêmes.
Là où d’autres pays ont flanché – Royaume-Uni, Australie, plusieurs États américains –, nous avons tenu bon. Car en France, ce ne sont pas les plateformes qui font la loi. Mais il nous faut aller plus loin et agir en Européens.
Madame la ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique, face aux pressions de ces acteurs qui pensent pouvoir dicter leurs propres règles, je vous pose deux questions : que faites-vous pour que cette mesure ne puisse pas être contournée et qu'elle reste efficace ? Comment la France entend-elle soutenir cette forme de protection des mineurs au niveau européen afin qu'elle y devienne un modèle et une exigence partagée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem ainsi que sur plusieurs bancs des groupes EPR et SOC.)
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique.
Mme Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique . Ces sites ont décidé de ne plus être accessibles depuis la France : ils ne veulent pas respecter nos lois ni respecter nos enfants. Mais personne n'est au-dessus des lois ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe Dem.)
L'adoption de la loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique a fait suite à un très long combat mené par les associations, mes prédécesseurs – Jean-Noël Barrot et Marina Ferrari – et vous, ici, au Parlement. Vous avez envoyé un message très simple : qu'un garçon de plus de 10 ans sur deux et une fille du même âge sur trois puissent avoir accès à des contenus pornographiques en cliquant sur un bouton, c'est fini ! Cela fait plus de trente ans que ce type de contenus est interdit aux enfants ; les sites doivent respecter leurs obligations.
On nous a dit que ce serait impossible, mais les solutions existent. Certains sites les utilisent et se conforment ainsi à nos lois. Si les autres ne veulent pas respecter nos lois ni protéger nos enfants, qu'ils s'en aillent ! (M. Laurent Croizier applaudit.)
Nous continuerons à mener ce combat en Européens. Ce n'est pas l'Europe qui est en retard, c'est la France qui a été en avance. Je sors d'une réunion du Conseil européen, et je vous assure que tout le monde nous regarde avec fierté.
La liberté des adultes de consommer de tels contenus ne doit pas s'exercer au détriment des enfants. Ces plateformes mentent et cherchent à intimider en affichant sur leur site que la nouvelle législation nous donnerait accès aux données de nos concitoyens, qui ont tout à fait le droit de consommer ces contenus s'ils sont majeurs. C'est faux, c'est un mensonge ! Si ces sites souhaitent continuer d'utiliser ces méthodes pour se faire de l'argent sur le dos de nos enfants, nous leur intimons de s'en aller ! Ils comptaient peut-être frapper à la porte de l'Union européenne pour trouver d'autres pays plus accommodants. Mais l'Europe répond aussi à l'appel, en empruntant la voie de la France.
Le numérique, c'est formidable, mais à ceux qui refusent de respecter nos lois, je dis « bon vent ! » (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem ainsi que sur quelques bancs des groupes DR et LIOT. - Mme Stella Dupont applaudit également.)
Auteur : Mme Louise Morel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Internet
Ministère interrogé : Intelligence artificielle et numérique
Ministère répondant : Intelligence artificielle et numérique
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 12 juin 2025