Non conformité des ralentisseurs
Question de :
M. Maxime Michelet
Marne (3e circonscription) - UDR
M. Maxime Michelet attire l'attention de M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation sur la prolifération des ralentisseurs sur les routes françaises et leur non-conformité. Comme pour les ronds-points, la France est championne du monde du nombre de ralentisseurs présents sur son territoire avec plus de dix en moyenne par commune. Selon les données issues de plusieurs associations d'usagers de la route, une proportion importante des ralentisseurs implantés en France ne respecterait pas les normes en vigueur, notamment la norme NF P98-300 qui encadre les modalités de leur réalisation. Certains rapports estiment qu'environ 90 % des ralentisseurs, soit environ 400 000, seraient hors normes. De nombreuses associations et professionnels de la route dénoncent les dommages causés aux véhicules (suspensions, pneus, châssis, etc.) en raison de ces dispositifs trop hauts, mal signalés ou mal conçus. Les coûts induits par ces réparations automobiles peuvent représenter une charge significative, notamment pour les foyers les plus modestes. Ces ralentisseurs non conformes sont aussi un facteur de risque pour les motards. Le caractère incohérent du surnombre de ralentisseurs avec les ambitions écologiques du pays doit être également souligné. Selon une étude menée par des associations d'automobilistes, les ralentisseurs non conformes provoqueraient jusqu'à 27 % de consommation en plus en comparaison avec une même route dépourvue de ralentisseur contre 13 % pour les ralentisseurs conformes. Ces franchissements imposent en effet une séquence de freinage puis d'accélération, augmentant la consommation de carburant et les émissions de CO2 et de particules fines. Ce phénomène rentre en opposition avec les discours du Gouvernement sur la réduction de l'impact carbone. Face à ces faits, il est important de rappeler que la non-conformité des ralentisseurs s'explique bien souvent par le manque de moyens et d'informations dont disposent les communes, responsables de l'installation des ralentisseurs. L'association des maires de France (AMF) alerte régulièrement sur le fait que l'État n'apporte qu'un appui financier très limité aux collectivités pour l'entretien de leur voirie. Celles-ci doivent gérer un patrimoine routier considérable, avec plus de 700 000 kilomètres de routes, ce qui rend particulièrement difficile, faute de moyens, la mise aux normes des ralentisseurs existants. Il souhaiterait ainsi savoir si le Gouvernement entend engager un recensement national des ralentisseurs non conformes et renforcer leur contrôle de légalité afin de faire respecter les normes imposées.
Réponse publiée le 12 août 2025
En réponse à votre interrogation relative à la « prolifération » des ralentisseurs sur les routes françaises et sur leur non-conformité, il semble utile de rappeler que ces dispositifs sont implantés à la demande des collectivités locales, et sous la responsabilité des gestionnaires de voirie, afin de répondre à des enjeux locaux de modération des vitesses et de sécurisation des usagers, notamment les plus vulnérables d'entre eux : les piétons. Ces ralentisseurs sont de cinq types. Deux d'entre eux font l'objet d'une réglementation explicite : il s'agit des dos d'âne et des ralentisseurs de type trapézoïdal réglementés tous deux par le décret du 27 mai 1994 et définis par la norme NF P98-300. Trois d'entre eux ne font pas l'objet d'une réglementation explicite, mais leurs caractéristiques géométriques et leur domaine d'emploi font l'objet de recommandations édictées dans un guide publié par le Cerema en 2010 : il s'agit des coussins, des plateaux et des surélévations partielles en carrefour dont l'emploi est très restreint. Des associations ont estimé qu'une grande proportion de ces dispositifs ne seraient pas conformes aux normes en vigueur, considérant que les coussins et les plateaux doivent être assimilés à des ralentisseurs de type trapézoïdal. Elles s'appuient notamment sur une décision issue de la Cour administrative d'appel de Marseille, qui dans une décision du 30 avril 2024 a considéré que les dispositions du décret de 1994 n'excluaient pas de leur champ d'application les ralentisseurs routiers de type coussins et plateaux. Mais d'autres jurisprudences, dont certaines plus récentes comme la décision rendue le 4 avril 2025 par la Cour administrative d'appel de Nantes, considèrent de façon concordante que les coussins et les plateaux ne peuvent pas être considérés comme de type trapézoïdal et de ce fait ne sont pas soumis au décret de 1994 et ne peuvent donc pas être considérés comme illégaux. Par ailleurs, le juge administratif (tribunal administratif de Paris, décision du 8 février 2024) a considéré qu'il n'incombait pas à l'Etat de veiller à l'exécution et au respect du décret du 27 mai 1994 dans la mesure où « le maire d'une commune est seul compétent, dans le cadre de ses pouvoirs de police de la circulation, pour décider de la mise en place de dispositifs de ralentissement sur les routes à l'intérieur de l'agglomération et sur le territoire de sa commune ou pour décider de leur retrait en cas de non-conformité ». Le juge précise également « qu'il appartient à l'intéressé de rechercher la responsabilité de l'administration ou pour demander à l'administration puis au juge administratif la démolition, la régularisation ou le remplacement de cet ouvrage public ». Autrement dit la décision concernant l'illégalité d'un dispositif doit être prise en cas par cas et non de façon globale. Pour remédier à ces textes sujets à interprétations comme l'attestent les multiples jurisprudences, le ministère en charge des transports a entrepris une démarche de remise à plat du cadre réglementaire des ralentisseurs routiers, en co-construction avec les associations représentant les collectivités locales dont l'association des maires de France. Le futur arrêté portera sur l'ensemble des cinq types de ralentisseurs identifiés ci-dessus et précisera non seulement les règles d'implantation et de signalisation mais également les caractéristiques géométriques des différents dispositifs. Les modalités de signalisation définies par l'instruction interministérielle sur la signalisation routière seront harmonisées afin d'en simplifier la mise en œuvre. Enfin, pour accompagner cette clarification réglementaire, des recommandations quant à leur bon emploi sur la voirie urbaine seront prescrites dans un guide qui actualisera les documents existants comme le guide « coussin et plateaux » du Cerema. Ce guide soulignera l'importance d'une approche globale de la modération de la vitesse en agglomération, intégrant aux côtés des enjeux de la sécurité routière ceux de la qualité environnementale telle que soulignée par M. le député, et présentera l'ensemble des dispositifs de modération de la vitesse à disposition des autorités compétentes dont font partie aux côtés des ralentisseurs, les chicanes, les écluses, les feux récompenses ou encore les plans de circulation et les radars.
Auteur : M. Maxime Michelet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité routière
Ministère interrogé : Aménagement du territoire et décentralisation
Ministère répondant : Transports
Dates :
Question publiée le 24 juin 2025
Réponse publiée le 12 août 2025