Question de : M. Joseph Rivière
Réunion (3e circonscription) - Rassemblement National

M. Joseph Rivière attire l'attention de M. le ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports, sur les conditions de travail précaires des chauffeurs de véhicules de transport avec chauffeur (VTC). Aujourd'hui en France, on estime à près de 60 000 le nombre de chauffeurs VTC en activité, dont une majorité opère dans les grandes métropoles. Ces chauffeurs, souvent passionnés par leur métier à l'origine, se trouvent désormais confrontés à une précarisation croissante, liée à un modèle économique fondé sur la dépendance aux plateformes numériques comme Uber, Bolt ou Heetch. En effet, depuis la réforme du secteur engagée par la loi dite « Grandguillaume », les chauffeurs VTC doivent répondre à des obligations de formation, de qualification et d'immatriculation strictes, visant à professionnaliser leur activité. Cependant, dans les faits, leur situation socio-économique reste extrêmement fragile. Ces plateformes prélèvent systématiquement une commission significative moyenne de 20 à 25 % sur chaque course, avant même que le chauffeur n'en touche le produit net. À cela s'ajoute un système fiscal pénalisant, dans lequel les chauffeurs sont imposés sur leur chiffres d'affaires bruts, sans tenir compte de leur nombreuses charges professionnelles : carburant (qui peut représenter jusqu'à 30 % des recettes mensuelles), assurance professionnelle, entretien du véhicule, ou location de voiture (qui peut aller de 600 à 1 200 euros par mois). En pratique, nombre d'entre eux finissent par percevoir un revenu net inférieur au SMIC horaire, après déduction de l'ensemble des frais. Selon plusieurs études syndicales et collectifs de terrain, un chauffeur VTC travaille en moyenne 10 à 12 heures par jour et parfois jusqu'à 70 heures par semaine, pour simplement subvenir à ses besoins. Ce rythme éreintant, imposé par une logique algorithmique opaque, mène à une grande détresse morale et physique. Beaucoup témoignent d'un désamour profond pour un métier qu'ils exerçaient autrefois avec passion, mais qu'ils subissent désormais comme une contrainte économique. Ils évoquent un sentiment d'injustice, de découragement et une perte totale de reconnaissance. À cette situation s'ajoute une absence de droits sociaux élémentaires : pas de congés payés, pas de prise en charge en cas de maladie ou d'accident, pas de droit au chômage, ni de garantie de revenu minimal. Le statut d'indépendant, s'il offre en théorie une forme de liberté, se traduit dans la réalité par une extrême précarité sans filet de sécurité. Dans ce contexte, M. le député souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour mieux encadrer les relations entre chauffeurs VTC et plateformes numériques, garantir un revenu minimum décent et pérenniser l'activité de ces travailleurs essentiels à la mobilité urbaine. Il l'interroge également sur la pertinence d'un statut intermédiaire, entre indépendance et salariat, qui offrirait aux chauffeurs VTC des droits sociaux fondamentaux sans nuire à leur autonomie professionnelle.

Réponse publiée le 9 septembre 2025

Le Gouvernement est attentif aux conditions d'exercice des chauffeurs de voitures de transport avec chauffeur (VTC), dont l'activité contribue à l'offre de mobilité, notamment dans les grandes agglomérations. Depuis la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, dite « loi Thévenoud », puis la loi n° 2016-1920 du 29 décembre 2016 relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport, dite loi « Grandguillaume » et enfin la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, le secteur bénéficie d'un cadre juridique consolidé qui fixe les conditions d'accès à la profession, les conditions d'exercice de celle-ci et définit des responsabilités, des droits et des obligations pour les conducteurs, les exploitants de VTC et les centrales de réservation. La transparence des conditions de travail, notamment s'agissant de l'accès aux données de course le fonctionnement des algorithmes, les déconnexions a également été renforcée. Pour accompagner les chauffeurs dans leur relation avec les plateformes, l'ordonnance du 21 avril 2021 a créé l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE), chargée d'organiser le dialogue social et la négociation d'accords collectifs entre ces deux parties, dans le respect du statut d'indépendant. Des accords ont été signés entre représentants élus des chauffeurs et plateformes, notamment sur les conditions de rémunération, la transparence des prélèvements et la mise en place de garanties sociales complémentaires. La création de l'ARPE est encore récente et le dialogue doit se poursuivre pour favoriser un équilibre contractuel entre les parties, dans le respect du droit de la concurrence et du statut d'indépendant, sous le regard attentif du Gouvernement. S'agissant enfin de la question d'un éventuel statut professionnel intermédiaire, le Gouvernement n'envisage pas la mise en place d'un tiers statut. Le dialogue social sectoriel engagé sous l'égide de l'ARPE constitue, à ce stade, le cadre le plus approprié pour identifier les besoins de protection spécifiques aux chauffeurs VTC, et évaluer la pertinence d'éventuelles adaptations juridiques. Pour autant, le Gouvernement demeure attentif aux propositions qui pourraient émerger de ce dialogue et des consultations avec les parties prenantes dans le cadre de la transposition de la directive (UE) 2024/2831 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2024 relative à l'amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme.

Données clés

Auteur : M. Joseph Rivière

Type de question : Question écrite

Rubrique : Taxis

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Dates :
Question publiée le 24 juin 2025
Réponse publiée le 9 septembre 2025

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