Question écrite n° 7889 :
Défaillance du Ministère de la Culture sur le contrôle des sites pornographiques

17e Législature

Question de : Mme Caroline Colombier
Charente (3e circonscription) - Rassemblement National

Mme Caroline Colombier alerte Mme la ministre de la culture sur les dysfonctionnements relevés à l'occasion du contentieux ayant conduit, le 18 juin 2025, à la suspension par le tribunal administratif de Paris de l'arrêté imposant à plusieurs sites pornographiques une obligation de vérification de l'âge de leurs visiteurs. Cette décision, fondée notamment sur un doute sérieux quant à la conformité du dispositif avec la directive européenne 2000/31/CE sur le commerce électronique, met en lumière de possibles carences dans la procédure réglementaire, notamment l'absence de notification préalable à la Commission européenne. Surtout, la juridiction a relevé que la ministre de la Culture, bien qu'informée de la requête, n'a présenté aucune observation en défense, laissant le juge statuer sans réponse de l'État, sur un sujet pourtant central pour la protection des mineurs. Alors que cette régulation fait l'objet d'un large consensus politique, l'absence de représentation à l'audience, conjuguée à une coordination manifestement déficiente entre les ministères et les autorités compétentes, interroge sur la solidité juridique de l'action Gouvernementale dans ce domaine. Elle lui demande donc de clarifier les raisons de cette absence de défense devant la juridiction administrative, d'indiquer si une enquête interne a été diligentée et de préciser les mesures envisagées pour garantir que ce type de régulation, légitime sur le fond, repose à l'avenir sur une base juridique solide et conforme au droit européen.

Réponse publiée le 2 septembre 2025

La lutte contre l'exposition des mineurs à la pornographie en ligne avait été annoncée comme une priorité par le Président de la République dès fin 2019, à l'occasion du 30ème anniversaire de la convention internationale des droits de l'enfant. La protection des mineurs contre les contenus violents ou choquants sur internet est en effet un enjeu fondamental, tant l'exposition à la pornographie peut avoir des conséquences néfastes sur leur développement psychologique et leurs comportements, le rapport d'information déposé en septembre 2022 par la délégation aux droits des femmes du Sénat l'a parfaitement documenté et rappelé. L'ensemble des pouvoirs publics sont engagés pour rendre toujours plus effective la protection des mineurs dans l'univers numérique. Le Gouvernement et le Parlement ont ainsi amélioré le dispositif mis en place initialement par l'article 23 de la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales qui permettait le blocage par un juge judiciaire des sites permettant l'accès des mineurs à un contenu pornographique. Désormais, aux termes des dispositions des articles 10, 10-1 et 10-2 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, modifiée par la loi du 21 mai 2024 visant à sécuriser et réguler l'espace numérique, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) est chargée de faire respecter l'interdiction de l'accès des mineurs aux sites pornographiques et peut le cas échéant prononcer des sanctions pécuniaires ou ordonner le blocage, alternativement ou en complément au déréférencement, des sites qui ne respectent pas cette obligation. Cet engagement est également partagé à l'échelle de l'Union européenne. Réunis le 26 mai dernier, l'ARCOM et ses homologues européens coordinateurs pour les services numériques, avec la Commission européenne, ont décidé d'actions coordonnées visant à assurer la mise en place de solutions de vérification de l'âge pour l'accès aux services pornographiques disponibles au sein de l'Union. Après une large consultation, la Commission a par ailleurs publié le 14 juillet dernier ses lignes directrices sur la protection des mineurs en ligne qui viennent préciser les mesures attendues des plateformes pour se conformer aux exigences du règlement européen sur les services numériques. L'ensemble de ces actions entreprises par la puissance publique, poursuivant l'objectif d'intérêt général de protection des mineurs, ont suscité de nombreux contentieux engagés notamment par les éditeurs des sites pornographiques. Le ministère de la culture s'est fortement mobilisé pour faire face à cette vague inédite de contentieux et défendre la légalité du dispositif. L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris du 16 juin 2025 ne saurait démontrer une défaillance dans la procédure d'élaboration de l'arrêté interministériel du 26 février 2025, qui faisait l'objet d'une demande de suspension. Sur pourvoi du ministère de la culture, ainsi que du ministère délégué chargé de l'intelligence artificielle et du numérique, le Conseil d'État a censuré pour deux erreurs de droit cette ordonnance et rejeté la demande de suspension initiale. Les actions déjà engagées par l'ARCOM avant cette ordonnance, prononçant irrégulièrement la suspension de l'arrêté en cause, ont ainsi pu se poursuivre et une mise en demeure a été adressée le 4 août dernier à cinq sites établis dans l'Union européenne, leur laissant ainsi un délai de trois semaines pour se conformer à leurs obligations avant un déréférencement et un blocage de leur accès.

Données clés

Auteur : Mme Caroline Colombier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Administration

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Dates :
Question publiée le 1er juillet 2025
Réponse publiée le 2 septembre 2025

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