La concurrence de la production marocaine pour la filière de la tomate française
Question de :
M. Jean-Michel Brard
Loire-Atlantique (9e circonscription) - Horizons & Indépendants
M. Jean-Michel Brard appelle l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, sur la concurrence des tomates-cerises marocaines. Les tomates du Maroc sont, en effet, dans de nombreuses enseignes, mises en avant avec des marges faibles facilitant leur écoulement et leur attractivité tarifaire. Les conséquences sont dramatiques pour les exploitants français obligés de jeter leurs invendus. Le diagnostic du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) en janvier 2025, indiquait déjà que les mécanismes douaniers inadaptés renforçaient les importations massives de tomates cerises du Maroc. Alors que le coût de la main d'œuvre française est plus de 10 fois supérieur au coût de la main d'œuvre marocaine, l'accord de libre échange entre l'Union européenne et le Maroc établit un régime extrêmement favorable à la tomate marocaine avec un contingent d'importations de 285 000 tonnes sur lequel ne pèse aucun droit de douanes spécifiques et un abattement des droits de douane de 60 % pour les quantités exportées au-delà du contingent. À la demande du ministère, les producteurs français ont établi un dialogue avec leurs homologues marocains, mais la situation semble être dans l'impasse après six rencontres. En particulier, la saisonnalité de la production française n'est toujours pas prise en compte. Aussi, il lui demande de bien vouloir faire connaître sa position et les pistes envisagées afin de sécuriser durablement la filière de la tomate cerise française, les producteurs de cette filière étant disposés à une rencontre au ministère.
Réponse publiée le 2 décembre 2025
Le ministère chargé de l'agriculture est très attaché à ce que la filière des tomates trouve des débouchés rémunérateurs et durables sur les étals, surtout en période de production française. C'est précisément pour soutenir la filière française des fruits et légumes que le ministère a lancé en 2023, avec l'ensemble des acteurs de la filière, le plan de souveraineté pour la filière des fruits et légumes qui établit un cadre stratégique et des leviers d'actions opérationnels pour inverser la tendance baissière du taux d'auto-approvisionnement en fruits et légumes frais. L'amélioration de la compétitivité de la filière est ainsi un axe central du plan pour faire face aux importations étrangères, comme celles en provenance du Maroc pour la tomate. Ces dernières années, l'amont agricole a été soutenu pour la modernisation de ses outils de production via la mise en œuvre d'aides à l'investissement comme en témoignent les différents guichets FranceAgriMer financés par les crédits de France 2030 et de la planification écologique. Aussi, compte tenu du besoin de main d'œuvre important dans ce secteur, la pérennisation du dispositif TO-DE (travailleurs occasionnels–demandeurs d'emplois) inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale 2025, constitue une avancée majeure qui permet de réduire le coût du travail en France pour rester compétitif face aux pays voisins. L'importation des tomates marocaines est suivi de près par le ministère chargé de l'agriculture comme en témoigne entre autres le rapport publié en janvier 2025 du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, qui a permis de mieux connaître et d'objectiver les flux physiques au sein de la filière, et en particulier la proportion de tomates importées puis réexportées depuis la France. Le ministère porte une très forte attention aux importations de tomates marocaines et aux perturbations qu'elles pourraient entraîner sur ce secteur en France, afin qu'elles ne remettent en cause ni son développement, ni sa viabilité. Or les producteurs marocains bénéficient de conditions de production favorables qui leur permettent de proposer leurs produits sur le marché européen à des prix très compétitifs, y compris durant la période de production française, en été. L'exportation de tomates marocaines s'inscrit dans le cadre de l'accord d'association signé entre l'Union européenne (UE) et le Maroc. Il convient de noter que l'UE, ainsi que la France, tirent nombre d'avantages de cet accord. Ceux-ci expliquent que l'UE ne se montre guère favorable à la réouverture de cet accord, qui pourrait conduire à remettre en cause ces avantages. La voie d'une renégociation de cet accord d'association, sans être exclue, n'apparaît donc ni aisée, ni forcément favorable aux intérêts nationaux. Dans ce contexte, la voie privilégiée par les professionnels français a été de rechercher une solution avec leurs homologues marocains qui tienne compte des contraintes des deux parties, et réponde aux attentes de chacune par des mesures concrètes. Le ministère chargé de l'agriculture appuie cette solution : elle semble à même d'établir une relation fructueuse et mutuellement bénéfique, dans le cadre d'une relation bilatérale franco-marocaine forte, notamment dans le secteur agricole. Au terme de leurs échanges, les professionnels français et marocains ont signé un accord qui puisse servir de cadre aux décisions qu'ils pourraient prendre au salon international de l'agriculture au Maroc (SIAM) qui se tiendra à Meknès, du 21 au 27 avril 2025. Une prochaine réunion doit se tenir en septembre 2025. Le ministère de l'agriculture français appuie cette démarche, car elle paraît la mieux à même de produire des résultats concrets, de manière suffisamment rapide. Le ministre de l'agriculture marocain fait de même auprès des professionnels marocains. En tout état de cause, il importe que ces échanges aboutissent dans les meilleurs délais à des résultats pratiques qui répondent aux difficultés que les professionnels rencontrent.
Auteur : M. Jean-Michel Brard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce extérieur
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Agriculture, agro-alimentaire et souveraineté alimentaire
Dates :
Question publiée le 1er juillet 2025
Réponse publiée le 2 décembre 2025