Question écrite n° 7962 :
Baisse du budget alloué à la part collective du Pass Culture

17e Législature

Question de : M. Romain Eskenazi
Val-d'Oise (7e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Romain Eskenazi interroge Mme la ministre de la culture, sur les effets particulièrement dommageables de la baisse du budget alloué à la part collective du Pass Culture, dispositif essentiel pour soutenir les initiatives éducatives et culturelles de proximité qui œuvrent depuis des années à l'accessibilité culturelle des jeunes sur l'ensemble du territoire. Depuis sa mise en œuvre, cette part collective a permis à des milliers d'élèves de participer à des ateliers de pratique artistique, des sorties culturelles et des rencontres avec des artistes, contribuant ainsi activement à l'éducation artistique et culturelle (EAC) dans les établissements scolaires. Or la décision de réduire de 25 millions d'euros cette enveloppe, passant de 97 à 72 millions d'euros, avec seulement 50 millions mobilisables jusqu'en juin 2025, a créé un véritable choc dans les milieux éducatifs et culturels. Toutefois, 40 millions d'euros ont déjà été engagés pour l'année scolaire 2024-2025, ne laissant donc que 10 millions à se partager entre tous les établissements scolaires de France jusqu'au mois de juin. Cette coupe budgétaire intervient alors même que le dispositif connaissait une dynamique ascendante, preuve de son appropriation croissante par les équipes pédagogiques. Dans l'académie de Créteil, par exemple, la consommation des crédits est passée de 3 % en 2021-2022 à 57,9 % en 2023-2024, avec des pics à 60 % en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne. À l'échelle nationale, la part des crédits consommés au titre des projets collectifs s'élevait à 39,4 % en 2022-2023. Le sacrifice de cette politique publique est d'autant plus incompréhensible qu'il touche une part du Pass Culture dont les effets sont les plus vertueux et équitables. Là où la part individuelle du Pass a pu susciter des critiques sur sa tendance à reproduire des inégalités de consommation, la part collective constitue un levier d'accès à la culture pour les jeunes les plus éloignés de l'offre artistique. Cette annonce touche non seulement les professionnels du secteur artistique et culturel, déjà fragilisés par d'autres coupes budgétaires, mais aussi des milliers d'enfants et d'adolescents pour qui ces projets représentent un accès unique et concret à la culture. Cette politique publique permet de porter des projets co-construits, de qualité, durables, porteurs d'émancipation et d'ouverture. Elle est particulièrement efficace dans les quartiers prioritaires, les zones rurales et dans les territoires les plus éloignés des institutions culturelles. L'Association « À qui le tour » (AQLT), labellisée SMAC, active depuis 2004 dans le champ des musiques actuelles, fait partie des structures gravement touchées. Elle n'est pas un cas isolée. Sa situation est édifiante pour comprendre les effets de cette baisse de dotation. Elle avait prévu pour l'année 2025 une série de 36 évènements, co-construits avec les collectivités locales et les établissements scolaires, sur un territoire reconnu comme carencé, qui seront tous annulés. Ces projets représentaient 140 heures d'intervention, mobilisaient dix artistes et concernaient directement 285 élèves de collèges et lycées. Cette mesure est d'autant plus contestable qu'elle a été mise en œuvre sans aucune information préalable aux communautés éducatives. Celles-ci n'ont disposé que de deux jours pour déposer en urgence leurs projets sur la plateforme « Application dédiée à la généralisation de l'éducation artistique et culturelle » (ADAGE), rapidement saturée face à l'afflux massif de connexions. Il lui demande quelles mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour garantir la continuité de la part collective du Pass Culture, soutenir les acteurs culturels qui assurent la médiation artistique dans les territoires en difficulté et préserver l'égalité d'accès à la culture pour tous les jeunes, quel que soit leur lieu de vie.

Réponse publiée le 18 novembre 2025

Depuis sa création et son déploiement, la part collective du pass Culture a connu un succès sans précédent : pour l'année scolaire 2023-2024, 72 % des élèves ont connu au moins une action financée par la part collective du pass Culture (ils étaient 54 % en 2022-2023) et 96 % des collèges et des lycées de France ont utilisé la part collective, ce qui constitue un véritable succès sur l'ensemble du territoire. Cet engouement a conduit, en 2024, à un dépassement de l'enveloppe initiale de 35 millions d'euros. Pour rappel, les budgets alloués à la part collective du pass Culture ont connu une augmentation significative, passant de moins de 14 M€ en 2022 à 62 M€ dans la loi de finances initiale pour 2024. Pour l'année 2025, 72 M€ ont été inscrits en loi de finances, soit une augmentation de 10 M€ par rapport à la précédente enveloppe. Au 31 janvier 2025, l'enveloppe des réservations pour la période allant de janvier à juillet 2025 s'élevait déjà à 50 M€ soit plus des deux tiers du budget consacré à la part collective du pass Culture. Pour préserver le budget dédié à la période allant de septembre à décembre 2025, le ministère a donc décidé de suspendre temporairement les réservations sur la plateforme Adage.  Dans ce contexte, et dans un souci de bonne gestion et d'accompagnement des équipes éducatives, la ministre chargée de l'éducation nationale a confié une mission à l'inspection générale afin d'évaluer ce dispositif pour garantir son équité et son efficacité. Les crédits ont été notifiés aux établissements scolaires à la rentrée pour la période septembre - décembre 2025 et les réservations d'actions ont pu reprendre depuis le 1er octobre. Les recommandations de l'inspection générale permettront d'améliorer ce dispositif pour 2026, tant sur sa gestion, que sur la qualité de l'offre culturelle qu'elle propose.  Cette décision va d'ailleurs dans le sens d'un rapport de la Cour des comptes publié le 14 février 2025 relatif à l'éducation artistique et culturelle au bénéfice des élèves de l'enseignement scolaire. La Cour des comptes partage les constats et les priorités du ministère chargé de l'éducation nationale, qui, tout en soulignant que le financement des projets par la part collective du pass Culture contribue efficacement au développement de l'éducation artistique et culturelle (EAC), pointe toutefois la nécessité d'un meilleur pilotage de la politique d'EAC et d'une plus grande évaluation des actions proposées. L'ambition du ministère chargé de l'éducation nationale reste donc inchangé : que tous les élèves, sur tous les territoires, bénéficient de l'éducation artistique et culturelle, permettant leur épanouissement et leur ouverture sur le monde. La part collective du pass Culture en est un des leviers, et le ministère travaille à en garantir la pérennité comme l'efficacité pour les années scolaires à venir.

Données clés

Auteur : M. Romain Eskenazi

Type de question : Question écrite

Rubrique : Culture

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Éducation nationale

Dates :
Question publiée le 1er juillet 2025
Réponse publiée le 18 novembre 2025

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