ANEF : quand le numérique devient un obstacle à l'accès aux droits
Question de :
M. Idir Boumertit
Rhône (14e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Idir Boumertit attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les dysfonctionnements persistants de la plateforme ANEF (Administration numérique pour les étrangers en France) et leurs conséquences sur l'accès aux droits des personnes étrangères. Depuis sa généralisation progressive à l'ensemble des titres de séjour, la plateforme ANEF fait l'objet de vives critiques de la part des acteurs de terrain, en raison des obstacles importants qu'elle oppose aux usagers, en particulier les plus précaires. Si le décret n° 2021-313 du 24 mars 2021 permet de rendre obligatoire le recours à un téléservice, le Conseil d'État a rappelé, dans une décision du 3 juin 2022, que cette obligation ne peut être mise en œuvre qu'à la condition d'assurer un accompagnement effectif et des solutions de substitution adaptées. Or une enquête nationale menée par la Fédération des acteurs de la solidarité, rendue publique en octobre 2024, documente de manière approfondie l'ampleur des dysfonctionnements constatés sur le terrain. Sur plus de 480 structures interrogées, 82 % estiment que le Centre de contact citoyen (CCC) n'apporte aucune aide concrète aux usagers et seulement 5 % déclarent que leur préfecture propose systématiquement une modalité de substitution en cas de blocage. Près de 70 % indiquent l'absence totale d'information claire sur les sites préfectoraux. Plus inquiétant encore, ces défaillances techniques et organisationnelles entraînent des ruptures de droits : perte d'accès aux prestations sociales (Caisses des allocations familiales, Caisses primaires d'assurance maladie), radiation de France Travail, impossibilité de travailler ou de se loger. Ces situations plongent certaines personnes dans une précarité administrative dramatique, avec des conséquences durables sur leur insertion sociale et professionnelle. Ces constats ont été partagés par la Défenseure des droits dans son rapport de novembre 2024, qui évoque « des atteintes massives aux droits des usagers » et appelle à un renforcement immédiat des garanties d'accessibilité et de continuité du service public. Le Défenseur souligne en particulier l'inadaptation des dispositifs pour les publics vulnérables et la nécessité de garantir un véritable accès multicanal aux démarches, conformément aux principes d'égalité devant le service public. Dans ce contexte, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour garantir un accès réel et équitable aux démarches administratives liées au séjour, assurer le respect des modalités de substitution prévues par l'arrêté du 1er août 2023 et restaurer l'effectivité des droits fondamentaux des personnes étrangères présentes sur le territoire, en particulier celles qui rencontrent des obstacles techniques ou linguistiques dans l'usage du numérique.
Auteur : M. Idir Boumertit
Type de question : Question écrite
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date :
Question publiée le 1er juillet 2025