Dérapage du budget des JOP 2024 de Paris
Question de :
Mme Caroline Colombier
Charente (3e circonscription) - Rassemblement National
Mme Caroline Colombier alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conclusions inquiétantes à tirer du rapport de la Cour des comptes le 23 juin 2025 sur les dépenses publiques liées aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Alors que la communication gouvernementale s'est longuement appuyée sur l'idée d'un évènement maîtrisé, sobre et exemplaire, les magistrats financiers estiment désormais que la facture publique globale des jeux atteint près de 6 milliards d'euros, soit le double des montants initialement annoncés dans le projet de loi de finances pour 2025. Ce chiffrage comprend 2,77 milliards d'euros pour l'organisation des jeux, ainsi que 3,19 milliards pour les infrastructures, incluant la sécurité, les transports, les aménagements urbains et les sites de compétition. Ces dérapages introduisent des doutes sérieux sur la sincérité de la trajectoire financière suivie depuis la candidature de Paris. Elle lui demande donc la communication des raisons de cet écart entre les chiffres officiellement présentés par le Gouvernement et le Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) et les conclusions publiées par la Cour des comptes.
Réponse publiée le 11 novembre 2025
Le Premier ministre a écrit au Président de la Cour des comptes en juin dernier en réponse au rapport de la Cour sur les dépenses publiques liées aux jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024. Le Gouvernement est en désaccord avec l'analyse présentée dans ce rapport, estimant trop extensive l'approche des dépenses qui y sont exposées et comptabilisées, et considérant que le « coût global » des jeux doit logiquement être entendu comme le surcoût lié à leur accueil en France en 2024. Les points de désaccord portent notamment sur les sujets ci-après. En matière d'organisation, le dispositif audiovisuel de retransmission des jeux par France télévisions, estimé par la Cour à 84,5 M€, principalement au titre de l'achat des droits de diffusion, ne peut être imputé aux jeux de Paris 2024. L'entreprise publique diffuse depuis des décennies les jeux d'été et d'hiver, en achetant à chaque fois les droits et en déployant des équipes et moyens techniques sur place : il n'y a donc pas, à cet égard et en particulier concernant les droits télévisuels, de surcoût lié aux jeux de Paris 2024. De plus, des recettes publicitaires substantielles ont été générées par les audiences exceptionnelles générées par les jeux. S'agissant du soutien aux athlètes de l'équipe de France olympique et paralympique, l'intégralité de la politique sportive de haute performance mise en œuvre par la France (budget de 80,3 M€ indiqué par la Cour) ne peut pas être rattachable aux jeux de Paris, à l'exception des dispositifs spécifiquement conçus pour l'édition 2024 tel que « gagner en France » (pour un budget de 15,8 M€ à la charge de l'agence nationale du sport), de la revalorisation des primes aux médaillés et de leur extension à l'encadrement sportif, induisant des dépenses supplémentaires estimées à 7,8 M€. Au total, il apparait que seuls 23,6 M€ sur les 80,3 M€ recensés par la Cour sont réellement rattachables à Paris 2024. Concernant les infrastructures de transport (total estimé dans le rapport à 629 M€), la Cour recense bien souvent l'intégralité de la dépense concernée. Dans d'autres cas, elle ne retient que les dépenses d'accélération (270 M€), alors que l'État ne considère pas que ces dépenses dédiées au prolongement de la ligne 14 du métro, au RER Eole et au franchissement urbain Pleyel soient rattachables aux jeux parce qu'elles ne servent pas à accélérer un calendrier préalable dans la perspective de l'événement mais à rattraper des retards passés causés par des facteurs indépendants des jeux. Plus généralement, il faut rappeler qu'environ 1,5 Md€ d'investissements publics consentis à l'occasion de l'organisation des jeux n'ont pas seulement été utiles en vue de l'événement lui-même, mais permettent d'enrichir l'héritage matériel des jeux de Paris 2024. Ces dépenses sont essentiellement composées de la contribution à la maquette financière de la société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo – 1,1 Md€), qui a permis le financement des 70 ouvrages olympiques. Elles comprennent également l'acquisition de matériel sécuritaire pour 215 M€, ainsi que des crédits dédiés au laboratoire antidopage français, à la régénération du réseau routier national, au « plan baignade » Seine ou encore à des investissements en Polynésie française. Ainsi, même dans une approche extensive du coût public des jeux de Paris 2024 tenant compte de l'héritage en équipements sportifs et en aménagements urbains qui est désormais légué aux territoires hôtes, la dépense publique relative aux JOP 2024 ne dépasse pas 5,2 Md€, dont 3,3 Md€ au titre de l'État. La dépense au niveau national se répartit comme suit : environ 38 % de dépenses directement versées aux deux principaux organismes créés pour les jeux (Solideo et comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques) ; environ 42 % de dépenses liées à la sécurisation de l'événement en tant que tel (qui n'étaient pas encore connues avec précision au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2025) ; 20 % d'autres dépenses de nature diverse, à la fois d'organisation (mobilisation des services publics), de mobilisation populaire et d'investissement. Enfin, l'ensemble des dépenses publiques doit être mis en regard de l'impact positif qu'il a généré. La réussite de l'événement s'apprécie en effet à travers la fierté de nos concitoyens dans de nombreux domaines : succès sportif et populaire, organisation sans faille, notamment en matière de sécurité (réduction du nombre de délits pendant les jeux), d'offre de transport et de respect des ambitions environnementales (- 47 % d'émissions de tonnes équivalent carbone par rapport à la moyenne des jeux de Londres 2012 et Rio 2016). Elle se mesure également en matière économique. Les JOP 2024 ont attiré 4,2 millions de spectateurs, soit 1,2 million de plus qu'à Londres en 2012. Parmi eux, 1,2 million sont venus de l'étranger, contre 0,8 million à Londres. Les dépenses des spectateurs ont généré environ 1,3 Md€ de retombées économiques au niveau national et 1,1 Md€ pour l'Île-de-France. Une hausse de 7,5 % des touristes français et de 7,1 % des visiteurs internationaux en Île-de-France entre octobre et novembre 2024 a déjà été enregistrée, contribuant ainsi positivement à l'activité, aux recettes fiscales et aux emplois mobilisés dans notre pays, évalués à plus de 160 000 dans les secteurs de la construction, de l'organisation et du tourisme.
Auteur : Mme Caroline Colombier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sports
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Sports, jeunesse et vie associative
Dates :
Question publiée le 1er juillet 2025
Réponse publiée le 11 novembre 2025