Question de : M. Fabien Di Filippo
Moselle (4e circonscription) - Droite Républicaine

M. Fabien Di Filippo alerte Mme la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative sur les conséquences des gels de crédits décidés par Bercy et de la décision qui en découle de restreindre l'accès au Pass'Sport aux jeunes de 14 à 17 ans, en excluant l'accès de ce dispositif aux enfants âgés de 6 à 13 ans. Cette réduction de moitié des crédits alloués au Pass'Sport aura des effets particulièrement délétères. Tout d'abord, elle portera atteinte à l'activité des associations, qui jouent un rôle incomparable dans le modèle sportif français. Celles-ci bénéficient dans leur très grande majorité d'un encadrement formé, qualifié et compétent, favorisant l'activité physique des enfants et leur offrant les conditions pour découvrir une passion et s'y épanouir, sur des infrastructures de qualité et avec une pratique structurée. Le Pass'Sport leur permet d'accueillir toujours plus de jeunes et de remplir encore davantage leurs missions en matière de santé, de cohésion, de transmission de valeurs. De plus, l'économie qui découlerait d'une amputation de moitié des crédits alloués à ce dispositif serait de 40 millions d'euros seulement. Cette somme, vraiment modeste au vu de l'ampleur de la dette de la France, est à mettre en parallèle avec les conséquences particulièrement lourdes d'un point de vue social, sanitaire et économique d'une telle décision. Il est important de rappeler qu'un euro dépensé afin de mettre la population en activité physique rapporte 1,5 euros en économie de santé et que le coût social de l'inactivité physique en France est estimé à 140 milliards d'euros par an. À l'heure où la sédentarité fait des ravages, notamment parmi les moins de 18 ans où le taux d'obésité a plus que doublé en 20 ans, il est essentiel de promouvoir et de soutenir en priorité la pratique du sport pour le plus grand nombre et en particulier pour les enfants. 80 % des 11-17 ans sont aujourd'hui en-dessous des seuils d'activité physique recommandés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). En France 17 % des enfants et adolescents sont en surpoids, soit 1 sur 5, et 49 % des adultes. 35 % des enfants de 2 à 7 ans atteints d'obésité en souffrent en raison du manque d'activité physique. Or c'est à cet âge que se constitue le capital santé et que s'opèrent les acquisitions motrices et cognitives fondamentales. Exclure les jeunes enfants du Pass'Sport revient donc à aggraver cette situation et aura des conséquences pour leur avenir, alors qu'il est prouvé que la pratique régulière d'une activité physique dans l'enfance augmente les probabilités de pratiquer une activité physique à l'âge adulte. L'objet originel du Pass'Sport était de transmettre une culture sportive, les valeurs du sport et le goût de l'effort à un maximum d'enfants dès le plus jeune âge. Manifestement, les choix faits pour des raisons comptables de court terme en éloignent les Français et risquent de le rendre inopérant, malgré tous les discours de l'exécutif depuis huit ans sur l'enjeu capital de l'organisation des jeux Olympiques en France et de l'héritage qu'ils doivent laisser dans la société. En 2024, le recours au Pass'Sport a progressé par rapport à l'année précédente : 1,65 million de jeunes en ont bénéficié, contre 1,32 million en 2023. Le taux de recours a atteint 26 %, avec une part croissante de bénéficiaires qui sont des jeunes issus des zones rurales et des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il est important de souligner que le nombre de licenciés de moins de 14 ans a augmenté depuis l'entrée en vigueur du Pass'Sport. Cette augmentation a même été supérieure pour les filles à celle constatée chez les garçons et une partie des demandes d'inscription en club n'a pas pu aboutir faute de capacité d'accueil ou d'encadrement. Cette évolution doit être encouragée. Pour préserver le Pass'Sport, d'autres pistes d'économies peuvent être envisagées, plus bénéfiques à la réduction des déficits et plus pertinentes au regard de l'inefficacité de certains dispositifs lancés ces dernières années. La branche famille de la CAF, excédentaire de plus d'un milliard d'euros, pourrait éventuellement financer ce dispositif. Elle soutient par exemple le Pass Colo, qui ne profite qu'aux enfants dans l'année civile de leurs 11 ans, n'a concerné que 15 905 enfants en 2024, avec un bénéfice nul d'un point de vue sanitaire ou social et dont le budget prévu est de 9 millions d'euros avec une montée en charge jusqu'en 2027 pour atteindre 30 millions d'euros. Son aspect symbolique et ses effets dérisoires légitiment d'interroger son existence dans le contexte actuel qui appelle des idées claires sur les priorités d'action de la France. Des économies importantes peuvent également être réalisées sur des prestations à destination des jeunes particulièrement coûteuses et qui manquent largement leurs objectifs, telles que le Pass Culture dans sa part individuelle ou le service national universel. Dans son rapport publié le 13 septembre 2024, la Cour des comptes a ainsi décrit le SNU, qui a reçu 128 millions d'euros de crédits dans le cadre du projet de loi de finances 2025, comme « un dispositif sans pilotage budgétaire » aux « résultats insatisfaisants », ayant échoué dans sa mission de réunir des élèves de tous horizons, présentant des « difficultés majeures en matière d'encadrement et d'hébergement », qui « induisent des risques pour la sécurité des jeunes volontaires » et ayant un coût largement sous-estimé, puisque sa généralisation pourrait engendrer jusqu'à 10 milliards d'euros de dépenses par an. Concernant le Pass Culture, la Cour des Comptes a également publié un premier bilan du concluant à un dispositif cher et devant être réformé. Ce Pass Culture représente un budget annuel de 267 millions d'euros de subventions, dont 210 millions du ministère de la culture pour les achats effectués individuellement par les jeunes et 57 millions de l'éducation nationale pour l'utilisation collective impulsée par les enseignants. Si l'utilisation collective permet la mise en place de beaux projets éducatifs, la part individuelle est massivement utilisée pour financer les mangas (54 %), mais aussi des jeux vidéo ou des abonnements à des services de vidéos à la demande. Le rapport coût / bénéfice du Pass'Sport pour la jeunesse et la société est incroyablement supérieur à celui d'un tel dispositif. Il lui demande quelles mesures elle compte prendre afin de promouvoir l'accès au sport dès le plus jeune âge, qui joue un rôle incomparable en matière de vivre-ensemble et de ciment social, véhicule des valeurs éducatives, collectives et d'exigence essentielles pour la construction des jeunes et leur permet de développer fortement leurs capacités à la fois physiques et psychiques, grâce au travail et à l'engagement des associations et fédérations sportives.

Réponse publiée le 18 novembre 2025

Depuis sa création en 2021, le Pass Sport a permis à plus de 5,2 millions de jeunes de bénéficier d'un soutien financier pour accéder à une activité sportive encadrée, dont plus de 1,6 million de jeunes en 2024 (+ 19 % sur un an). Pour 2025, dans un contexte budgétaire contraint, le dispositif est recentré sur les jeunes de 14 à 30 ans représentant les publics les plus éloignés d'une pratique sportive régulière et pour qui les freins à l'inscription sont les plus marqués. Selon les données de l'institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP), le taux de licences baisse à partir de 14 ans (81 % contre 91 % pour les 6-13 ans) pour s'établir à 27 % seulement à 18 ans. Ce phénomène touche notamment les filles et les jeunes issus de milieux modestes. Les bénéficiaires de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) de 6 à 13 ans demeurent éligibles au dispositif en 2025. Pour soutenir ce public, le montant de l'aide a été revalorisé à 70 € afin d'accroître l'impact et couvrir une part plus significative des frais d'adhésion. Par ailleurs, le ministère chargé des sports a mobilisé 2,5 millions d'euros destinés à soutenir les clubs sportifs situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) dans leurs actions en faveur du développement de la pratique des plus jeunes. Le recentrage du dispositif a suscité de nombreuses réactions de la part du mouvement sportif, des collectivités territoriales et des bénéficiaires, dont le ministère mesure pleinement la portée. Les enseignements tirés du bilan, attendu à l'issue de la campagne le 31 décembre 2025, permettront d'envisager, le cas échéant, des ajustements pour la campagne 2026, notamment concernant le périmètre et les publics éligibles, dans le respect du cadre budgétaire actuel qui sera issu des débats parlementaires sur le projet de loi de finances pour 2026. Ce bilan s'appuiera sur les retours des partenaires impliqués et visera notamment à évaluer l'impact du recentrage sur la prise de licences des jeunes. Une étude complémentaire de l'INJEP sera par ailleurs réalisée au premier semestre 2026. Le ministère poursuit parallèlement ses politiques publiques en faveur du développement de la pratique sportive dès le plus jeune âge, parmi lesquelles : la généralisation des 30 minutes d'activité physique quotidienne à l'école primaire ; le soutien au sport scolaire (USEP - union sportive de l'enseignement du premier degré, UNSS - union nationale du sport scolaire) qui bénéficie des financements de l'État via l'agence nationale du sport et de l'éducation nationale ; le développement du Savoir-Nager et du Savoir Rouler à Vélo (SRAV) en tant que savoirs sportifs fondamentaux ; le dispositif « 2 heures hebdomadaires de sport au collège » qui s'adresse aux collégiens de 11 à 14 ans des réseaux d'éducation prioritaire et cible les jeunes les plus éloignés d'une pratique en leur proposant une offre gratuite ; les aides mises en place par différentes institutions comme les CAF (caisses d'allocations familiales) ou les collectivités territoriales, qui viennent renforcer les initiatives du mouvement sportif.

Données clés

Auteur : M. Fabien Di Filippo

Type de question : Question écrite

Rubrique : Éducation physique et sportive

Ministère interrogé : Sports, jeunesse et vie associative

Ministère répondant : Sports, jeunesse et vie associative

Dates :
Question publiée le 8 juillet 2025
Réponse publiée le 18 novembre 2025

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