RSGP : nouvelles contraintes pour la vente de produits en ligne
Question de :
M. Fabien Di Filippo
Moselle (4e circonscription) - Droite Républicaine
M. Fabien Di Filippo attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conséquences préoccupantes de l'entrée en vigueur du Règlement européen relatif à la sécurité générale des produits (RSGP), prévue pour le 13 décembre 2024. Ce règlement, visant à améliorer la sécurité et la transparence des produits vendus en ligne, introduit un ensemble de nouvelles obligations légales, techniques et administratives qui risquent de mettre en péril de nombreuses PME françaises. L'inflation normative en France n'a cessé de croître ces dernières années, avec plus de 400 000 normes applicables en 2022. Cette surcharge législative et réglementaire étouffe les entreprises, en particulier les PME, qui représentent 99,9 % du tissu entrepreneurial français et 72 % de l'emploi salarié. Ces entreprises sont indispensables au dynamisme économique du pays, mais se trouvent de plus en plus freinées par une inflation normative excessive. Le RSGP s'inscrit dans cette logique d'alourdissement réglementaire, imposant des obligations qui, bien que théoriquement louables en matière de protection des consommateurs, risquent d'être inapplicables pour certaines entreprises. En effet, ce règlement impose la traçabilité des produits, l'étiquetage avec les coordonnées des responsables, la désignation d'une personne responsable pour chaque produit et la traduction des informations de sécurité dans les langues des pays de vente. Plus le 13 décembre 2024 approche, plus la tâche de mise en conformité sur chaque plateforme se compliquera. La plupart n'ont encore rien annoncé de concret alors que le travail sera possiblement considérable, surtout à la période d'activité la plus chargée de l'année. Une nouvelle fois, l'Union européenne souhaite imposer une réglementation uniforme à des secteurs d'activité aux réalités complètement hétérogènes ! Ces exigences sont particulièrement contraignantes pour les secteurs où les produits sont d'occasion ou anciens, comme le marché des biens culturels, où il est parfois impossible de retrouver les fabricants ou les informations requises. Dans ce contexte, l'article 51 du RSGP pourrait permettre aux plateformes de ne pas exiger de modifications pour les offres déjà existantes qui respectent les normes actuelles. Cela pourrait entraîner la disparition de nombreuses offres sur les places de marché. Aussi, la mise en conformité avec le RSGP nécessitera un très gros travail pour des PME qui n'ont pas les ressources humaines et financières des grandes entreprises. La collecte d'informations, la modification des fiches produits, l'étiquetage dans différentes langues et la gestion logistique de ces tâches représentent des coûts importants, qui ne feront qu'alourdir la charge pesant sur ces entreprises, mettant ainsi leur compétitivité en péril. De plus, l'obligation de fournir le nom et les coordonnées du fabricant pourrait mettre en difficulté les petites entreprises, car ces informations représentent un avantage concurrentiel important pour elles. Leur divulgation pourrait fragiliser ces entreprises, qui seraient contraintes de révéler des éléments qu'elles considèrent comme confidentiels. Enfin, à titre d'exemple, dans le secteur des produits culturels, les marketplaces, qu'elles soient spécialisées ou généralistes, pourraient-elles considérer ces produits (CD, DVD, livres, jeux vidéo, revues etc.) comme des articles de collection ? Cela permettrait à ces catégories, qui comptent des millions de références avec souvent peu de stock, d'échapper aux exigences du règlement, sans pour autant mettre en jeu d'une quelconque manière la sécurité du consommateur. M. le député s'inquiète des conséquences de cette surrèglementation sur l'emploi et la compétitivité des entreprises. Les PME méritent un cadre réglementaire adapté à leur taille, à leurs spécificités et au risque réel de leur activité. En ce sens, il serait nécessaire de prévoir des ajustements au RSGP, prenant en compte la taille des entreprises, les types de produits vendus et les spécificités des secteurs concernés. Ainsi, il demande quelles mesures le Gouvernement prévoit de prendre pour alléger les contraintes réglementaires liées au RSGP et permettre aux PME françaises de continuer à contribuer à la richesse et à l'emploi sans être pénalisées par une surcharge administrative disproportionnée.
Réponse publiée le 10 décembre 2024
Le règlement européen relatif à la sécurité générale des produits (RSGP), adopté en 2023, entrera en vigueur le 13 décembre 2024. Ce règlement vise avant tout à adapter le cadre réglementaire en matière de sécurité générale des produits – dont la dernière directive actuellement en vigueur date de 2001 [1] – aux évolutions du marché, tels que l'essor du commerce en ligne ou le développement de nouvelles technologies (intelligence artificielle, objets connectés, etc.) ou de nouveaux marchés, tels que celui du reconditionné. Si cette mise à jour réglementaire est dans l'intérêt premier des consommateurs européens afin de garantir un niveau élevé de sécurité des produits qui sont mis à leur disposition, elle est tout autant destinée aux acteurs économiques. En effet, ce règlement vise également à mettre sur un pied d'égalité l'ensemble des acteurs de la chaîne de distribution, qu'ils soient nationaux et internationaux, dont certains étaient jusqu'alors peu couverts par la réglementation, notamment les fournisseurs de places de marché en ligne (marketplaces). Plus largement, ce règlement s'inscrit dans la volonté de la Commission européenne de garantir une concurrence loyale entre les différents acteurs proposant des produits sur le marché européen afin que les mêmes obligations légales s'appliquent à tous. C'est la raison pour laquelle le RSGP impose, dans la lignée du règlement sur la surveillance du marché et la conformité des produits [2], aux exportateurs de pays tiers de déterminer une « personne responsable dans l'UE » qui sera le point de contact des autorités de surveillance en cas de signalement de produits illicites ou dangereux. Il convient par ailleurs de rappeler que le RSGP, loin de créer un ensemble d'obligations ex nihilo et de complexifier la réglementation, s'inscrit dans la continuité des principes et règles préexistantes au niveau européen en matière de sécurité générale des produits. Le RSGP complète en effet les législations sectorielles, dites « harmonisées » (par exemple la réglementation relative aux jouets ou aux matériels électriques et électroniques), afin de s'assurer que tous les produits soient au moins couverts par une obligation générale de sécurité (OGS), ce qui permet de tendre vers des obligations plus homogènes entre produits. En passant d'une directive à un règlement, il contribue en outre à harmoniser ce cadre général entre États membres afin d'en faciliter la mise en œuvre par les acteurs économiques et d'en renforcer la surveillance par les autorités compétentes. Ainsi, les acteurs économiques, notamment les fabricants et distributeurs, doivent répondre à des attentes similaires s'agissant des exigences leur incombant en matière de sécurité des produits, qu'il s'agisse par exemple de documentation technique à fournir ou de traduction des instructions de sécurité. Les acteurs les plus impactés par ce nouveau règlement seront avant tout les places de marché en ligne et les fabricants dans certains secteurs des nouvelles technologies, avant tout par un effet de rattrapage qui pourra générer des coûts d'adaptation transitoires. Pour autant, il convient de rappeler que seuls les produits mis sur le marché après le 13 décembre 2024 devront respecter les nouvelles exigences du RSGP. En outre, les obligations incombant aux différents acteurs de la chaîne de distribution sont non seulement adaptées au rôle de chacun au sein de celle-ci mais également proportionnées à la complexité du produit et/ou des éventuels risques que celui-ci présente. Ainsi, à titre d'exemple, la documentation technique à fournir par le fabricant sera moindre dans le cas des produits dont l'analyse de risque préalablement menée aura conduit à un risque faible. S'agissant des biens d'occasion vendus par des professionnels, dont les biens culturels, ceux-ci étaient déjà couverts par le cadre réglementaire issu de la DSGP (2001). Le RSGP étend de fait une partie de ces obligations aux places de marchés en ligne par symétrie vis-à-vis du commerce « hors ligne ». Enfin, la protection du secret professionnel, garantie à l'article 33 du RSGP, n'empêche pas la diffusion d'informations relatives à un produit à destination des autorités compétentes de chaque État-membre ou de la Commission européenne, afin de garantir une surveillance adéquate du marché. [1] Directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits [2] Règlement (UE) 2019/1020 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 sur la surveillance du marché et la conformité des produits
Auteur : M. Fabien Di Filippo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances et industrie
Dates :
Question publiée le 15 octobre 2024
Réponse publiée le 10 décembre 2024