Communication des données sur les violences commises par des forces de l'ordre
Question de :
Mme Danielle Simonnet
Paris (15e circonscription) - Écologiste et Social
Mme Danielle Simonnet attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la communication incomplète des données statistiques relatives aux violences commises par des agents des forces de l'ordre. Dans un État de droit, la transparence et l'exactitude de l'information publique sont des conditions essentielles de la légitimité démocratique. S'agissant des violences commises par des personnes dépositaires de l'autorité publique (PDAP), il est d'autant plus crucial que les institutions produisent et diffusent des données complètes, actualisées et accessibles. L'existence de mécanismes de contrôle ne saurait être pleinement effective sans un accès à des statistiques fiables, permettant d'évaluer l'ampleur des faits signalés, la réponse des institutions et l'évolution des pratiques. Cette exigence est d'autant plus importante que le recours à la force par l'État, souvent qualifié de « monopole de la violence légitime », appelle une vigilance particulière. Cette formule, héritée de Max Weber, ne saurait justifier un brouillage des responsabilités : si l'usage de la force peut être légalement encadré, il ne peut être tenu pour légitime qu'à condition d'être contrôlé, proportionné et soumis à la critique démocratique. Une information publique transparente sur les violences illégitimes – ou supposées telles – est dès lors indispensable. Elle constitue un gage de confiance entre la population et les forces de l'ordre, mais aussi une obligation au regard des engagements internationaux de la France en matière de prévention de la torture et des traitements inhumains ou dégradants. À ce titre, la production régulière de données officielles constitue un outil fondamental de redevabilité démocratique. En l'espèce, la communication gouvernementale se réfère le plus souvent aux seules statistiques produites par l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), y compris devant des instances de contrôle comme le Parlement ou les organes des Nations unies. Or ces chiffres sont partiels et ne reflètent pas l'ensemble des faits signalés ni les suites judiciaires éventuellement données. D'autres sources de données, plus complètes, existent. En 2019, la France a ainsi transmis au Comité contre la torture des Nations unies un tableau issu de la « base victimes » du ministère de l'intérieur, recensant les faits de violences commis par des personnes dépositaires de l'autorité publique (PDAP) enregistrés par les services de police et de gendarmerie sur la période de janvier 2016 à novembre 2019. Depuis, cette base n'a fait l'objet d'aucune actualisation publiée et ne permet pas, en l'état, d'analyser les suites judiciaires données à ces affaires. Par ailleurs, en 2022, le journal Politis a publié des données extraites du logiciel « Cassiopée » du ministère de la justice, qui recense les affaires de violences par PDAP enregistrées par les parquets, les décisions prises et, en cas de classement sans suite, les motifs de ce classement. Ces données, couvrant la période 2016-2021, constituent un outil pertinent pour évaluer la réponse pénale apportée. Toutefois, seules les affaires avec auteur identifié ont été communiquées, ce qui limite leur portée. Au regard de ces éléments, elle lui demande s'il est envisagé de, premièrement, publier une actualisation complète de la base « victimes » du ministère de l'intérieur ; deuxièmement, de rendre accessible l'ensemble des données contenues dans le logiciel « Cassiopée », incluant les affaires avec auteurs connus et inconnus, accompagnées d'un niveau de détail suffisant sur les infractions concernées. En outre, elle souhaiterait avoir les réponses suivantes : en premier lieu, le nombre annuel d'affaires de violences par personnes dépositaires de l'autorité publique (PDAP), y compris homicides, enregistrées dans la « base victimes » du ministère de l'intérieur ; et en second lieu, le nombre annuel d'affaires de violences policières (y compris homicides) traitées par d'autres services de police des polices que les inspections nationales (IGPN et IGGN).
Auteur : Mme Danielle Simonnet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Police
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date :
Question publiée le 8 juillet 2025