Mise en œuvre trop hâtive de la REP bâtiment
Question de :
Mme Laurence Robert-Dehault
Haute-Marne (2e circonscription) - Rassemblement National
Mme Laurence Robert-Dehault interroge Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques, sur l'insuffisance du maillage territorial des installations qui reprennent sans frais les déchets issus des produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment. La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite loi « AGEC ») étend le principe de responsabilité élargie du producteur (« REP ») des produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment en le codifiant au sein du 4° de l'article L. 541-10-1 du code de l'environnement. En application de ce dispositif, les artisans doivent s'acquitter d'une écocontribution auprès des producteurs ou fournisseurs de matériels au moment de l'achat de ces derniers. En contrepartie, des installations qui reprennent sans frais les déchets issus de ces produits ou matériaux devaient être mises en place. Toutefois, Mme la députée a été alertée par des artisans de son département de la Haute-Marne. Déjà étouffés par des contraintes normatives et écologiques, ils pointent désormais du doigt les effets néfastes de l'impréparation à l'entrée en vigueur de la REP du bâtiment. Tous ont unanimement souligné l'insuffisance du maillage des points de collecte gratuite des déchets et ont indiqué devoir se rendre auprès des déchèteries traditionnelles payantes ou être contraints d'effectuer plusieurs dizaines de kilomètres. À l'heure actuelle les artisans payent doublement l'impréparation des acteurs à cette réforme. Ils payent une première fois à l'achat du matériel et une seconde fois au moment d'abandonner les déchets. Ce coût supplémentaire se répercute bien souvent sur la facture payée par le client final. Par ailleurs, il existe une forte disparité entre les territoires et une disproportion entre les points de reprise accueillant les inertes, plutôt nombreux et ceux, moins nombreux, accueillant une plus grande variété de déchets. Le département de la Haute-Marne ne dispose à ce jour que de onze points de reprise, alors qu'il s'étend sur 6 211 km². Enfin, il est crucial que les tarifs des éco-organismes pour les années à venir soient connus au plus tôt afin que les entreprises puissent répercuter le montant des écocontributions dans les prix des devis établis plusieurs mois à l'avance. Les professionnels du bâtiment souhaiteraient un délai minimum règlementaire de 9 mois entre la publication des barèmes et leur entrée en vigueur. Elle souhaiterait savoir si elle se dit favorable à l'instauration d'un moratoire sur l'application de la REP bâtiment et de l'écocontribution jusqu'à avoir un maillage de points de collecte gratuite suffisant qui respecte les seuils fixés par voie règlementaire.
Réponse publiée le 17 décembre 2024
Certains professionnels du secteur du bâtiment ont exprimé des inquiétudes concernant la mise en œuvre de la filière à responsabilité élargie du producteur (REP) pour les produits et matériaux de construction destinés au bâtiment qui est mise en place de manière opérationnelle depuis le 1er janvier 2023. Cette filière REP est très attendue par de nombreuses parties prenantes, notamment les collectivités territoriales qui supportent aujourd'hui une partie des coûts de gestion des déchets du bâtiment, y compris, pour nombre d'entre elles, des déchets amenés par des professionnels. En outre, elles doivent faire face au phénomène des dépôts sauvages qui leur coûte environ 400 millions d'euros par an. Dans ces circonstances, et dans le contexte budgétaire auquel le Gouvernement doit faire face, il convient d'agir. Décider d'un moratoire sur le développement d'une filière qui a pour objectif de déployer un maximum de points de reprise destinés aux professionnels n'apparaît donc pas pertinent. Le déploiement de cette filière repose sur un principe de reprise gratuite des déchets lorsqu'ils sont triés, et le développement d'un maillage resserré de points de collecte de proximité accessibles à tout détenteur, qu'il soit un particulier ou un professionnel du bâtiment. Pour assurer cette reprise sans frais, les éco-organismes ont l'obligation de soutenir financièrement les opérateurs qui assurent d'ores et déjà la collecte de ces déchets, afin de couvrir les coûts qu'ils supportent pour ces opérations. Ces soutiens financiers sont apportés à toute personne qui en fait la demande, sans discrimination, dès lors que cette personne accepte les clauses des contrats-types qui ont été élaborés par les éco-organismes. Le ministère de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques suit avec attention le déploiement de ces points de reprise. La réglementation a même été modifiée en 2023 pour permettre un suivi trimestriel du nombre de points ouverts. Les objectifs qui ont été fixés à la filière par son cahier des charges ont été atteints. Ce sont ainsi plus de 3200 points de reprise qui ont été ouverts sur le territoire national. Pour ce qui concerne l'établissement des barèmes des éco-organismes, ils sont établis en tenant compte des dispositions des obligations figurant dans le cahier des charges de la filière. S'agissant d'une filière naissante, il a été prévu un calendrier progressif de prise en charge. Il parait effectivement opportun de pouvoir disposer d'un barème de tarifs au plus tôt. Un délai de 9 mois semble néanmoins trop ambitieux compte tenu de la nécessité de réviser chaque année les tarifs en fonction de nombreux paramètres et notamment de l'inflation des matériaux et des coûts de reprise. En ce sens, la situation -pour les professionnels du bâtiment- ne diffère pas de l'évolution des prix de l'énergie, des matériaux ou du coût de la main-d'œuvre qui peut se produire entre l'établissement du devis et la réalisation de la prestation. Des formules de révision peuvent être mises en place.
Auteur : Mme Laurence Robert-Dehault
Type de question : Question écrite
Rubrique : Déchets
Ministère interrogé : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques
Ministère répondant : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques
Dates :
Question publiée le 15 octobre 2024
Réponse publiée le 17 décembre 2024