Souveraineté industrielle, alimentaire et sanitaire
Question de :
M. François Ruffin
Somme (1re circonscription) - Écologiste et Social
Question posée en séance, et publiée le 23 octobre 2024
SOUVERAINETÉ INDUSTRIELLE, ALIMENTAIRE ET SANITAIRE
Mme la présidente . La parole est à M. François Ruffin.
M. François Ruffin . « Déléguer notre protection, notre santé, notre alimentation à d'autres est une folie. » Voilà ce que déclarait le Président de la République au cœur de la crise du covid. Il ajoutait : « Nous devons en reprendre le contrôle. » J'approuvais, nous étions nombreux à approuver cette volonté de souveraineté. Toutefois, que faites-vous à présent, monsieur le Premier ministre ? La France est vendue à la découpe.
Dans l'industrie, c'est la folie, et vous laissez faire. Chez moi, dans la Somme, Watts ferme du jour au lendemain et part en Bulgarie. À Saint-Nazaire, General Electric renvoie ses éoliennes en mer aux États-Unis. Stellantis, dont l'État est actionnaire, délocalise ses sous-traitants en série, malgré ses 18 milliards de profits. La casse de nos usines reprend comme avant.
Pour l'alimentation aussi, c'est la folie, et vous laissez faire. Emmanuel Macron l'avait promis, juré, croix de bois, croix de fer : non, il n'accepterait pas l'accord de libre-échange avec le Mercosur. Et puis, finalement, si, la commission va signer ; le Président va laisser faire, sans opposer son veto, avec de médiocres indemnités en contrepartie, en passant par-dessus notre assemblée et la démocratie.
C'est la souveraineté sanitaire, enfin, que vous bradez. Sanofi a déjà fermé en France dix usines, huit laboratoires, a détruit sa recherche sur le diabète, sur la neurologie, sur le cancer, tout ça pour les actionnaires, et avec votre complicité, votre laisser-faire. Désormais, voilà que Sanofi se débarrasse du Doliprane, de ses médicaments les plus populaires, toujours pour ses actionnaires, et là encore, vous laissez faire.
M. Laurent Croizier . On ne fait pas de la politique avec des caricatures !
M. François Ruffin . Voilà la grande question qui nous sépare, monsieur le Premier ministre : voulons-nous reprendre le contrôle ou laisser faire ? Laisser faire le libre-échange ; laisser faire le marché ; laisser faire cette folie. Vous laissez faire. Nous voulons et nous allons reprendre le contrôle. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, SOC et GDR.)
M. Pierre Cordier et Mme Émilie Bonnivard . Les Insoumis n'ont pas applaudi !
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Antoine Armand, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie . Je vais essayer de répondre à vos caricatures par des faits. (Exclamations sur les bancs des groupes EcoS et SOC.) Depuis plusieurs années, nous défendons notre continent face au risque d'effacement industriel auquel il est exposé, face aux agressions venues des pays asiatiques et à la concurrence des États-Unis, qui n'est pas toujours loyale. Nous défendons notre industrie grâce au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, qui permet de taxer davantage ceux qui produisent en émettant du carbone à l'extérieur de l'Europe. Nous défendons l'Europe et son industrie par un plan de relance et par une stratégie industrielle à la hauteur des entreprises. Nous défendons le secteur automobile que vous avez mentionné, monsieur Ruffin, et auquel je sais que vous tenez, en défendant l'Europe face aux subventions et au dumping asiatique, en décidant des droits de douane supplémentaires – nous l'avons fait récemment encore, avec la Commission européenne.
Mme Émilie Bonnivard . Quatre fois moins que les États-Unis !
Mme Dominique Voynet . Et le Mercosur ?
M. Antoine Armand, ministre . Nous défendons notre stratégie industrielle et sanitaire, celle qu'a évoquée le Président de la République, que vous avez cité, après la crise du covid, celle qu'a réaffirmée le Premier ministre, en obtenant de Sanofi et d'Opella des garanties très fermes et précises. Vous auriez pu les mentionner : le maintien de l'emploi pour les salariés de Compiègne et de Lisieux, l'amplification de la recherche et du développement – ce n'est pas rien ! –, des investissements supplémentaires, à hauteur de 70 millions, pour le territoire français et les salariés que vous défendez – ce n'est pas rien ! Et l'actionnariat de l'État, par l'intermédiaire de BPIFrance, au sein d'une entreprise, pour s'assurer que l'ensemble de ses engagements seront respectés, ce n'est pas rien. Certes, il est sans doute plus facile de vitupérer, de critiquer, de caricaturer, de psychiatriser ses opposants, plutôt que prendre le temps d'établir les faits et de défendre l'industrie de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem ainsi que sur quelques bancs du groupe DR.)
M. Sylvain Maillard . Très bien !
Mme Julie Laernoes . Les faits, ce sont des emplois qui ont disparu !
Mme la présidente . La parole est à M. François Ruffin.
M. François Ruffin . Des « garanties fermes » ? On a entendu les mêmes mots pour Pechiney, Alcatel, Arcelor, Alstom ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC.) Derrière, tous ces fleurons ont été vendus à la découpe. (Mêmes mouvements. – M. Stéphane Peu applaudit également.)
Auteur : M. François Ruffin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances et industrie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 octobre 2024