Question écrite n° 8522 :
Non-exécution des décisions du juge aux affaires familiales

17e Législature

Question de : Mme Tiffany Joncour
Rhône (13e circonscription) - Rassemblement National

Mme Tiffany Joncour attire l'attention de M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'inquiétante banalisation des infractions pour non-représentation d'enfants et plus largement, sur l'absence de réponse effective lorsque les décisions rendues par les juges aux affaires familiales ne sont pas respectées. Chaque année, des milliers de pères et de mères titulaires d'un droit de visite ou d'hébergement se heurtent à un mur : celui de l'inertie judiciaire. Malgré des décisions dûment établies par les juridictions compétentes, l'un des deux parents peut impunément s'y soustraire, au mépris des droits de l'autre - et de l'intérêt de l'enfant. Ce constat, largement partagé sur le terrain, révèle une faille béante dans l'État de droit : des décisions de justice non appliquées, des plaintes classées sans suite et une impunité de fait pour ceux qui organisent, dans la durée, l'effacement d'un parent. Mme la députée s'inquiète de ce que cette situation génère, à juste titre, un profond sentiment d'injustice chez les familles concernées et interroge plus largement la crédibilité du système judiciaire. L'État, garant de l'exécution des décisions de justice, ne peut détourner le regard lorsqu'un parent est privé de son enfant, en toute illégalité. Elle lui demande quelles mesures concrètes il entend prendre pour mettre fin à cette impunité silencieuse, garantir l'effectivité des droits parentaux et rappeler que la justice ne vaut que si elle est respectée.

Réponse publiée le 2 décembre 2025

Le juge aux affaires familiales, garant de l'intérêt supérieur de l'enfant, peut prendre les mesures nécessaires permettant de garantir la continuité et l'effectivité du maintien des liens de l'enfant avec chacun de ses parents (article 373-2-6 aliéna 2 du code civil). A cet égard, afin d'assurer l'exécution de sa décision relative aux droits de visite et d'hébergement, le juge aux affaires familiales peut, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, à la demande de l'un des parents ou même d'office, ordonner une astreinte (article 373-2-6 aliéna 5 du code civil). L'astreinte peut également être sollicitée auprès du juge par l'un des parents en cas d'inexécution de la décision statuant sur les droits de visite et d'hébergement. En outre, le juge peut condamner le parent qui fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée à l'exécution d'un titre exécutoire concernant les droits de visite et d'hébergement au paiement d'une amende civile, d'un montant maximal de 10 000 euros (article 373-2-6 alinéa 5 du code civil). Le juge dispose également de la possibilité de demander au procureur de la République de requérir le concours de la force publique pour faire exécuter une décision rendue par lui-même ou par un autre juge aux affaires familiales afin de permettre le maintien des relations personnelles de l'enfant avec son père ou sa mère (article 373-2 alinéa 3 du code civil et circulaire n° JUSC1909309C CIV/04/2019 de présentation des entrées en vigueur des dispositions civiles de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice du 25 mars 2019 : annexe 12). Le juge aux affaires familiales dispose donc de différents outils pour assurer l'exécution des décisions accordant au parent des droits de visite et d'hébergement. Il relève ensuite de son appréciation souveraine de les mettre en œuvre si les circonstances de l'espèce l'exigent au regard de l'intérêt de l'enfant. Enfin, en sus de ces pouvoirs coercitifs conférés par le législateur au juge aux affaires familiales, le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (article 227-5 du code pénal), permettant ainsi au procureur de la République, dans le cadre de son opportunité des poursuites, de réprimer pénalement les atteintes à l'exercice de l'autorité parentale. Lorsque le procureur de la République décide, en opportunité, de classer la plainte sans suite, le justiciable n'est pas dénué de tout droit.  Premièrement, le recours hiérarchique devant le procureur général, prévu par l'article 40-3 du vode de procédure pénale, permet de contester la décision de classement sans suite. Le procureur général peut enjoindre au procureur de la République d'engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente s'il l'estime opportun. À défaut, il informe le plaignant de la confirmation du classement snas suite. Deuxièmement, la plainte avec constitution de partie civile, selon l'article 85 du code de procédure pénale, permet au plaignant de saisir directement le juge d'instruction. Cette démarche est recevable si une première plainte a été déposée et que le procureur a informé le plaignant du classement sans suite ou si un délai de trois mois s'est écoulé depuis le dépôt de la plainte simple. Le juge d'instruction a l'obligation d'instruire le dossier, sauf si les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite. Enfin, la citation directe permet au plaignant de citer directement l'auteur présumé des faits devant un tribunal correctionnel ou de police. Cette procédure aboutit à un jugement du tribunal correctionnel, qui peut prononcer une condamnation ou une relaxe, éventuellement assortie de dommages et intérêts pour la partie civile. Ces trois recours offrent au plaignant des moyens de poursuivre l'action judiciaire malgré un classement sans suite initial en sorte qu'il apparaît que le système actuel apporte des garanties suffisantes pour permettre au parent dont les droits seraient fraudés d'agir en justice.

Données clés

Auteur : Mme Tiffany Joncour

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enfants

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 15 juillet 2025
Réponse publiée le 2 décembre 2025

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